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Actualité

Voir, juger, agir. Aventures et mésaventures à travers le monde... 🌦
ActualitéTibovski - Dessin de la quinzaine

Ouïghours : Le visage de l’horreur 

par Tibovski 5 juillet 2020
écrit par Tibovski
Ouïghours : Le visage de l’horreur

 

Depuis longtemps, je souhaitais évoquer le cas des populations Ouïghours dans cette rubrique. Mais face à tant d’horreur aucun de mes mots, ni de mes illustrations ne semblent assez percutant. Il faudrait au minimum un Guernica ou un J’accuse pour dépeindre, sans trop de ridicules, la gravité de la situation. Cette ethnie musulmane est sérieusement persécutée par l’Etat chinois depuis le début des années 2000. Le gouvernement chinois construit en 2014 des camps d’internement et de rééducation destinés à enfermer des musulmans. Aujourd’hui encore des millions de personnes sont internées dans ces camps. 

De jour en jour, la situation semble s’assombrir. Pour être honnête, c’est l’enquête de Vice sur le commerce d’organes qui m’a décidé à consacrer un dessin à ce propos. Je n’ai toujours rien de brillant à vous offrir sur la question, mais me voilà seulement plus incommodé qu’avant d’éviter le sujet. Cet article n’a donc pour autre intention que de vous signaler, sans prétention aucune, l’existence de ces atrocités. Je vous invite, ainsi, à vous documenter de votre côté sur les proportions de cette infamie qui implique censure, stérilisation, torture et exécution. Et si la condition des Ouïghours rappelle le sort d’autres minorités musulmane en Asie (comme les Rohingyas dont j’ai déjà parlé dans cet article), il est toutefois beaucoup plus difficile diplomatiquement de résoudre cette crise humanitaire en faisant pression sur l’Empire du milieu ; première puissance économique mondiale.

Peut-être aurai-je l’occasion de traiter de façon plus spécifique la question ouïghoure dans un futur article. 

 

5 juillet 2020 2 commentaires
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ActualitéTibovski - Dessin de la quinzaine

Syndrome Post-confinement

par Tibovski 20 juin 2020
écrit par Tibovski
Le déconfinement

 

On dit que l’effet de souffle survenant après une explosion peut être plus dangereux que la déflagration elle-même. Psychologiquement, c’est l’impression que j’ai eu avec l’après-confinement. Vous avez probablement, comme moi, craint que l’enfermement et la privation ne nous transforment ou, plutôt, qu’ils nous révèlent le pire en chacun de nous. Et ce fut le cas, dans une certaine mesure. Les violences conjugales et familiales ont explosé durant ces quelques mois. Le taux de divorce a également bondi en Chine dès la levée des mesures d’isolement. Pour ma part, le confinement s’est déroulé comme une routine morne mais supportable. Evidemment, nous n’avons pas été tous égaux face à cette épreuve. Mon expérience ne vaut pas grand chose sinon d’avoir attiré mon regard sur un phénomène bien curieux : le déconfinement. 

 

Allô docteur….

Bien que biaisé par mon propre vécu, j’ai tout de même pris le soin de recueillir les impressions de mon entourage et constaté chez ces sujets un trouble général. Je l’appellerai “le syndrome post-confinement”. En voici les symptômes : un sentiment de vacuité, une perte de repères, une diminution aiguë de la concentration et enfin une haine viscérale de ces petites habitudes qui ont rythmé ces deux longs mois de confinement. Durant cette période, j’étais dans des conditions que je savais provisoires, relatives à la survie et à l’amélioration globale de la situation. Dès lors que nous avons connu la date d’échéance, notre réclusion s’en est trouvée beaucoup mieux rythmée car en partie planifiée. Nous n’avions qu’à attendre et nous retrouverions notre liberté chérie. Sauf que non. Nous n’avons eu le droit qu’à une liberté conditionnelle. L’après-confinement n’a pas été semblable à l’avant confinement. Ce fût donc une déception, mêlée à de l’incertitude qui nous a fait ressentir le poids de nos renoncements. Nous ne savions ni quand ni comment nous pourrions retrouver notre vie d’autrefois. Tout en sachant que c’était officiellement terminé, je n’ai pas ressenti le soulagement que j’espérais. Et cela m’a fait perdre tout le tempo qui m’avait permis de tenir jusque – là sans trop de difficultés. La racine du mal, c’est que le déconfinement n’a pas été une vraie fin du confinement; il n’a été que le sas de décompression. 

 

Un mal dispensable

Si je vous dis cela, c’est parce que ce ressenti n’est pas indépendant de la gestion politique de la crise. On pourrait se dire qu’il y a là une sorte de syndrome post-traumatique inéluctable après un tel choc. Même si je suis persuadé que cela est en partie vrai, je ne pense pas que le problème est fatalement lié à l’épidémie. Trois choses sont responsables de ce sentiment : 1) Un confinement sévère 2) Un déconfinement lent 3) Peu d’informations de la part du Gouvernement. Ces trois éléments sont le fait des responsables politiques. Et si je me permets de le souligner, c’est parce qu’il aurait pu en être autrement. Le confinement sévère de la France se justifie surtout en raison des manques de prévisions prises par les autorités en charge (voir mon article sur la pénurie des masques). La rigueur de ces mesures a renforcé l’effet d’égarement causé par un déconfinement à tâtons et une communication au compte-goutte. 

 

Tous sur le divan

Un peu de nuances à tout cela ; Xavier Briffault, chercheur CNRS en épistémologie de la santé mentale s’est penché sur les effets des mesures sanitaires. Il constate, en effet, que le niveau d’anxiété de la population est resté à un niveau normal durant le confinement. Selon lui, ce n’est pas uniquement dû à des “mécanismes de résilience” mais aussi au fait que le confinement a réduit pour beaucoup l’exposition à des sources de stress. Les données montrent également que le déconfinement a eu un effet sur l’anxiété en amplifiant les troubles du sommeil. Toutefois, le choc post-confinement n’a pas été aussi radical qu’anticipé. Cette transition pourrait avoir un effet plus subtil mais non moins important sur la santé psychologique de la population. 

 

Mon hypothèse, c’est qu’on est toujours dans un état de sidération, voire de déni, face à ce qui s’est passé. C’est une crise inédite dans l’histoire de la France et de l’humanité. Les réponses sociales ont été aussi folles que les inflammations provoquées par le Covid-19, chez les malades les plus touchés. En majorité, les victimes ont été tuées par une sur-réaction de leur système immunitaire. On peut dire qu’il y a eu aussi une sur-réaction du corps social à ce phénomène sanitaire.

 

Par la suite, les effets de cette épidémie sur la santé mentale s’expliqueront aussi par les conséquences socio-économiques qu’elle engendrera. Comme le dit Xavier Biffrault : “L’inquiétude porte plutôt sur ceux qui vont pâtir, demain, des conséquences économiques de la crise”. Évidemment, les conséquences directes du confinement que nous avons évoquées valent surtout pour ceux qui ont pu rester confinés chez eux. Car, encore une fois, nous n’avons pas tous vécu la même crise. On peut, en ce sens, penser au personnel soignant.

 

Il faudra aussi surveiller les soignants, en première ligne contre le Covid-19. Le fait d’avoir été dans l’action les a d’abord protégés psychologiquement. Mais les lendemains peuvent se révéler difficiles. 

 

Société post-traumatique

Cette angoisse post-confinement est comparable à ce que notre société endure. Nous ne souffrons pas qu’individuellement de cette catastrophe car c’est tout le corps social qui a été frappé. Un “après” fragile se dessine et nous craignons le retour de bâton sans le vivre encore. Le sentiment que rien ne peut et ne doit demeurer comme avant grandit. Ici comme ailleurs, cette situation ne conduit qu’à des interrogations, car tout peut advenir à présent. C’est précisément cette imprévisibilité d’un retour obligé à une normalité impossible qui crée l’angoisse. 

 

Prenez soin de vous et de vos proches et à la prochaine quinzaine !

 

Le dessin est réalisé par l’auteur Tibovski. 

20 juin 2020 4 commentaires
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ActualitéTibovski - Dessin de la quinzaine

Black Deaths Matter

par Tibovski 6 juin 2020
écrit par Tibovski

 

Laissez-moi vous raconter une sordide histoire. Il est environ 20h dans la banlieue de Minneapolis. Un homme se tient dans sa voiture. C’est notre protagoniste, même si son histoire sera brève. La police vient à sa rencontre car il aurait fait usage d’un billet de 20 dollars soupçonné d’être contrefait. Les officiers l’interpellent et tentent de l’immobiliser. Pour se faire, Derek Chauvin le maintient face contre sol avec le genoux contre sa nuque. Après plus de 8 minutes d’étranglement, l’interpellé décède d’étouffement. Au cours de ces longues minutes, les premières sont remplies de supplications et de “Je ne peux pas respirer” lancées par notre homme. Mais ces bruits s’étouffent peu à peu. Les deux dernières minutes sont pleines du silence d’un corps inerte maintenu inutilement au sol.

Notre homme s’appelait George Floyd et était afro-américain. Cela n’est pas un détail. Parce qu’au téléphone, l’officier a insisté trois fois pour connaître la “race” du suspect. Parce que ce même officier, Derek Chauvin, n’est pas un enfant de coeur et est impliqué dans de nombreuses bavures et interventions mortelles. Parce que la police de Minneapolis est dénoncée depuis un moment pour son racisme. Et parce qu’aux Etats-Unis il est fréquent que de simples interpellations d’individus de couleur finissent à la morgue. Mais rien de nouveau sous le soleil. Cette histoire vient s’ajouter à celles des innombrables victimes du racisme de la police américaine. Nos journalistes n’oublient pas de rappeler que ce fait divers reflète un problème général de la condition des afro-américains. 

Ils sont fous ces américains

Seulement, permettez-moi de poser une question. La question à un million d’euros. Est-ce si différent chez-nous ? 

La France a son lot de victimes. Adama Traoré est mort en 2016 dans des circonstances proches de celles de George Floyd. Il décède d’étouffement après avoir subi un plaquage ventral et le poids de trois officiers sur son dos. De la même manière, les gendarmes avaient refusé de le détacher même après qu’il se soit plaint de difficultés à respirer, même après avoir uriné dans son pantalon, même après avoir perdu connaissance. Les pompiers qui sont intervenus après ont expliqué, par la suite, que les gendarmes avaient d’abord refusé qu’on lui retire les menottes pour qu’il soit examiné.

Des cas comme ceux-ci, il y en a des dizaines et des dizaines. Grâce au travail titanesque d’associations nous savons que chaque année, en France, plusieurs dizaines de personnes décèdent suite à des interpellations brutales. Plusieurs études d’envergure (ici et là) démontrent la discrimination “au faciès” des contrôles de police. Amnesty International a publié un rapport dénonçant les pratiques discriminatoires et inhumaines des forces de l’ordre durant le confinement. Et pourtant, au même moment que l’affaire Georges Floyd, Camelia Jordana se fait épingler/trainer dans la boue pour avoir osé souligner le problème de notre police. 

Des policiers racistes ou une police raciste ? 

De nombreuses affaires montrent qu’il y a un gros problème de racisme dans notre police : des témoignages d’anciens flics, une conversation WhatsApp, le terme “bamboula” banalisé, les blagues dégradantes sur un homme se noyant, des écussons fascistes choisis par certaines brigades. La liste est très longue. Qu’il y ait des éléments racistes dans la police française, ce n’est pas nouveau.

La véritable question est : sont-ce des affaires isolées ou un problème général de la police française ? L’institution doit-elle être tenue responsable de ces morts ? 

Et bien, à mon humble avis, oui, et de la même manière que pour la police américaine. Les cas de mort ne sont pas isolés, car ils montrent des régularités systématiques. Ceux-ci adviennent majoritairement dans des quartiers populaires à l’occasion d’interpellations soit durant la poursuite, soit durant l’immobilisation. Les données montrent que ces incidents sont décorrélés des niveaux de délinquance ou du danger de la situation. Une part non négligeable des morts est causée par l’intervention de la BAC (Brigade anti-criminalité), une unité spécialisée dans l’intervention en “zones sensibles”. Des techniques d’interventions disproportionnées ont été mises en place dans ces quartiers selon des logiques “guerrières” et des finalités “sécuritaires”. Ces quartiers sont devenus dès 2005, sous le Ministère de l’Intérieur de Nicolas Sarkozy,  des lieux de répression et des laboratoires pour les techniques coercitives. Un véritable phénomène de restructuration de la police ainsi qu’un renforcement de l’armement ont été responsables d’une recrudescence des violences policières. 

On a là autant des violences policières qu’une violence d’Etat. Car ce sont bien les stratégies de maintien de l’ordre qui favorisent ces exactions. D’ailleurs, les officiers impliqués ne comprennent parfois pas ce qui leur est reproché, puisque dans certains cas ils ne font qu’appliquer le protocole. Par exemple, le plaquage ventral encore pratiqué en France a été responsable d’une vingtaine de morts par asphyxie en moins de 30 ans. Cette technique a été interdite dans de nombreux pays européens et décriée par plusieurs associations de défense des droits de l’Homme. En l’occurrence, Amnesty International dénonce en 2011 l’usage de cette technique auprès du Ministère de l’Intérieur français.

 

Inspecteur Harry en ZSP

Mais dans bon nombre de cas, le problème ne vient pas de pratiques enseignées en école de police mais plutôt de comportements violents normalisés. Les Brigades anti-criminalité ont été créées notamment pour être mobiles, adaptables afin d’agir rapidement et efficacement. Ces brigades interviennent dans des quartiers dits “sensibles” en tenues civiles et voiture banalisées. Ces particularités ont encouragé dans ces brigades une attitude belliqueuse qui se traduit par des intimidations, insultes et agressions. Cette police agit dans le secret des banlieues et se croit investie d’une mission de nettoyage. Les irrégularités font partie des “ficelles du métier” car ils assurent le succès des opérations. On a là un ethos qu’on retrouve même auréolé dans le cinéma et les séries. Rien de plus sexy qu’un flic pas très procédurier usant de “méthodes peu orthodoxes” pour attraper les méchants. 

Par conséquent, on a soit des techniques policières officielles extrêmement controversées, soit des comportements de cowboys qui sont tolérés, voire encouragés dans certaines zones. C’est donc plus que des problèmes individuels, c’est une certaine pratique policière qui est problématique. 

C’est sa faute à eux !

Vient ensuite la façon dont l’institution réagit à ces affaires. Là encore, c’est le même mode opératoire pour disculper les policiers. Très vite, on a le droit à des communiqués sur les circonstances, sur le casier de l’interpellé, sur son dossier médical. Ces éléments viennent amoindrir la gravité de l’affaire en voulant insister sur la dangerosité du suspect ainsi que sur la fragilité de sa santé. Presque à chaque fois la victime nous est dépeinte en démon souffreteux, une sorte de Jacques Mesrine phtisique. Mais une police qui se retrouve avec autant de morts durant des interventions est une police qui remplit terriblement mal sa fonction. Peu importe que la victime soit dealeur, cela ne la rend pas coupable de sa mort pour autant. Bref, aussi criminelles soient les victimes, les policiers n’ont pas le droit de vie et de mort sur des citoyens. Valérie Codaccioni détaille ce renversement de la culpabilité dans son ouvrage.

[…] L’apposition d’étiquettes dénonciatrices et stigmatisantes – ”casseurs”, ”voyou”, “loubards” – [fait] appel à l’imaginaire sécuritaire des contemporains des procès et [tend] à invisibiliser la violence déployée par les auteurs d’homicide tout en accentuant celle de la personne tuée. Surmobilisée l’expression “bien connu des services de police” qui fige la victime dans un statut de délinquant et en fait un coupable éternel devient ainsi la justification des homicides commis en dehors de tout état de légitime défense et le procédé par lequel la vie de la victime et sa valeur sont dépréciées”

Ce processus de disculpation se fait valoir autant sur l’opinion générale qu’auprès de la justice. En 2016 l’ONG ACAT publiait un rapport qui montrait que les affaires de violences policières avérées bénéficient d’une étonnante clémence, sinon d’une totale impunité. La transformation de la mission policière et la redéfinition du maintien de l’ordre amorcé dans les années 2000 s’est également accompagnée d’un appareil judiciaire tolérant aux abus. Le climat sécuritaire, renforcée par les attentats, a favorisé la conviction que l’usage excessif de la force s’excusait, voire se justifiait dans certaines circonstances. Paradoxalement c’est le tournant autoritaire de l’ère Sarkozy qui, en alimentant la conflictualité, a instauré une insécurité et a vulnérabilisé les rapports entre la police et la population. Les conditions de travail des fonctionnaires de police en banlieue s’en sont retrouvées d’autant plus périlleuses. Les politiques sécuritaires ont tendance à renforcer l’insécurité de ces populations cibles et donc à légitimer ces mêmes politiques.

Je n’ai pas voulu ici traiter en profondeur la question des violences policières. Ceci nécessiterait un article de fond. Seulement il me semblait intéressant de souligner l’hypocrisie de la sphère politico-médiatique au travers de cette sombre actualité. Nous n’avons aucun problème à voir le racisme et la violence de la police outre-atlantique. En ce qui concerne notre pays, en revanche, c’est une autre histoire. “On ne peut pas généraliser”, “Il n’y a pas de violences policières ici”, “Il faut voir dans quels quartiers ils interviennent”….

Il est intéressant de constater qu’il est beaucoup plus confortable de voir le mal ailleurs que dans son propre jardin. À méditer jusqu’à la prochaine quinzaine. 

 

P.S. Pour vous inspirer une réflexion, voici des recommandations :

  • Le collectif “Désarmons-les”
  • Le travail des journalistes Taha Bouhaf et David Dufresnes
  • Le travail de l’avocat Arié Alimi
  • Le film “À nos corps défendants” de IanB

 

6 juin 2020 3 commentaires
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ActualitéTibovski - Dessin de la quinzaine

Bas les masques !

par Tibovski 20 mai 2020
écrit par Tibovski

 

La pandémie est une tragique infortune, à coup sûr. Mais la gestion de celle-ci par nos responsables politiques n’est pas moins tragique. Tout, absolument tout dans cette crise révèle les erreurs passées et les malices présentes de cette classe politique. Concentrons nous un instant sur les masques, car c’est bien cela qui cristallise l’animosité. Mediapart avait révélé dans un dossier le pot-aux-roses sur la gestion des masques. Nous voici à l’épisode 2, non moins riche en combines. Ce manège kafkaïen saurait nous inspirer de brillants jeux de mots. J’ai décidé pourtant de n’en conserver qu’un seul. C’est celui choisi comme nom par un collectif ayant récemment éclos durant cette période : “Bas les masques”.  

 

Une erreur du passé

Pour rappel, en janvier-février, L’Etat, alors alerté de la pénurie de masques, n’en a commandé qu’une très faible quantité. Une circulaire interministérielle de 2013 impose pourtant un stock d’un milliard de masques afin d’assurer une distribution à toute la population en cas d’épidémie. Cela signifie que l’Etat doit commander 100 millions de masques par an. Mais sous le mandat de François Hollande, 5 fois moins de masques qu’exigé sont achetés. Un rapport de 2018 stipulait que le stock de 100 millions de masques restant périmerait en 2019. Mais l’Etat, encore une fois, ne prend pas les mesures nécessaires. C’est pour cette raison que le stock était insuffisant au début de l’épidémie. Cette pénurie n’a été que faiblement compensée par la suite mais elle a surtout été dissimulée à la population. À la place, les autorités ont préféré adapter les mesures sanitaires au nombre de masques accessibles. Ce qui n’est pas idéal sur le plan de la santé publique, vous en conviendrez. Si vous vous demandiez pourquoi le mot d’ordre sur les masques était imprécis, en voici la raison. 

 

À vos aiguilles citoyens !

La conséquence directe de cela, c’est qu’il fallait combler le manque. Les commandes industrielles, trop lentes pour la situation d’urgence, ont motivé diverses initiatives. 

C’est le cas de couturières et couturiers professionnels qui ont engagé bénévolement leur temps à produire des masques afin d’approvisionner les services essentiels durant la crise. Ce système D a très bien fonctionné, si bien, même, que de nombreuses commandes publiques ont été faites par les municipalités, les hôpitaux, les commissariats. Malheureusement, ce qui ne devait être qu’une aide modeste a pris la place des usines et chaînes de production appropriés. Le problème c’est que ces professionnels n’ont pas les moyens de production de manufactures, et surtout travaillent à plein temps sans la moindre rémunération. Cela me chiffonne quelque peu, voyez-vous. On ne peut attendre du volontariat citoyen qu’il remplace l’industrie. Un collectif de couturier.e.s bénévoles s’est donc constitué autour de ce même constat. Ils ont choisi le nom de “Bas les masques” et réclament d’être rémunérés pour leur travail. Ne nous rabâche-t-on pas à tort et à travers que la période sera économiquement difficile pour tout le monde ? Ce sera également le cas pour ces professionnels de la couture, qui pourtant, offrent de leur temps et de leur savoir faire pour pallier les incompétences de nos gouvernants. Il est donc normal que ce travail soit rémunéré surtout s’il dépasse les conditions usuelles d’une activité bénévole.

 

Sales mioches

C’est un problème plus général. La façon dont cette crise est gérée est particulièrement révélatrice de l’absurdité de notre système. Les choix des dirigeants de couper dans des dépenses nécessaires (hôpitaux, masques, recherche…) s’expliquent à la fois par un court-termisme négligeant les menaces lointaines et par des priorités budgétaires plus lucratives. Il n’est pas nécessaire de s’étendre pour en démontrer l’absurdité, l’épidémie s’en occupe parfaitement bien. Loins d’assumer cette faute, les représentants préfèrent culpabiliser et infantiliser la population. Serge Halimi a publié, dans Le Monde diplomatique, un article fort intéressant à ce sujet. Oh et je ne m’en étonne pas. C’est bien la signature de ce gouvernement que d’user de “pédagogie” pour justifier l’injustifiable. Mais là, je dois avouer que l’exercice intellectuel s’avère plus qu’acrobatique. 

Les citoyens ont bien au contraire montré une ingéniosité et un sens du devoir remarquables, là où nos têtes dirigeantes pataugent encore dans leur impéritie. Le cas des couturier.e.s est loin d’être l’unique exemple. Monsieur Bidouille, un youtubeur spécialisé dans la culture des makers et fablabs, a consacré une vidéo entière à l’auto-organisation des citoyens pour répondre aux besoins sanitaires. 

 

 

Très vite des amateurs de partout se sont rassemblés pour concevoir, fabriquer, tester et distribuer localement des masques, des visières et même des respirateurs. Cette auto-organisation a non seulement été d’un grand renfort mais a été plus rapide et efficace que les industries. Ces dernières se sont mêmes appuyées sur le travail de ces citoyens pour concevoir certains de ces produits. Si ces initiatives ne permettent pas de remplacer la chaîne de production classique, elle prouve néanmoins que la population participe bel et bien à l’effort “de guerre” et que celle-ci le fait sans la coordination ni l’aide des pouvoirs publics.

Il y a de quoi se sentir chatouillé quand on apprend que les masques seront rendus payants dans les grandes surfaces. C’est une question de santé nationale, il me paraît être de la mission de l’Etat que de pourvoir à ces besoins. D’autant que l’Etat a passé des commandes de masques avec de l’argent public. C’est dangereux, c’est hallucinant. Surtout quand on sait que ceux qui ont produit les masques en attendant n’ont pas été rémunérés. Pensez-donc aux inégalités quand on vend presque 1 euro le masque. Le masque est pourtant obligatoire dans certaines circonstances. Une boutique de couture de la Goutte d’Or s’était justement engagée à distribuer gratuitement des masques aux ménages précaires. Elle avait même fourni la municipalité et la police. Mais suscitant trop d’affluence, la police a préféré fermer la boutique. La priorité semble donc de faire respecter la distanciation sociale alors que les masques ne sont toujours pas disponibles gratuitement à tous comme ils le devraient. Et puis, n’y avait-il pas autre chose à faire pour que la distribution continue dans de meilleures conditions sanitaires ? 

Comprenez-bien que la rhétorique de l’effort collectif a une bien faible consistance face à de telles contradictions. On se sert la ceinture, on travaille bénévolement, on doit accepter des perspectives professionnelles incertaines, mais les grandes surfaces ne peuvent pas faire une croix sur des bénéfices, et l’Etat ne peut financer des masques qu’elle avait pourtant le devoir d’acheter. On perd un petit peu la notion de collectif là dedans.

 

C’est qui le patron (de couture) ? 

 

Tentons de remettre un peu en perspective la situation. Dans cette histoire il y a un désaccord profond sur la notion de travail. Cela n’a rien de nouveau, le travail est un concept clef pour définir les rapports économiques. Et à entendre Muriel Pénicaud nous le matraquer sur les ondes et dans la presse, il m’est bien clair qu’on touche à un point central. Pour schématiser grossièrement, il y a deux façon de le concevoir. 

  • La première façon, de l’école libérale, considère le travail comme une marchandise. Celui-ci dépend donc d’un marché de capitaux. 
  • La seconde, plus marxiste, définit le travail comme la source de la valeur économique. C’est le travail qui produit la richesse, les capitaux ne représentent que des moyens de productions. Et ceux-ci (infrastructure, machines, outil…) sont eux-même développés par la force de travail. 

 

Évidemment que ces deux visions, plutôt opposées sur l’échiquier politique, ne s’entendent pas sur la façon dont on devrait organiser le travail. Mais nous sommes dans une situation qui a tendance à montrer les insuffisances de cette première définition. Cette crise révèle le caractère essentiel de certains métiers, et relativise l’utilité sociale d’autres. 

Cela n’est pas sans nous rappeler l’expérience de pensée de Saint-Simon qui imagine que si l’on perdait subitement un nombre important des membres de notre élite politique, la société n’en souffrirait pas tandis que si l’on perdait le même nombre de travailleurs et des membres les plus éminents de chaque fonction sociale “la nation deviendrait un corps sans âme”. Nous n’avons, certes, pas vécu de telles pertes, mais nous avons pu voir que certaines tâches étaient moins nécessaires que nous l’imaginions, et que nous ne pouvions nous passer des métiers de la santé, de l’alimentation, de l’électricité… La version moderne de cet argument apparaît dans Bullshit Job de David Graeber. Pour lui il existe beaucoup trop de métiers inutiles, qui n’existent et ne se justifient que dans les spécificités du système économique actuel. La moitié des métiers pourraient disparaître sans avoir de graves conséquences sur le monde. « On pourrait probablement ramener la semaine de travail réel à quinze heures, ou même à douze, et personne n’y verrait que du feu » (p.108). Autrement dit, il y a une inadéquation entre la valeur sociale du travail et sa valeur marchande. L’hôpital public est un bon exemple d’un domaine qui a une faible valeur marchande mais qui a une très grande valeur sociale. Dans des situations comme celle-ci, nous voyons bien que définir la valeur du travail de cette manière a bien peu de sens. En revanche on comprend bien que c’est fondamentalement le travailleur qui porte l’économie, contrairement à une “élite oisive”, comme le disait Saint-Simon, qui capte et parasite cette richesse. Au delà de ces considérations marxistes un peu expéditives, nous devrions, à l’aune de cette épidémie, repenser notre système.

Sur le plan du travail, la leçon que nous offre Covid-19 devrait probablement porter sur la valeur sociale du travail. Cela signifie donc se concentrer sur le travailleur, et sur les besoins sociaux. Un truc du style : “on arrête tout et on réfléchit”. On arrête deux minutes les conneries avec la restriction des dépenses de santé et la réforme des retraites et on se demande ce qu’il faut à notre société pour qu’elle et ses habitants survivent. Et surtout, on protège les travailleurs. 

Mais on voit déjà les mauvaises habitudes revenir au galop. Ce sont les capitaux qu’il va falloir nourrir. Bien évidemment, on parle d’une bête affamée par deux mois de confinement. Une bête insatiable que l’on doit nourrir sans cesse de peur qu’elle nous morde si l’on ne continuait pas. Ce tyran velu ne nous apporte pourtant aucune satisfaction, aucune sécurité. N’est-il pas temps d’arrêter ces insanités ? Parfois je me dis que nos espoirs devraient porter sur des petits exemples qui nous laissent entrevoir un monde différent. Car l’épidémie a su me convaincre que les citoyens savaient oeuvrer et s’organiser seuls afin que la société continue à tourner. 

Le salarié bénévole ou le volontariat capitaliste. Il faudrait demander à Romain ce qu’il pense de ce concept. En tout cas le capitalisme ne cesse de se réinventer. Pour ceux qui pensent que cette crise changera notre système, ne sous-estimez pas sa résilience. 

A la prochaine quinzaine !

 

Sources :

  • https://www-mediapart.fr/journal/france/020420/masques-les-preuves-d-un-mensonge-d-etat?onglet=full
  • https://www.liberation.fr/france/2020/04/27/masques-comment-le-gouvernement-a-menti-pour-dissimuler-le-fiasco_1786585 
  • https://www.liberation.fr/france/2020/05/01/bas-les-masques-des-couturieres-professionnelles-ne-veulent-plus-travailler-gratuitement_1787048
  • https://www.20minutes.fr/societe/2768847-20200428-coronavirus-pourquoi-exige-travaille-gratuitement-interrogent-couturieres-professionnelles-sollicitees-fabriquer-masques
  • https://www.monde-diplomatique.fr/2020/05/HALIMI/61785
  • http://www.leparisien.fr/video/video-trop-de-monde-pour-des-masques-gratuits-a-la-goutte-d-or-la-police-ferme-la-boutique-09-05-2020-8313873.php
  • http://www.leparisien.fr/video/video-trop-de-monde-pour-des-masques-gratuits-a-la-goutte-d-or-la-police-ferme-la-boutique-09-05-2020-8313873.php
  • https://www-mediapart.fr/journal/france/170520/comment-recompenser-l-utilite-sociale-des-metiers

Bibliographie :

  • Comte de Saint-Simon. (1841). Oeuvres de Saint-Simon, Capelle, Paris, Orthographe modernisée.
  • Graeber, D., & Cerutti, A. (2018). Bullshit jobs. New York: Simon & Schuster.

 

Dessins par  l’auteur Tibovski 

20 mai 2020 0 commentaire
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ActualitéCarnet de voyageRomain Mailliu - 13 mois de volontariat en Indonésie

Le jeûne éternel

par Romain Mailliu 13 mai 2020
écrit par Romain Mailliu
Enfant dans les rues de Kampung Sawah (mars 2020) - © Romain Mailliu

 

À Kampung Sawah, le danger numéro un n’a pas changé et il est partagé par bonne partie de l’humanité. Le coronavirus ? Non. La baisse de l’immobilier ? Non. Un tweet borderline d’Elon Musk qui ferait chuter l’indice Tesla ? Non plus. C’est de ne rien avoir pour remplir son assiette.

La crise sanitaire mondiale menace Kampung Sawah, le bidonville indonésien de Romain. Suivez avec son carnet de bord l’impact du Coronavirus dans les quartiers les plus pauvres. [Chapitre 4]

 

Le jeûne éternel. Le 4 mai 2020

 Des enfants rient dans les rues. Le soleil se couche sur Kampung Sawah, bidonville du nord de Jakarta, situé entre une zone de dépôt de conteneurs et une pseudo-autoroute. Un bidonville est un quartier qui n’existe pas. Aucun des vingt mille habitants n’y a un quelconque droit de propriété. Ils se sont attribués cette espace, car il faut bien habiter quelque part. C’est une zone inondable, alors il arrive parfois que les nuits soient tristes et courtes. Mais le soleil finit toujours par sécher les larmes. Avec le temps, maintenant quarante ans, Kampung Sawah s’est fait un nom, et on a tracé ses frontières sur les cartes.

 Le pak RW, une bâtisse en béton situé dans l’angle du carrefour principal, fait office de mairie. C’est l’œil du gouvernement qui observe et documente les évolutions de cette ville qu’il faudra déconstruire un jour. Il y a déjà trois ans, quelques habitants, prophètes de l’apocalypse, criaient à qui voulait l’entendre qu’une avenue viendrait remplacer ce quartier marginal. Aujourd’hui, les fondations d’un pont se dessinent à l’horizon. Il doit relier le dépôt à l’autoroute. Le temps donne toujours raison aux prophètes. 

 

Kampung Sawah

Les conteneurs qui bordent Kampung Sawah (Avril 2020)  – © Romain Mailliu

 

Dans ce lieu coupé du monde, le coronavirus n’existe pas. C’est une légende qu’on voit passer sur les réseaux sociaux, comme les footballeurs qui collectionnent les voitures de sport ou les actrices qui défilent avec de luxueuses robes sur des tapis rouges. Pourtant, l’Indonésie est touchée – moins que nos pays occidentaux ce que je n’explique pas – et au 4 mai 2020, 12 071 cas ont été confirmés pour 872 décès. La population indonésienne réunit 267,7 millions d’habitants. Alors dans une économie au ralentie qui licencie à tour de bras sans compensation, le risque de mourir de faim est supérieur à celui d’attraper un Covid-19 virulent. 

À Kampung Sawah, le danger numéro un n’a pas changé et il est partagé par bonne partie de l’humanité. Le coronavirus ? Non. La baisse de l’immobilier ? Non. Un tweet borderline d’Elon Musk qui ferait chuter l’indice Tesla ? Non plus. C’est de ne rien avoir pour remplir son assiette. La famine. Catastrophe fatidique quand on ne gagne ou qu’on ne produit pas assez pour se nourrir. La bonne fortune n’est pas contagieuse.

L’Indonésie a fait le choix de ne pas mettre en place de quarantaine et cela a sans aucun doute limité la famine dans les quartiers les plus pauvres. Il n’y a pas de bonne pensée manichéenne.

 Alors je constate que porter un masque, rester chez soi, respecter les distances barrières, sont des comportements dérisoires pour les habitants de notre village clandestin. Pourtant, les campagnes de sensibilisation font rage et sur tous les supports. A-t-on trouvé une fin utile à l’utilisation des réseaux sociaux ? Peut-être, si nous mettons de côté les fakes news, toujours plus nombreuses, qui viennent noircir un tableau déjà ténébreux. 

Dans les ruelles, des « Corona » raisonnent, prononcées rapidement, dans un souffle, comme on dirait une vulgarité. Puis ce mot international, synonyme de danger, qui a le pouvoir d’unir les nations comme de les cloisonner, est toujours suivi d’un éclat de rire.  

 

Petite fille résidante à Kampung Sawah (Avril 2020)  - © Romain Mailliu

Petite fille résidante à Kampung Sawah (Avril 2020)  – © Romain Mailliu

 

Et le pouvoir législatif dans tout cela ? Respecter les règles sanitaires, c’est se donner les chances de maîtriser le virus rapidement, pour relancer l’économie, pour relancer la politique, pour la SURVIE de la nation ! Il me semble qu’un amendement a été mis en place obligeant le port du masque dans les rues mais, à Kampung Sawah, il y a plus de fantômes que d’agents en képi pour faire respecter les lois. Peut-être que la police souhaite éviter la situation embarrassante de verbaliser une mère qui n’a déjà pas assez d’argent pour nourrir ses enfants…

À quoi bon parler de SURVIE à des familles qui, depuis toujours, n’ont d’autre combat que de trouver de la nourriture et un toit pour vivre un jour de plus.

 Des enfants rient dans les rues. Le soleil se couche sur Kampung Sawah, bidonville du nord de Jakarta, situé entre une zone de dépôt de conteneurs et une pseudo-autoroute. Le ramadan y a débuté depuis plus d’une semaine et les inondations ont laissé place à une chaleur ardente et sèche. L’appel à la prière se prolonge nuit et jour, solennellement, comme les loups hurlent à la lune, comme les baleines chantent aux abîmes. Depuis mon arrivée il y a huit mois dans cette communauté exclue du monde – ou plutôt exclue d’un monde – je n’ai jamais vu autant d’enfants jouer ensembles. Les mosquées sont pleines et les sourires, qu’aucun masque ne vient effacer, se dessinent sur tous les visages. Les festins nocturnes perdurent et bien que le riz prenne de plus en plus de place dans l’assiette, les familles se réunissent pour célébrer ensemble la fin du jeûne.

 

L’amour d’une famille, le centre autour duquel tout gravite et tout brille.

Victor Hugo  ; Les chants du crépuscule, A mademoiselle Louise B. (1834).

 

Enfants dans les rues de Kampung Sawah (mars 2020)  - © Romain Mailliu

Enfants dans les rues de Kampung Sawah (mars 2020) – © Romain Mailliu

 

Découvrir le chapitre précédent : Another Sunny Day in Jakarta →

Photo de couverture : Enfant dans les rues de Kampung Sawah (mars 2020)  – © Romain Mailliu

13 mai 2020 1 commentaire
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ActualitéTibovski - Dessin de la quinzaine

Palestine revêt sa robe d’allégresse

par Tibovski 6 mai 2020
écrit par Tibovski
Palestine

 

Dernier dessin de confinement. 

Comme je le mentionnais dans mon précédent billet, il y aurait beaucoup à dire sur la crise actuelle. Ce sera pour une prochaine fois. Aujourd’hui, je me contenterai de partager une information qui a de l’importance à mes yeux. 

Fatou Bensouda, la procureure de la Cour Pénale Internationale (CPI) a remis ce 30 avril un rapport soutenant l’ouverture d’une enquête concernant des “crimes de guerre” israéliens. La Palestine pourrait donc, après confirmation d’une chambre préliminaire, poursuivre Israël à la fois pour “crime de guerre” et pour “crime contre l’humanité”. La CPI avait été saisie en 2015 et c’est seulement en décembre que celle-ci avait annoncé son intention d’ouvrir une enquête. Cette enquête pourrait donc reconnaître la culpabilité de Tsahal (armée israélienne) durant la guerre de Gaza en 2014. Mais ce dossier a une portée plus large sur la question palestinienne. 

 

Disproportion

La complexité des rapports israélo-arabes a tendance à gommer la disproportion entre les forces israéliennes et palestiniennes. Comme si cette complexité rendait impossible de se positionner parmi les deux camps sans compromettre la paix. Il est évident que des tensions aussi anciennes et diverses sont ardues à résoudre. Il est également évident que c’est en direction de la paix que ces résolutions doivent être menées. Seulement tout cela doit être entendu sans pour autant présumer que les deux belligérants sont égaux dans cette affaire. Rappelons que la Palestine se bat encore pour être reconnue comme un État, que certains de ses territoires sont sous contrôle israélien et que les conditions d’existence y sont accablantes. On ne peut décemment pas promouvoir la résolution d’un conflit sans comprendre qu’elle n’a pas la même signification pour les deux États. Même s’il serait malvenu de le comparer à David contre Goliath, les intifadas se sont pourtant faites avec des lance-pierre. Les forces sont inégales. Parler de Paix dans ce conflit doit concerner, dans un premier temps, la subsistance d’un peuple palestinien qui étouffe. 

 

Négociations

L’intervention de la CPI dépasse donc la seule affaire de 2014 et offre à une Palestine désarmée un nouveau levier. Bien que seul, dans la région, Israël bénéficie d’importants soutiens diplomatiques. Ses excellentes relations avec les États-Unis lui assurent une position diplomatique et militaire puissante au Moyen-Orient et dans le Monde. Ce n’est évidemment pas le cas de la Palestine, qui, même en ayant le soutien de certains pays arabes, peine à accéder à un statut officiel auprès des différents organismes de gouvernances internationales. Le Conseil de sécurité de l’ONU lui avait refusé le statut d’État membre en 2011 et lui a finalement accordé en 2012 le statut d’État observateur non-membre. C’est seulement en 2015 que la Palestine a eu le droit de dresser son drapeau au siège de l’ONU malgré la désapprobation marquée des États-Unis. L’adhésion de la Palestine à la CPI lui octroie donc une reconnaissance officielle de l’organisme. Diplomatiquement, le travail de la CPI est donc majeur pour les négociations. Cela signerait également l’intervention d’une institution externe et neutre sur la question palestinienne. Cela va sans dire que cette interposition n’est pas du goût des autorités israéliennes qui y voient une ingérence malvenue. Israël n’est pas signataire du Statut de Rome à l’origine de la Cour Pénale Internationale. Mais comme je l’ai déjà précisé les rapports entre Israël et la Palestine ne sont pas équilibrés, il n’y a donc rien de malheureux à ce qu’un organisme indépendant s’y immisce. Il n’y a rien d’étrange non plus à ce qu’Israël y soit défavorable. 

 

Identité

Pour conclure, je dirais que le climat de la région a construit des positions politiques belliqueuses dans les deux camps. Or on pourrait entrevoir, dans cette affaire, l’espoir d’une évolution. Actuellement, le premier ministre conservateur Benjamin Netanyahou (a.k.a “Bibi”) peine à constituer un gouvernement israélien. Le pays a déjà connu trois élections depuis mars 2019 en raison de ces instabilités. Enfin, il y aussi le fait que Bibi soit dans l’attente d’un procès pour fraude et corruption. Si les élections législatives montrent que le conservatisme hégémoniste est encore fort en Israël, la crise politique actuelle pourrait marquer un tournant en mettant fin à plus de 10 ans de mandat pour Netanyahou. Ces décennies d’ultra-conservatisme israélien ont renforcé les courants nationalistes et militaristes en Palestine. C’est le cas du Hamas. Mais au risque de me répéter, ces courants politiques factieux ont évolué en Palestine pour des raisons différentes qu’en Israël. Elles sont une réponse à la crise humanitaire et à la menace constante. Le terrorisme et le nationalisme sont ici des voies politiques de survie. L’identité de ce peuple est une identité broyée définie au travers d’une longue et douloureuse oppression. Porter ses causes devant la Cour Pénale Internationale ouvre un nouveau canal pour mener les combats. Espérons que si cette voie prospère, les négociations se dérouleront sans feu ni sang. Mahmoud Darwich, un des plus grands poètes palestiniens, résumait l’identité de son peuple mieux que moi : 

 

Celui qui m’a changé en exilé m’a changé en bombe… Palestine est devenue mille corps mouvants sillonnant les rues du monde, chantant le chant de la mort, car le nouveau Christ, descendu de sa croix, porta bâton et sortit de Palestine”  

 

À la prochaine quinzaine !

 

Sources :

  • https://www.humanite.fr/historique-la-palestine-autorisee-poursuivre-israel-pour-crimes-de-guerre-et-crimes-contre-lhumanite?fbclid=IwAR3S7pnZnCFNgExkEWfCN0NQ6yxHrQaqoiOaccQO7ttxwOUaZ0idvwRWUFI 
  • https://www.lemonde.fr/international/article/2019/12/20/la-cpi-veut-enqueter-sur-d-eventuels-crimes-de-guerre-dans-les-territoires-palestiniens_6023652_3210.html
  • https://www.ouest-france.fr/monde/israel/israel-l-accord-de-gouvernement-entre-netanyahu-et-gantz-entre-les-mains-de-la-cour-supreme-6824969
  • https://www.haaretz.com/israel-news/elections/.premium-likud-and-kahol-lavan-shorten-freeze-on-appointments-after-high-court-hearing-1.8822047
  • https://edition.cnn.com/2015/09/30/world/united-nations-palestinian-flag/index.html
  • https://www.haaretz.com/israel-news/.premium-netanyahu-s-real-target-this-week-isn-t-the-high-court-but-it-is-a-judge-1.8822361

Photo de couverture par l’auteur Tibovski 

6 mai 2020 0 commentaire
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ActualitéCarnet de voyageRomain Mailliu - 13 mois de volontariat en Indonésie

Another Sunny Day in Jakarta

par Romain Mailliu 29 avril 2020
écrit par Romain Mailliu
Jeune LP4Y

Les jeunes ont cette faculté – sagesse ? – de nous ramener à des problématiques plus pragmatiques.

La crise sanitaire mondiale menace Kampung Sawah, le bidonville indonésien de Romain. Suivez avec son carnet de bord l’impact du Coronavirus dans les quartiers les plus pauvres. [Chapitre 3]

 

Another Sunny Day. Le 12 avril 2020

 Pas de réveil programmé ce dimanche matin. C’est peu habituel car les premières heures du jour sont pour moi les plus belles. Pas question de les manquer. Quand la ville se met en route, pas à pas. Que les visages endormis s’offrent aux premiers rayons de soleil. Seuls les oiseaux chantent, et c’est assez. La température est agréable : 22 C° et un courant d’air marin vient caresser ma peau qui frissonne de plaisir.  

Mes yeux s’ouvrent naturellement à 8h30. C’est suffisamment tôt pour décréter que la journée reste exploitable. Je casse deux œufs dans une poêle. Jean-Marc, ou plutôt John – les Asiatiques n’arrivent pas à articuler et retenir son prénom administratif – frictionne nerveusement la pâte à pain faite aux premières lueurs du jour. 

« Ce matin, j’ai reçu une photo d’une jeune des Philippines. Une cuillère remplie d’une eau blanchâtre. C’est l’eau salée dans laquelle elle fait cuire le riz. Il ne lui reste plus que ça pour nourrir son bébé. Elle a vingt-deux ans et trois enfants. Son aîné a sept ans… Avec le confinement, elle n’arrive pas à quitter son bidonville pour rejoindre notre centre. L’équipe de Manille est sur le coup, nous allons trouver une solution. »

La misère ne prend pas de week-ends. Des réveils comme celui-ci, John doit en connaître plusieurs fois par an. Depuis 10 ans, son ONG LP4Y a accompagné 2 662 jeunes vers le monde professionnel décent. Pourtant, aujourd’hui la situation est exceptionnelle. Les Jeunes et leur famille sont les plus affectés par les conséquences de cette crise sanitaire et économique mondiale. Et derrière ces chiffres il y a des visages, des noms, et des messages qui exhument le poids de nos responsabilités.

 

LP4Y

L’équipe de Source Of Life, notre programme de vente d’eau potable (Janvier 2020) –
© Romain Mailliu

 

« Être adulte, c’est être seul », disait Jean Rostand. Au contraire, je pense qu’être adulte c’est prendre conscience de l’importance des autres. L’idée n’est pas toujours séduisante. Elle a même terrifié Jean-Paul Sartre avec sa célèbre phrase : « L’enfer, c’est les autres ». Il ajoute dans son essai l’Être et le Néant : « S’il y a un Autre, quel qu’il soit, où qu’il soit, quels que soient ses rapports avec moi… J’ai un dehors, j’ai une nature ; ma chute originelle c’est l’existence de l’autre ». Conclusion : Nous prenons conscience de la triste existence qui sera la nôtre quand nous découvrons que nous ne sommes pas seuls sur terre. C’est ça, l’âge adulte. Il va falloir apprendre à vivre ensemble : quel enfer ! Quand on observe les inégalités qui sont les mêmes partout dans le monde, on devine que nous n’avons pas tous adopté les mêmes règles de jeu. 

L’étudiant assidu que vous étiez en terminale – second rang : place idéale pour suivre la prestation de votre professeur de philosophie dépressif tout en évitant les postillons propulsés par l’effluve de son haleine caféine Marlboro – ajouterait que la liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres #Rousseau.  Décidément, pas facile de vivre ensemble.

 Pourtant, soyons honnêtes, les meilleurs moments que nous vivons sont ceux que nous partageons avec les autres. N’allez pas me dire que vous avez vécu l’extase un mercredi soir devant une série B avec votre Heineken dans la main droite et votre ordinateur portable Lenovo – PowerPoint ouvert sur la dernière slide de votre Comex du lendemain – dans la main gauche.

On peut connaître certains moments d’émerveillement seul : lors d’une balade matinale un dimanche matin à travers le marché Boulevard Vincent Auriol, en découvrant un nouveau clip de PLN le vendredi soir… Mais la joie ?  

je fixe mon ordinateur, le regard vide, mon reflet apparaît à l’écran. La matinée est déjà bien avancée. Excepté l’écriture de mes états d’âme et l’écoute léonine du nouvel album des Strokes, je n’ai pas fait grand-chose. À ma gauche Fanette somnole sur la terrasse, à ma droite la panthère des neiges de Tesson bronze au soleil. La brise gonfle notre hamac qui prend l’allure d’un spi et je me surprends à rêver de croisières en voilier dans le Golfe du Morbihan. Fin de l’album des Strokes, Spotify déclenche la lecture aléatoire : Belle & Sebastien – Another Sunny Day. 

 

LP4Y

Vue de notre terrasse au lever du soleil – © Romain Mailliu

 

La route du succès est semée d’embûches. 15 avril 2020 

« Je vais rentrer en France. C’est terminé : j’arrête ma mission »

 Mardi, 10h23. J’ai l’impression que mon cerveau me rejoue une mauvaise scène. Pourtant, la semaine commençait bien. Un nouveau planning pour les jeunes, des mesures sanitaires plus crédibles du gouverneur de Jakarta, deux nouveaux commentaires sur mon précédent article et un demi-fruit de la passion dans le réfrigérateur. Seulement, le frisson dans mon dos déclenché par cette réplique sortie de nulle part me rappelle une baignade sous la pluie grasse d’Écosse – le long du West Highland Way après 35 kilomètres dilués aux singles malt – il y a de cela trois ans déjà.

Je n’ai jamais réussi à retenir plus de trente mots d’indonésien (bahasa) et pourtant ma cervelle me rappelle, avec une précision mesquine, mes barbotages dans les rivières caillouteuses quand Inès nous remet sa démission.

 

West Highland Way (Août 2016) - © Romain Mailliu

West Highland Way (Août 2016) – © Romain Mailliu

 

Grand silence. Inès. La plus solide des guerrières. Depuis qu’elle nous a rejoints avec John, elle n’a jamais décroché de son ordinateur. Vidéo Call avec les USA, tableau Excel pour évaluer les besoins des jeunes pendant la crise, WhatsApp pour répondre aux équipes d’Asie : une productivité à faire pâlir David Allen. Et pourtant, la voilà qui quitte le navire. Bordel. Depuis deux ans chez LP4Y, elle venait de commencer sa nouvelle mission. Coup dur pour LP4Y, coup dur pour notre nouvelle colocation, coup dur pour John. La vie n’est-elle donc qu’une mauvaise blague ? Je vais acheter des bières. Tous les discours du monde ne valent pas une pinte de houblon fraîche vers 19h, quand les obligations professionnelles laissent place au chant du muezzin. Inès. Je n’en reviens pas. Certes, elle avait montré quelques signes de fatigue mais j’étais loin de m’imaginer le dilemme qui devait se jouer dans sa tête. Entre deux lignes, il faut se rendre à l’évidence : ne perdons pas notre temps à imaginer ce qui se passe dans la tête des autres. C’est peine perdue. Concentrons-nous sur les méandres de nos âmes respectives, cela devrait suffire pour une vie ou deux.

Pourtant, après le départ de Sarah et l’arrivée de Inès et John, notre collocation avait pris un sens esthétique et culinaire plaisant. Avec l’aide d’un bocal de champignons caché dans le double fond de sa valise, John nous a cuisiné pour Pâques un poulet aux morilles. Bricoleur appliqué, il a construit avec quatres planches de bois et tout autant de clous deux étagères Philippe Starck. Il a également installé des guirlandes lumineuses sur la terrasse et bien qu’étant végétarien à mi-temps, m’a chargé d’acheter trois kilogrammes de rumsteck. Certains personnages dégagent une énergie similaire à deux noyaux atomiques qui s’assemblent. John en fait partie. Inès. Merde. Nous avions même commencé à discuter de rap français.

 

Photo de campagne pour notre levée de fond pour les jeunes  que nous accompagnons via un challenge de 24H de méditation (Avril 2020) - © Romain Mailliu

Photo de campagne pour notre levée de fond pour les jeunes  que nous accompagnons via un challenge de 24H de méditation (Avril 2020) – © Romain Mailliu

 

“Coach, can I have money to buy Gasoliiiiiiine ?”

Les jeunes ont cette faculté – sagesse ? – de nous ramener à des problématiques plus pragmatiques. Ce matin, ils sont cinq à assurer la livraison d’eau potable. Cinq, car c’est le nombre maximum autorisé par le gouvernement. David Allen aurait certainement complété en expliquant qu’un homme efficace en vaut cinq. Je rajouterais que cinq hommes non efficaces n’en valent pas beaucoup plus. Si ce matin la motivation des jeunes était un rayon de soleil, le risque d’attraper une insolation serait dérisoire.

Il faut dire qu’à leur âge, dix-huit ans en moyenne, j’étais plus appliqué dans l’étude subtile du mécanisme diablement ingénieux des épingles de soutien-gorges plutôt que par l’idée d’obtenir un travail décent pour nourrir ma famille. Si on ajoute à cela les écoles fermées et la dysphorie générale autour du coronavirus, je comprends pourquoi le lundi matin les chaussures des jeunes poncent le carrelage de la salle de production. Pourtant – et Inès aurait été d’accord – il n’est pas question de ralentir l’activité.

Dans le monde professionnel qui les attend, ils ne feront pas office de cas à part :  les attentes seront les mêmes pour tous. Les diplômés de l’université issue des classes sociales aisées comme nos entrepreneurs des quartiers plus modestes. Ils ne seront pas pris en pitié car ils doivent faire deux heures de route dans les transports en commun pour venir travailler. Ni parce qu’ils n’ont qu’une paire de chaussures « professionnelles ». Seules la qualité du travail, la posture et la motivation feront la différence. La route du succès est semée d’embûches. Depuis toujours, nos jeunes entrepreneurs affrontent les difficultés avec un courage, un positivisme et une détermination qui à mes yeux est inexplicable. C’est leur plus grande force et c’est pour cela qu’ils y arriveront. Encore. Toujours. 

 

Dani et Angel en livraison (28/11/19)  - © Romain Mailliu

Dani et Angel en livraison (28/11/19)  – © Romain Mailliu

 

Découvrir le chapitre précédent : Une mer calme n’a jamais fait un bon marin →

 

Photo de couverture : Kusniawaty, jeune femme du programme en management step (Avril  2020) – © Romain Mailliu

29 avril 2020 8 commentaires
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ActualitéCarnet de voyageTribune

Azerbaïdjan : à l’assaut du Caucase !

par Guillaume Godest 24 avril 2020
écrit par Guillaume Godest
Les champs de pétrole de Neft Daşları : première exploitation offshore de l’histoire (photo Wikimedia)

 

Il y a fort à parier que vous n’avez pas la moindre idée de ce que c’est que l’Azerbaïdjan, que de toute façon vous n’y mettrez jamais les pieds, et que personne ne vous en parlera. Pourtant le Caucase, composé d’une mosaïque d’ethnies qui se sont entre-égorgées pendant des millénaires, et ancien Eldorado du pétrole, a tout pour nourrir vos rêveries.

Logé aux confins des Empires perse, romain, byzantin, ottoman et russe, envahi par les Scythes, les Cimmériens, les Arabes et les Mongols, l’Azerbaïdjan s’est toujours retrouvé pris en étaux entre les puissants, tantôt conquis, puis dégorgé, soumis, révolutionnaire, nationaliste enfin. Aujourd’hui, ce sont les États-Unis, la Russie et la Chine qui se disputent l’Asie centrale, et font du Caucase et de la Caspienne “l’échiquier sur lequel se joue un jeu pour l’hégémonie mondiale“ (Lord Curzon). 

Je voulais poser le pied sur cette terre de toutes les convoitises, humer les odeurs de naphte, sentir qu’ici l’histoire continuait de s’écrire, fuir Paris, ses Lime, sa post-Histoire. Je me suis installé à Bakou pour six mois.

 

Vue de Baku

Vue de Baku

 

Une ville sur le trottoir

 J’en avais assez d’être enfermé, alors je suis sorti de chez moi pour aller voir la mer. Dix minutes à peine et je suis sur le « Boulevard », sorte de promenade des Anglais où le petit peuple de Bakou vient parader les fins de semaine. Je passe plusieurs heures par jour à éplucher la presse nationale, docilement tenue sous la férule du gouvernement. C’est quotidiennement la même rengaine : culte rendu au président Aliyev, démonstration que l’Arménien est fait avec la pire fange de l’humanité, cours du Brent. L’Azerbaïdjan d’aujourd’hui se trouve tout entier dans ce triptyque. L’essence de la capitale, elle, sur le Boulevard.

 Un échiquier en plastique géant, et vingt vieillards autour qui s’écharpent sur le coup à jouer pour faire mat. Bras dessus, bras dessous, à la turque, les hommes discutent de vétilles. Les femmes surmaquillées viennent éprouver le fond de teint bon marché qui leur coule sur les joues. Assis sur les bancs, les adolescents timides regardent les filles passer, et des fossettes aux cheveux, celles-ci rougissent, terriblement gênées, quand elles s’aperçoivent que je les observe. Un chien errant hésite à s’aventurer sur les pavés. À quelques mètres, une bande de bimbos adossées à la balustrade montrent leurs jambes au soleil et aux passants. Vous auriez tort de leur prêter des pensées impures : le pays fut le premier État laïque du monde musulman et les cheveux des femmes volent libres dans les bises de la « cité des vents », mais les vieilles traditions archaïques et paternalistes n’en règlent pas moins la vie de la jeunesse : une fille qui ne se marie pas vierge est un déshonneur pour sa famille.

 Les voiles et les qamis signalent les touristes arabes ou iraniens. On parle russe, aussi. Longtemps république soviétique, l’Azerbaïdjan l’utilise encore suffisamment pour que le doute s’installe : Russe ou Bakinois ?

 Toute la ville vient transpirer son insouciance sur quatre kilomètres à peine. Le cuir noir de leurs chaussures est impeccablement ciré, et sous leurs casquettes de fourrure, s’assurant que l’air de liberté qui circule ne donne pas de mauvaises idées à la foule, les officiers de police semblent des bergers dont les bâtons sont des matraques. J’en croise par groupe de trois ou quatre ; d’autres veillent en voiturette. On les oublie, leur présence ne pèse pas, pourtant je sais qu’ils sont rôdés à l’art d’écraser leur arme sur les têtes un peu trop insoumises : Ilham Aliyev, fils d’Heydar Aliyev, son prédécesseur qui fit ses classes au KGB et qui lui a légué la présidence du pays, dirige un État policier aux prisons pleines d’opposants politiques.

 

Ilham Aliyev fête sa “réélection” en 2018 avec 86% des voix  (photo Wikimedia)

Ilham Aliyev fête sa “réélection” en 2018 avec 86% des voix  (photo Wikimedia)

 

De l’or au fond de la mer

 L’air du large est chargé d’effluves de pétrole. Là-bas, les plateformes offshore tirent des profondeurs de la Caspienne la précieuse huile noire qui alimente l’Europe et la Turquie. À la surface de l’eau, un reflet m’attire l’œil ; une longue écharpe visqueuse et foncée chatoie : ce sera quelque fuite d’une exploitation. Au milieu des mégots, les bouteilles en plastique que le calme flot balance à peine achèvent de me décourager de me baigner dans cette mer qu’on semble avoir pris pour une déchetterie. La tête ailleurs, je fixe les eaux en pensant aux temps romantiques où le cosaque Stenka Razine pillait les côtes des environs. Fini aussi la pêche à l’esturgeon ! les pollutions de l’ère soviétique puis le braconnage ont eu raison du poisson et de ses œufs qui faisaient la richesse de la région. Un autre or noir a pris la place du caviar : plus de pêcheurs, ici les seuls navires que l’on distingue sur la ligne d’horizon sont des tankers géants. Cette mer a l’allure d’un lac immobile ; on la croirait déprimée, sans doute d’avoir bu trop de sang et de mazout.

 Son abattement me gagne. J’arrive sur Azneft Meydani, place Socar, du nom du groupe pétrolier national. Les hydrocarbures sont l’alpha et l’oméga du pays et tout vous le rappelle. Je fais souvent ce cauchemar : seul au milieu d’un champ de derricks qui s’étend à l’infini, je patauge dans un épais liquide visqueux, quand se lève devant moi un immense monstre noir qui grandit en buvant tout ce qui l’entoure, et m’aspire à lui. Pour respirer, je décide d’aller me perdre dans les ruelles de la Vieille ville, enfermée dans son enceinte crénelée construite avant l’ère du pétrole.

 

Les champs de pétrole de Neft Daşları : première exploitation offshore de l’histoire (photo Wikimedia)

Les champs de pétrole de Neft Daşları : première exploitation offshore de l’histoire (photo Wikimedia)

 

Peut-on fuir le pétrole ?

 Impossible d’y couper, car d’autres monstres gardent la ville. Les Flame Towers, ces trois tours de verre figurant des flammes de 200 mètres, sont recouvertes de milliers de LED qui enflamment leurs façades ou les animent aux couleurs du drapeau national. Peu après l’indépendance succédant à l’effondrement de l’Union soviétique, Heydar Aliyev accorda l’exploitation des champs pétroliers azéris à onze compagnies internationales ; le pays se réserva 80% des bénéfices : c’est le « contrat du siècle ». Dans les années 2000, l’euphorie est totale : le pays croule sous des dollars qu’il n’arrive plus à dépenser. Ces tours, comme tous les gratte-ciel qui sortirent alors de terre, sont les témoins de cette époque où Bakou redevenait l’Eldorado pétrolier qu’elle était un siècle plus tôt.

 M’abrutir dans un bar est la dernière option qu’il me reste. Dans celui où j’échoue, une poignée de gros Anglais discutent avec des Azerbaïdjanaises dont les yeux brillent quand elles songent aux portefeuilles des ingénieurs de BP. Celles qui parlent anglais peuvent se faire quelques manats. L’ambiance est coloniale. Je me terre dans un coin et fait mine de griffonner dans mon carnet pour qu’on m’oublie. Une jeune Azérie passe sans cesse devant moi, ondoyant des hanches avec la lascivité d’une petite prostituée rompue à l’exercice. Lentement, muette, sans même me regarder, elle vient par deux fois remplir mon verre en glissant son bras au-dessus de mon épaule, me frôlant presque avec le mouvement coulé d’une couleuvre. De guerre lasse, elle finit par tenter une manœuvre de front : « Do you want to play billiard ? » Je décline. Elle s’en retourne au comptoir sans cacher son agacement : bredouille.

 

 Statue du poète Mirza Alakbar Sabir devant les remparts de la Vieille ville

Statue du poète Mirza Alakbar Sabir devant les remparts de la Vieille ville

 

« C’est ça l’Azerbaïdjan ! »

Je rentre par le quartier Kubinka, dont les taudis devraient être rasés pour faire la place à un complexe résidentiel flambant neuf. J’aime ces minuscules maisons à un ou deux étages qui tiennent encore debout grâce aux prodiges d’ingéniosité des habitants. Devant, de vieilles Lada Jigouli de la période soviétique, de petits vieillards décrépits qui jouent inlassablement aux dés en sirotant du thé noir. Le linge sèche sur des fils tendus au-dessus de la tête. Dans certaines ruelles, des dizaines de jeunes hommes nettoient les voitures des beaux quartiers pour une poignée de manats. Un peu plus loin, une grosse Mercedes se gare à côté d’une Chevrolet dernier cri. Sanglé dans son costume cintré, l’homme qui en sort s’engouffre dans une bicoque qui n’a même plus de fenêtre. Bien qu’ils se soient enrichis, certains habitants demeurent encore ici : ils espèrent que les autorités les délogeront bientôt pour leur offrir un bel appartement dans les futurs immeubles. Ils ont la patience du pays.

 Pour ouvrir la porte de mon studio je suis forcé de me faufiler entre le mur et la machine à laver que le plombier doit m’installer. Il vient plusieurs fois par semaine ; il se frotte le menton et réfléchit longuement en considérant le gros carton. « Je reviendrai plutôt demain… ou après-demain ». Cela fait près de deux mois que ça dure, et je lave toujours mes caleçons dans l’évier. Comme dit un expatrié français que je fréquente, il ne faut pas chercher à comprendre, car « c’est ça l’Azerbaïdjan ! »

 

Rue de Kubinka, vidée par le coronavirus

Rue de Kubinka, vidée par le coronavirus

 

Guillaume Godest 

 

Photo de couverture : Les champs de pétrole de Neft Daşları : première exploitation offshore de l’histoire (photo Wikimedia)

24 avril 2020 2 commentaires
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ActualitéTibovski - Dessin de la quinzaine

Tends l’autre joue…

par Tibovski 22 avril 2020
écrit par Tibovski
Tends l'autre joue...

Rien de bien précis aujourd’hui. Vous n’aurez pas le droit à mon indignation habituelle.Seulement une pensée, un brin poétique, je l’espère.

Pour ne pas vous décevoir, dès la publication de mon dernier dessin, je me suis mis en quête d’un nouveau sujet. Ma première frustration a été de constater que de trop nombreux candidats s’offraient à moi : Le tragicomique du procès de Trump contre l’OMS, le traitement des africains en Chine, l’incendie à Tchernobyl, les restrictions en Pologne sur les droits à l’avortement et l’éducation sexuelle, la recrudescence des violences policières dans les quartiers populaires. Tous des bons sujets auxquels, au demeurant, je n’aurais pu apporter la moindre touche personnelle. Ma seconde frustration n’a d’autre origine que le Covid-19. Toutes ces actualités  sont liées au coronavirus, alors que j’avais promis de ne pas en parler. L’échec de mes précédentes tentatives m’avait déjà fait déchanter. Comment se résigner à éviter un sujet omniprésent ? 

Ce long et pénible travail d’investigation m’a inspiré la réflexion suivante. La pandémie que nous vivons imprime de si profonds changements dans les affaires humaines que celle-ci se trouve mêlée à presque tous les évènements. Même ceux accidentels comme l’incendie de Tchernobyl. Prenons donc de la hauteur sur ces diverses thématiques, pour nous plonger dans le coeur de la question. Si je ne suis pas parvenu à éviter le sujet du coronavirus autant en parler franchement. 

La pandémie perturbe le fonctionnement usuel de nos sociétés. Ce qui profite à certains décideurs, et ce qui aggrave certaines situations. Souvenez-vous, par exemple, de l’invasion de criquets dont nous avions parlé dans un  précédent billet. Comment aurions-nous pu éviter le sujet de l’épidémie ? Une catastrophe comme celle-ci prend une tournure plus dramatique dans un contexte de crise sanitaire. Cette période marque une vulnérabilité profonde nous rendant à la merci de tous les vents. Tout événement se trouve inévitablement lié au coronavirus, puisque c’est celui-ci qui dictera son dénouement. Il n’y a rien à faire, c’est notre trame de fond d’aujourd’hui. Et demain, les historiens ne pourront échapper au contexte de pandémie pour lire ce qui a pu se dérouler pendant ces quelques mois. Reste que notre monde est fébrile et que le moindre malheur supplémentaire passerait pour un coup du sort, pour une seconde gifle… 

A la prochaine quinzaine !

Tends la joue

 

Dessins réalisés par l’auteur Tibovski. 

22 avril 2020 0 commentaire
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ActualitéArtBaudouin Duchange - Chroniques

Johnny, reviens nous sauver !

par Baudouin Duchange 17 avril 2020
écrit par Baudouin Duchange
Johnny Ha

 

« Ça n’était pas dans mes habitudes

De supporter cette solitude

Mais on se fait à tout

Il faut bien, sinon on devient fou »

 

Comme toujours dans les moments difficiles, je reviens au fondement de mon identité : Johnny. Chanson : C’est pas facile. Album : Pas facile. Date de sortie : 1981. Un ensemble de titres sombres en réponse à sa séparation avec Sylvie Vartan l’année précédente. En France, Johnny chante la solitude mieux que personne. Le remède parfait pour supporter ce confinement ?

Pas tout à fait. Car, en tant que lecteur de BSFmagazine et très certainement adepte de la BSFattitude, comment accepter cet immobilisme forcé ? Comment vivre une aventure enfermé avec notre solitude ?

 

 

Confinement n’est pas solitude

L’ennuyeux janséniste Pascal a eu la chouette idée d’avoir une pensée aujourd’hui bien connue : « tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne pas savoir demeurer en repos dans une chambre ». Le XVIIème siècle du philosophe avait sûrement son lot de distractions pour détourner l’humain des sujets existentiels. Que dire du XXIème siècle ? Internet multiplie les amusements même au plus profond de notre confinement. Y a-t-il réelle solitude lorsque que les propositions d’apéro-Skype se multiplient ? Non. C’est un sentiment de solitude, ce qui n’est pas pareil. Du fin fond de leurs cabanes, coupés du monde, le misanthrope Salinger ou le transcendantaliste individualiste Thoreau auraient bien ri de notre confinement connecté. Pour nous, simples citadins mortels, vient pourtant un temps où il faut éteindre son portable, se préparer à dormir et se retrouver, réellement, seul. 

« La nuit, chacun doit soutenir la réalité sans aucune aide ».  Cette belle phrase de l’anthropologue américain Loren Eiseley, citée par Jim Harrison dans La route du retour, est celle à laquelle je pense, souvent, avant d’éteindre la lumière. Certainement pas la promesse de rêves fleuris, mais une proposition : affronter ce que nous fuyons au quotidien. 

Les propositions sociales sont infinies dans une ville comme Paris. Comme beaucoup, je les considère comme nécessaires pour me construire ; pour me confronter au réel. Quelle hypocrisie ! Ce que je cherche, au fond, c’est la nouveauté, le divertissement et la surprise. Et les trois ont comme point commun d’être bien futiles en général, et inutiles en ces temps d’isolement… La réalité, ce sont les questions que nous laissons en suspens et qui reprennent l’assaut lorsque l’on se retrouve définitivement seul. Ces interrogations existentielles reviennent inlassablement chaque soir. Ce n’est pas un hasard si l’alcoolique bambocheur Hemingway écrivait dans L’adieu aux armes que ses sentiments religieux ne survenaient que la nuit.
La nouveauté qu’on cherche à provoquer dans le tumulte de nos relations sociales est aujourd’hui mise à l’arrêt avec le confinement. Il est l’heure de se confronter à la réalité !

 

« Si aujourd’hui, je ne crie plus

C’est qu’une autre a pris le dessus

Elle parle peu, elle parle bas

La solitude brise ma voix

L’écho de ma vie me fait peur »

Quelques cris, Johnny Hallyday

 

 

Seul sur terre 

Thoreau disait dans Walden ou la vie dans les bois qu’un « homme est riche de tout ce dont il peut se passer ». Si la citation est facile, l’appliquer l’est beaucoup moins ! Pourquoi supprimer l’inutile du quotidien ? Jul vous répondrait « Moins de problèmes égale moins d’anxiété ». Je ne lui donne pas tord !

Qu’est-ce qui est inutile ? Tout ce qui ne nous permet pas de nous accomplir. Tout ce qui nous rend mentalement léthargique, humainement sédentaire. Extrait d’Au revoir et Merci de Jean d’Omersson : « Il n’y avait qu’une chose solide et certaine : c’était cette vie. Tout le reste était brouillard. J’aimais beaucoup la vie. Elle ne m’avait pas seulement été facile et douce, il me semblait aussi, parfois, qu’elle m’avait fait des promesses. Quand je me promenais dans les layons de forêt, plus tard, après avoir passé la nuit à faire semblant de m’amuser, la même impatience inquiète me frappait brutalement. Je m’arrêtais. Ce qui faisait battre le coeur, c’étaient les grandes espérances ». La vraie aventure offerte par ce confinement n’est pas dans les forêts boisées, les rivières chantantes ou les sommets invaincus. Ce n’est pas non plus braver les interdictions sanitaires, ni diffuser les messages « stay home » sur Instagram ou encore d’insulter le gouvernement. La vraie aventure est solitaire. Elle se fait seul dans nos chambres aujourd’hui, mais se poursuivra jusqu’à notre dernier souffle. Elle est cette quête de liberté vers laquelle nous tendons tous, d’une manière ou d’une autre. Elle est nos grandes espérances, c’est à dire le chemin que nous choisissons pour nous accomplir. Seule une solitude acceptée peut nous montrer la vocation que nous cherchons.

Pourquoi ? Philosophie de bistrot, aide moi ! Socrate et Gaspard, le gars qui se gratte le coude au comptoir du café en bas de chez moi, vous diront la même chose : la conscience est ce qui sépare l’Homme et le chien. Elle est également ce qui nous fait réaliser de notre solitude. Quand survient-elle ? Lorsque nous nous ennuyons ! Laurent Lafitte considérait récemment dans un podcast que « l’ennui est l’ennemi ultime ». C’est exactement l’inverse ! Ennuyez-vous chers lecteurs de BSFmagazine, c’est peut-être encore la seule chose gratuite aujourd’hui. C’est une ressource précieuse qui permet d’embrayer l’imagination, de faire tourner les rêves et d’avancer les projets de vie. L’ennui et la solitude sont les conditions sinequanone à l’accomplissement de soi. « Ma vie est usée. Allons ! Feignons, fainéantons, ô pitié ! Et nous existerons en nous amusant, en rêvant amours monstres et univers fantastiques » (L’éclair, Une saison en enfer). Résolution post-coronavirus : suivre Rimbaud. 

 

 

Conclusion 

Pour survivre à la crise sanitaire actuelle, le président biélorusse Alexandre Loukachenko préconise, entre autre, d’utiliser la vodka pour se désinfecter la gorge et les mains. C’est une possibilité !

L’autre voie que nous avons étudié ensemble aujourd’hui est celle de l’ennui et de la solitude pour faire le tri dans notre quotidien. Chose que Johnny préconisait déjà le siècle dernier lorsqu’il s’écriait :  « Qu’on m’enlève ce qui est vain et secondaire / que je retrouve le prix de la vie enfin » !

 

Photo de couverture : Johnny Hallyday, capture d’écran du clip Que je t’aime (Johnny Hallyday Officiel) 

17 avril 2020 3 commentaires
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Diam Welly est un village où régnaient la paix et l'harmonie. La communauté des Peulhs vivait avec celle des Mandingues sans distinction. La joie de vivre y avait élu domicile ; les hommes et femmes étant en communion. Karamokho, un homme de valeur et bien respecté au village, y vivait avec son épouse Coumba, une femme vertueuse que tous les hommes auraient aimé avoir dans leur concession. La tradition avait réussi à construire une société juste, faite de solidarité, d'amour et d'entraide.
Cependant, la modernité — ou selon les mots de l'auteur, le Nouveau Monde — ne laissera pas Diam Welly indemne puisqu'elle le fera résolument s'engager dans une nouvelle ère de mutations affectant les moeurs, la moralité, les codes et conduites favorisant, ipso facto, l'émergence d'individus — comme Sellou, faisant la cour à l'épouse de Karamokho alors absent — gouvernés par la satisfaction de leur plaisir et de leurs intérêts personnels.
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Kol Ukok, Kirghizistan, 2015.
Traditionnellement, la yourte est ouverte vers le sud par une entrée unique. A l'intérieure, l’espace est quadrillé selon un usage précis. Le sud et l’est de la yourte sont l’espace de la femme où se trouvent le foyer et la place de travail. L’espace de l’ouest est réservé à l’homme et aux invités. Cette photo est révélatrice : dirigée vers le sud, c’est la femme qui se dévoile, à sa place comme l’admet la tradition
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Le comédien ET metteur en scène Michaël Benoit Delfini
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[CULTURE] - Déjà entendu parler des Bullshit j [CULTURE] - Déjà entendu parler des Bullshit jobs ? On doit l’expression à feu David Graeber 🔥
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Anthropologue ayant réhabilité l’anarchie ♾ Figure du mouvement Occupy Wall Street ♾ Ecrivain multi-récidiviste ♾ Les Sex Pistols n’ont qu’à bien se tenir ! 
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Dessin + article par l’audacieux @tibovski ✏️
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