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Tibovski – Dessin de la quinzaine

Je pense mieux que tout le monde. C’est dû moins l’impression que je me plais à renvoyer. En particulier sur des sujets politiques, il me semble avoir mon mot en dire. BSF me donne accès à un espace d’expression. Je vais donc en profiter pour moraliser toutes les deux semaines à propos de sujets qui, croyez-moi, sont importants.

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ActualitéTibovski - Dessin de la quinzaine

La fabrique d’une pandémie : L’exemple du Coronavirus

par Tibovski 12 février 2020
écrit par Tibovski
Coronavirus

Nos deux spécialistes en épistémologie, Albi et Tibovski, nous livrent leur réflexion sur le fonctionnement de la science en cas de crise, avec l’exemple du Coronavirus. 

Réflexions sur l’expertise scientifique en temps de crise. 

La dernière fois, je vous ai promis un descriptif court, et j’en avais l’intention, vous pouvez me croire. Mais, mais, mais… j’ai eu le plaisir de discuter avec l’une de nos rédactrices occasionnelles, à savoir Albi (qui avait écrit ce brillant article sur BSFmagazine). L’évolution du coronavirus nous a inspiré une réflexion à propos de l’expertise scientifique dans les cas d’épidémies à échelle planétaire. Albi avait déjà eu l’occasion d’étudier la gestion de crise de la grippe A. Nous avons donc eu l’idée d’écrire à ce propos dans l’espoir d’apporter une lumière intéressante à la situation actuelle. 

Entre blagues, méfiance et parfois racisme, le coronavirus est un sujet de conversation qui se répand plus vite que le virus lui-même. En témoignent, la pénurie de masque à Paris ou encore une de mes dernières soirées où régnait une certaine gêne oscillant entre sarcasme et crainte.

Et même si, pour le moment, il ne semble pas avoir lieu de s’alarmer plus que de raison, cette crise sanitaire soulève un certain nombre de problématiques intéressantes. On pourrait y voir par exemple la responsabilité des médias dans le traitement alarmiste de la question, mais c’est une thématique que j’ai déjà traitée la semaine dernière. Un autre sujet qui est aussi, voire plus intéressant, est celui de la gestion de crise dans les cas d’épidémie et le rôle des instances gouvernantes dans ceux-ci.

En effet, si l’on s’en tient à la définition la plus basique de pandémie, cela correspond à une épidémie qui touche un large groupe de personnes à l’échelle de plusieurs pays voire du globe. La gestion de la crise est une question de politique de santé transnationale, et dépend fondamentalement des stratégies et des modes de collaboration adoptés par les autorités. La complexité des cas de pandémie, c’est qu’elles ne sont pas uniquement des problèmes de santé, elles constituent également des problèmes socio-économiques. Les interventions font donc partie du phénomène de crise.

 

Quelques précisions 

Les coronavirus représentent en réalité une famille assez répandue de virus, responsable en grande partie des rhumes. Ces symptômes sont d’ordre respiratoire. Son nom lui vient de la couronne extérieure du virion que l’on peut observer au microscope à balayage. Certains virus peuvent être plus dangereux comme les souches du SARS-CoV et du MERS-CoV qui ont causé des épidémies semblables respectivement en 2003 et en 2012. Celui dont on entend parler est une nouvelle souche du virus appelée 2019-nCoV ayant touché brutalement la population de Wuhan à partir de début décembre 2019. L’évolution de la contamination a vite inquiété les autorités chinoises et l’OMS a déclaré jeudi 30 janvier l’urgence de santé publique. 

 

Coronavirus

Quelle belle saleté. Une saleté, mais belle quand même… avec ces aguicheuses glycoprotéines.

 

Quels risques d’une pandémie ?

La mondialisation, en particulier le trafic aérien et la densification des aires urbaines a pour effet d’accroître la propagation d’une maladie à l’échelle du globe. La prolifération d’une maladie infectieuse peut donc rapidement évoluer de façon globale en fonction de nombreux facteurs que les chercheurs doivent identifier. Les principaux modèles d’épidémiologie sont soit (i) très généraux avec des équations différentielles ordinaires comme les modèles compartimentaux  (cf. modèle SEIR utilisé pour les premières prédictions de l’épidémie du 2019-nCoV) ou des modèles en graphe (Keeling & Eames 2005), (ii) soit plus sophistiqués, mais difficiles d’interprétation et nécessitant beaucoup de données (Pellis et al. 2015). Or le principal problème dans un cas comme celui-ci, c’est que le déploiement du virus complexifie la modélisation de l’épidémie. Car à cette échelle l’hétérogénéité des individus, des dynamiques spatio-temporelles et structurelles devient déterminante (Getz et al. 2019).

De plus, l’urgence et la rapide évolution de la situation requièrent à la fois de prendre des mesures, c’est-à-dire de pouvoir comprendre et prédire la situation. Et c’est également ce qui rend ardue l’obtention de données complètes pour paramétrer les modèles (Bulletin of the World Health Organization 2012.). Ni la simplicité, ni la complexité ne conviennent idéalement à ce type de situation. Par conséquent les modèles épidémiologiques sont imparfaits pour répondre correctement à l’urgence.

Pour le moment, on se raccroche à certaines estimations de variables comme le taux de propagation (R0), le temps d’incubation, le taux de morbidité ou encore le taux de mortalité. Au demeurant, ces chiffres ne veulent pas dire grand chose avec des échelles de temps et de populations si faibles. Les estimations s’appuient uniquement sur les cas existants connus. Or la singularité des individus et le faible nombre de cas pour le moment recensés montrent une variabilité statistique trop grande pour que l’on parle de chiffres fiables. D’autant plus qu’il faut se fier aux chiffres communiqués par le régime chinois, et que ces chiffres ne peuvent être exploités sans considérer d’autres paramètres. 

 

Comment réagissent-ils face à l’incertitude scientifique ? 

Coronavirus

[suivre ici l’évolution de la situation]

 

Le rôle des institutions

L’OMS intervient dans le cadre de situations de crise afin de rassembler les connaissances scientifiques sur une épidémie et de pouvoir conseiller les politiques dans leur gestion des crises sanitaires. Le principe fondateur au cœur de ce système est une neutralité de la relation entre les experts scientifiques d’une part et les hommes politiques d’autres part. Dans le contexte actuel du coronavirus, un climat anxiogène et catastrophiste est diffusé par les médias et appuyé par les politiques. L’OMS, quant à elle vient d’annoncer que le virus représentait une menace considérée comme “élevée” et a décrété l’urgence internationale face au virus. Dans un même temps, elle reconnaît l’absence d’une compréhension complète concernant la source et l’ampleur de la propagation de la maladie : 

 

“Les connaissances actuelles sur cette maladie restent limitées (…). Il est urgent d’en savoir plus sur la transmissibilité du virus et la gravité de l’infection pour orienter les autres pays quant aux mesures de riposte à prendre.” 

 

Cette situation semble paradoxale et pose la question du positionnement de l’OMS lors des crises sanitaires ainsi que celle de la préservation de la neutralité entre hommes politiques et experts scientifiques.

Pour comprendre le cas du coronavirus, il est bon de regarder ce qui a déjà pu survenir par le passé. Un des exemples particulièrement marquant dans la mémoire collective est le cas de la grippe H1N1, souvent présenté comme un fiasco en matière de santé publique. Le premier élément clef de la plupart des crises sanitaires (si ce n’est toutes) est le manque de connaissances scientifiques. 

Bien que cela puisse sembler évident, cet élément pose des difficultés très concrètes, comme par exemple la difficulté à établir un vocabulaire commun entre les différents acteurs de la gestion de crise sanitaire. Lors de la crise du H1N1, cette difficulté est devenue particulièrement frappante avec la définition de la notion de pandémie. Jusqu’en 2009, une pandémie “survient lorsqu’apparaît un virus nouveau contre lequel le système immunitaire humain est sans défense, donnant lieu à une épidémie mondiale provoquant un nombre considérable de décès. Le nouveau virus grippal est d’autant susceptible de se propager rapidement dans le monde que les transports internationaux ainsi que l’urbanisation et les conditions de surpeuplement s’intensifient.” Or, le 4 mai, 2009, les experts de l’OMS s’accordent pour modifier cette définition et en proposer une nouvelle: 

 

“Une maladie épidémique survient lorsque la prévalence de cette maladie est supérieure à la normale. Une pandémie est une épidémie mondiale. Une pandémie de grippe peut survenir lorsqu’apparaît un nouveau virus de grippe contre lequel la population humaine n’est pas immunisée. L’intensité d’une pandémie peut être modérée ou forte en terme de cas de décès provoqués et peut varier au cours de l’évolution de la pandémie.”

 

 Ce  changement définitionnel a généré un clivage entre les experts de l’OMS et les experts nationaux français qui soulignent qu’une maladie pas ou peu meurtrière, mais qui se propage vite, ne devrait pas être considérée comme une pandémie, mais comme une épidémie mondiale. En effet, avec la mondialisation, la facilité des individus à se déplacer augmente considérablement les cas de contamination à échelle planétaire. Par conséquent, si le critère de contamination demeure le critère principal pour caractériser la pandémie (et non plus la dimension létale de la maladie), il y a là un risque réel de déclencher une alerte de pandémie de manière systématique.

Ce problème devient d’autant plus important lorsque, dans la gestion de crise sanitaire, les connaissances scientifiques doivent s’intégrer dans un contexte socio-économique afin d’élaborer un plan de réponse adapté. Dans le contexte de la grippe H1N1, ce versant de la gestion de la crise a fait l’objet de nombreuses controverses et deux éléments vont notamment mettre à mal la neutralité de l’OMS. 

  1. Premièrement, le risque de conflits d’intérêts pour des experts en lien avec des laboratoires. En effet, le changement de définition du terme de pandémie a été perçu par plusieurs experts comme une manière de déclencher des stades d’alerte plus élevés plus facilement et ainsi, en jouant sur la peur des responsables politiques, de vendre des stocks de vaccins mis à disposition par les différentes firmes pharmaceutiques. Ces soupçons ont notamment été renforcé par le fait que 6 des experts mobilisés par l’OMS pour évaluer la situation de la grippe H1N1 étaient mis en cause dans des cas de conflits d’intérêts.
  2. Deuxièmement, la conclusion précoce d’accords contractuels pour des vaccins entre différents États et des firmes pharmaceutiques laissent penser à un cas d’abus d’influence et de pression de la part des groupes pharmaceutiques. En effet, ces accords étaient considérés comme dormant jusqu’à la déclaration d’un état pandémique, laissant entrevoir les bénéfices pour l’industrie pharmaceutique d’un changement de définition aussi rapide.

 

Ainsi, les relations entre hommes politiques et experts scientifiques sont parasitées par des enjeux socio-économiques qui mettent à mal la neutralité des différents acteurs dans les processus de prise de décisions (notamment celle de l’OMS) et qui peuvent mener à une politique inadéquate dans la tentative de résolution d’une crise sanitaire.

Le fiasco des vaccins contre la grippe A à 500 millions d’euros en 2009 n’a pas fait perdre son sourire à l’ex-Ministre de la santé Roselyne Bachelot. 

 

Coronavirus

Le fiasco des vaccins contre la grippe A à 500 millions d’euros en 2009 n’a pas fait perdre son sourire à l’ex-Ministre de la santé Roselyne Bachelot.

 

La place des scientifiques 

Le consensus et la certitude scientifiques sont construits au travers de processus lents qui contrastent avec l’urgence des organes décisionnels. Les différences de temporalité sont d’autant plus marquantes en cas de crises. La science fonctionne de doutes, de critiques, de réplication d’expériences et même de changement de perspectives. C’est une réalité qui est indispensable au bon fonctionnement des sciences. De l’autre côté, le processus de décision ou d’action est presque toujours une dynamique où le contexte impose rythme et conditions, et appelle donc à trancher face aux risques de l’incertitude. On pourrait alors imaginer que c’est pour cette simple raison que les scientifiques et politiques sont deux catégories distinctes, et que le rêve platonicien d’un philosophe roi est une vanité. 

Oui mais voilà, une bonne décision doit s’appuyer sur une bonne compréhension. Ainsi naît l’expert scientifique ; chimère entre politique et scientifique. La science dans toute son incertitude peut et doit épauler les choix politiques. L’expertise scientifique consiste donc à aiguiller les choix politiques face à l’incertitude faisant usage de l’état de l’art et de la méthodologie scientifique. Bien que la communauté scientifique est continuellement confrontée à l’incertitude dans son travail, la méthode scientifique, elle, n’est pas conçue pour résoudre ce genre de problématiques. Le scientifique devient un acteur puisqu’il doit lui-même prendre position pour synthétiser et tirer des recommandations des travaux scientifiques. La tâche n’est plus seulement épistémique (relatif aux connaissances) elle est également éthique (relatif à l’action).

A l’incertitude scientifique s’ajoute le relativisme moral. L’exploitation des recherches scientifiques dépend donc autant des informations scientifiques existantes que des valeurs éthiques. Certains philosophes iront même jusqu’à généraliser le concept en expliquant qu’il n’existe pas de science exempte de valeurs morales et politiques : la recherche est toujours épistémiquement incertaine, mais se confronte continuellement dans son fonctionnement à des choix (thématique de recherche, interprétation, communication…) qui ne se justifient pas seulement par des raisons épistémiques (Longino 1990, Douglas 2009, Reiss & Sprenger 2017 chap. 3.3). Il est cependant important que dans sa responsabilité morale, l’expert ne servent pas ces intérêts particuliers comme dans les cas de conflits d’intérêts que nous vous avons présentés. C’est pourquoi il est inscrit dans le code de santé que l’expert doit rester neutre. 

 

« L’expertise sanitaire répond aux principes d’impartialité, de transparence, de pluralité et du contradictoire » 

 

Alors, est-ce qu’un expert peut être impartial ? C’est véritablement discutable. Un expert n’est pas un robot, il vit dans la société, a un ancrage culturel, et même à une vision personnelle de sa discipline scientifique. Il n’est pas vraiment réaliste d’attendre d’un expert une entière neutralité. En revanche c’est au niveau de la communauté d’expert que l’on doit garantir la neutralité. Et pour se faire, il y a différentes caractéristiques à respecter. 

  1. Premièrement, il faut à tout prix éviter l’influence de forces économiques, idéologiques et politiques qui peuvent truquer le bon fonctionnement de la délibération. 
  2. Et secondement, comme indiqué dans le code de santé, “la transparence, la pluralité et le contradictoire” sont des propriétés essentielles pour assurer une prise de décision mesurée. 

 

Ces deux conditions sont en réalité les deux faces d’une même pièce, puisque éviter l’influence de groupes de pouvoir permet la diversité des parties prenantes, et de l’autre la pluralité d’un groupe d’expert diminue l’influence des intérêts particuliers ou de groupes d’influence. 

Le cas de l’OMS en 2009 montre qu’il y a une violation de ces deux règles. L’OMS présente une autorité d’expertise trop importante face à d’autres instances, déséquilibrant alors la règle de la contradiction. Cela explique alors que des conflits d’intérêt aussi proéminents aient été constatés. L’OMS est un exemple particulier de la façon dont l’expertise scientifique peut être instrumentalisée. Il y a une irrégularité de la position d’expert. En temps ordinaire, l’expert a peu de poids dans le processus décisionnel, mais en temps de crise celui-ci a une grande autorité dans la gestion de crise. Et seule une poignée d’experts est entendue en période de crise. Cela signifie que l’expertise scientifique n’intervient véritablement que dans une minorité de cas et par l’intermédiaire d’une minorité de représentants. C’est un paradoxe intéressant quand on sait que la science fonctionne normalement dans des temporalités longues et par une communauté large et diverse. La science ne prend part aux décisions que dans des modalités où  elle a probablement le moins de pertinence. Les deux hypothèses pour expliquer cette absurdité sont les suivantes : 

  1. Les temps de crises sont caractérisés par des risques importants dans des durées très courtes. C’est ainsi le moment où il y a peu de temps pour des délibérations, mais où les issues des stratégies sont déterminantes. Ainsi c’est dans ces moments où un petit groupe d’expert peut avoir un impact capital sur les mesures. 
  2. Les situations d’urgence sont aussi celles dans lesquelles les informations et connaissances scientifiques sont les plus rares. L’indétermination scientifique expliquerait une plus grande variété d’opinions chez les scientifiques et donc une plus grande probabilité d’avoir un expert allant dans le sens de nos intérêts. 

À notre sens, l’expertise scientifique se développe parfois dans de très mauvaises conditions qui renforcent les positions et le pouvoir de forces politiques et économiques. Ces conditions sont assez communes et consistent à mener des politiques qui exploitent la peur des populations. 

 

Coronavirus

Une bonne science serait entre autres une science transparente… d’où l’image d’une vitre griffonnée de formules topologiques et laissant transparaître une manipulation expérimentale. Astucieux n’est-ce pas ?

 

Diagnostic et prescription 

 

  • Faciliter la coordination des temporalités 

Cela signifie que les instances gouvernantes doivent développer des gestions de crises plus mesurées permettant aux scientifiques de mieux connaître le problème et à la communauté de débattre. La coordination des temporalités signifie par ailleurs le besoin de pérenniser le travail des scientifiques dans la prévision des risques et la compréhension des problèmes. Le travail en amont des chercheurs ne permettra probablement pas de prévoir la prochaine crise, mais plutôt d’en être moins dérouté et de mieux préparer les protocoles.

Le groupe de chercheurs chinois qui a permis de caractériser le virus (et lui donner son nom par la même occasion) avait par exemple étudié la sérologie des chauves-souris et des habitants de Wuhan (Li et al. 2005, Hu et al. 2017). Ils avaient pu mettre en évidence de nombreuses souches de coronavirus dont une susceptible de contaminer l’humain. Cette souche présente d’ailleurs un génome proche à 96 % de celui du coronavirus. L’évolution des chauves-souris et leur rapport avec les humains étaient relativement bien étudiés. 3 % de la population de Wuhan présente des anticorps réagissant à la souche SARS du virus indiquant un saut régulier du virus entre homme et chauve-souris dans cette région.

Peter Daszak ; l’un des auteurs de ces études déclare au New York Times  “Nous alertons sur ces virus depuis maintenant 15 ans”. Plus globalement, les scientifiques montrent aussi que certaines dynamiques (Uche 2014) industrielles et démographiques favorisent la prolifération d’épidémie et l’apparition de crises de santé globales. La destruction des habitats naturels renforce les contacts inter-espèces et donc les cas de zoonoses, c’est-à-dire de transmissions de maladie de l’animal à l’homme (Keusch et al. 2009, Moorse et al. 2012). Dans beaucoup de cas, nous avons les moyens de prévenir partiellement ces dangers. Mais il faut pour cela investir dans la recherche et lui donner une place plus claire. 

 

  • Donner des moyens suffisants à la recherche

Le court-termisme vers lequel afflue la recherche pose un véritable problème (cf. la loi de programmation pluriannuelle de la recherche). Les milieux académiques connaissent depuis quelques décennies des transformations profondes vers une programmation de la recherche aux conséquences désastreuses pour l’indépendance de la recherche (Hubert & Louvel 2012, Hubert et al. 2012) . La recherche coûte très cher, or depuis le tournant néo-libéral des années 80 les grandes puissances économiques ne peuvent miser sur des croissances importantes et doivent de ce fait limiter les dépenses et l’endettement.

Une solution est donc de rentabiliser la recherche, soit en la rendant économiquement viable, soit en la greffant sur les besoins gouvernementaux. Programmer la recherche, c’est donc tenter d’optimiser les efforts vers des connaissances utiles pour les applications technologiques et commerciales ou pour la société en général. Les Etats-Unis sont un modèle de programmation de la recherche, les grands laboratoires sont financés par des partenariats industriels ou des grands programmes nationaux. Une recherche curiosity-driven est presque devenue inexistante dans ce pays. On attend de la science une efficacité. Du reste, la recherche est imprévisible, sinon nous n’appellerions pas cela de la “recherche”. Programmer la recherche est donc insensé et présente des inconvénients évidents : 

 

      • Une précarisation de la recherche

La rentabilité a pour effet de rendre la recherche dépendante de financements. Les demandes de financements sont très chronophages, réduisant par ce simple fait le temps consacré à la recherche. D’autant que les financements sont souvent courts et ne permettent pas à certaines études de prendre le temps nécessaire pour arriver à des conclusions satisfaisantes. Cela altère considérablement la qualité des travaux. Cette précarité a également pour effet de renforcer une concurrence dans le domaine scientifique altérant ainsi le fonctionnement des principaux mécanismes de la communauté scientifique comme la transparence, la communication, la collaboration et la contradiction. La fraude scientifique, les biais de publication le marketing scientifique et les guerres politiques au sein des institutions n’ont de cesse de se renforcer dans ce climat. 

 

    • Une recherche dirigée

le problème principal dans ce climat de précarité, c’est que cela à un impact direct sur les thématiques et objets d’études. Contraints de trouver des financements, les chercheurs sont obligés de s’adapter aux domaines porteurs où l’argent est investi. Cette situation donne donc un pouvoir important aux investisseurs. Non seulement ces investisseurs (publics ou privés) peuvent donc déterminer la science à répondre à leurs agendas politiques et économiques, mais cela joue sur la neutralité de la recherche et donc de l’expertise scientifique. Les connaissances, les représentations, mais aussi les intérêts économiques des experts sont en ce sens influencés par la partialité des financements.

 

    • Une recherche biaisée 

l’imprévisibilité de la recherche fait que la stratégie la plus efficace pour l’avancée des connaissances et de la technologie, reste la diversité des recherches. Le court-termisme n’est pas capable d’anticiper l’évolution de la science et de comprendre l’investissement nécessaire dans une science libre et plurielle. Les champs de recherche importants ou qui le deviendront n’ont aucune raison de correspondre avec les domaines provisoirement rentables. On voit d’ailleurs que les investissements privés ont tendance à créer des effets de hype correspondant souvent à des bulles financières. Par exemple avec le machine learning, les nanotechnologies, biotechnologies et technologies quantiques. Ces bulles influencent d’ailleurs les financements publics qui veulent, pour des raisons économiques et diplomatiques, également s’imposer dans des domaines attractifs. Mais qui sait d’où proviendra la prochaine crise, ou les connaissances qui pourront être utiles faces à elle ? 

Plutôt que d’adapter la prise de décision à des processus de délibérations démocratiques et scientifiques, il semblerait que la tendance soit au contraire d’exiger de la recherche qu’elle calque son rythme et son fonctionnement sur les besoins industriels et commerciaux. On parle souvent de “commodification of research” (Radder 2010) dans lequel les organisations gouvernementales et académiques s’adaptent aux dynamiques industrielles. 

 

  • Renforcer la démocratisation des débats

 Ce que veut montrer notre développement c’est que de gros problèmes persistent autour de la question de l’expertise scientifique. Comme nous l’avons montré un scientifique n’est pas externe à la société, il est situé socio-économiquement. Le rôle des scientifiques n’est jamais pur de ces composants, et ont un rôle politique à ce sens. L’autorité scientifique est à distinguer de l’autorité des scientifiques ; distinction subtile si l’en est mais essentielle. Les experts peuvent être instrumentalisés au profit d’agendas politiques spécifiques.

C’est notamment pourquoi, l’autorité des experts ne doit pas permettre d’asseoir l’autorité des acteurs politiques et industriels. La diversité des approches est fondamentale tant pour le fonctionnement des sciences que pour les décisions démocratiques. Attention lorsqu’on parle ici de pratiques démocratiques c’est au sens faible d’ouvrir la prise de décision à un débat public et délibératif, même si un usage plus strict de cette notion reste bon à penser.

En effet, plus que d’ouvrir la question à l’ensemble des scientifiques, certains philosophes (par exemple https://www.democrasci.com/, ou les travaux de Philip Kitcher) s’intéressent à la possibilité d’une science citoyenne, dans laquelle les citoyens profanes prendraient aussi part à la gouvernance des sciences. Si l’on accepte la non-indépendance des sciences par rapport à la réalité humaine, on comprend que l’organisation des science est conditionnée et conditionne à son tour, la société. Dans un idéal démocratique, le citoyen pourrait donc participer à la construction d’une science plus conforme à ces attentes et convictions.

 

En conclusion, les problématiques exposées dans ce billet dépassent bien évidemment le cas du coronavirus. La politique de l’urgence ne fait qu’exposer et même accroître les pouvoirs d’influence d’une minorité d’acteurs publics et privés. Alors que nos sociétés donnent l’illusion de progresser vers plus de rationalité scientifique, ce n’est là qu’un voile qui cache la détérioration d’une autorité scientifique saine et ouverte au profit d’un système de lobbying et de gestion unilatérale des problématiques. Ces modestes réflexions, peuvent être mises en perspective avec l’évolution des problèmes écologiques. Un consensus scientifique d’une rare ampleur existe aujourd’hui sur l’avenir incertain de notre monde humain s’il venait à persister dans son fonctionnement actuel. Le temps nous permet pour le moment de préparer prudemment une réponse adaptée à ces probables crises. N’attendons donc pas que ce problème devienne une urgence dans laquelle les scientifiques auront les mains liées et où s’affirmera l’hégémonie de ceux-là mêmes qui en sont la cause.

 

A la prochaine quinzaine les ami.es. 

 

12 février 2020 3 commentaires
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ActualitéTibovski - Dessin de la quinzaine

D’une écologie affective : 1 like = 1 koala sauvé

par Tibovski 24 janvier 2020
écrit par Tibovski
Animaux porte drapeau

Aujourd’hui je vais tenter de faire bref. Vous le savez, l’Australie connaît d’importants incendies. Si vous le savez, ce n’est pas uniquement parce que j’ai pu l’évoquer dans ma dernière quinzaine, c’est aussi et surtout parce que ces catastrophes sont particulièrement médiatisées. Le monde entier s’exalte sur cette histoire, des journaux, aux célébrités et surtout les réseaux sociaux. Et ces événements constituent le fond de commerce de certains, aussi bien du côté de quelques écologistes que des climatoseptiques. Mais ce n’est pas cela que je veux traiter précisément. 

Il est vrai que ces incendies font d’effrayants dégâts. Mais ce n’est pas spécifiquement cela qui rend ces évènements si uniques. Les incendies de 1974 avaient, par exemple, touchés une surface six fois plus grandes du territoire. Et certains grands incendies ont même été plus mortels. Ce qui fait la spécificité de ces incendies c’est probablement une couverture médiatique inédite. Avec ma sensibilité aux catastrophes écologique je devrais me réjouir d’une telle évolution des mentalités. Je ne suis pas convaincu que plus de bruit soit cependant la solution.

Quel impact le traitement médiatique a sur les problèmes écologiques ? 

 

Pourquoi tu nous parles de ça ? 

En temps normal je n’aurais pas traité ce sujet, justement parce que nous en sommes inondés. Quand quelque chose fait l’émoi général, ça ne m’inspire pas confiance, j’ai trop peur des mouvements de foules et du manque de contrôle que cela entraîne. Souvent je préfère regarder la vague passer. S’émouvoir c’est important, j’en conviens, c’est parfois magnifique. Mais l’émotion, c’est seulement du mouvement, c’est le sens même d’émotion. Bouger c’est bien mais où. C’est pourquoi il n’est jamais mauvais de se poser et d’y réfléchir. Il est donc étrange de rajouter ma voix au cafouillage général, puisque j’’en ai déjà parlé, et puis que je n’ai aucune informations particulières à enchérir à la clameur publique. 

 

Seulement voilà, j’ai entendu parler d’une pétition  à plus de 12 000 signataires sur Change.org exigeant le déplacement des koalas en Nouvelle Zélande. Et là… et là. J’ai supporté photos, posts, articles insistant sur le sort des “adorables koalas”. J’ai également supporté toute cette mise en scène des célébrités donnant des sous à l’Australie. Seulement là, c’est beaucoup plus gênant. Nous parlons d’une intervention de grande envergure ne s’appuyant sur aucune analyse scientifique. Pour la seule raison que la Nouvelle Zélande possède également de l’eucalyptus, organiser le déplacement des koalas devrait être une bonne idée ? Mais ça ne marche pas comme ça. Soyons sérieux un instant. Le peu d’écologie que j’ai pu étudier me suffit pour évaluer la monumentale erreur qu’il y a là.   

 

Koala 

Reprenons, et faisons bref, comme je vous l’ai promis plus tôt. J’accuse cette pétition de ne s’appuyer sur aucunes conceptions, aussi éloignées soient-elles, des mécanismes écologiques. L’écologie est une discipline tardive qui étudie les rapports entre des espèces et leur environnement. L’évolution de cette branche de la biologie met très vite en lumière le complexe tissu d’interdépendance à l’oeuvre dans les environnements naturels. Se développe alors à partir de Tansley, le concept d’écosystème pour désigner l’unité systémique qui régit à différentes échelles les interactions des espèces et de leur environnement. En termes de modélisation et de prédiction, c’est un véritable défi.

Les meilleurs modèles sont au mieux capables de répondre à des questions restreintes localement, ou à des phénomènes très généraux. Les systèmes écologiques ont parfois des comportements chaotiques (Berryman & Millstein, 1989). Une faible variation locale peut avoir des conséquences globales. L’apparition ou la disparition d’une espèce peut perturber l’ensemble. Et c’est d’ailleurs l’Australie qui fournit l’un des exemples les plus flagrants avec l’introduction de faunes européennes invasives sur le sol australien. L’apparition du lapin européen, par exemple, n’ayant pas de prédateur direct, mais profitant de ressources communes à d’autres animaux. Ce fût une catastrophe écologique responsable de la disparition de nombreuses populations.

C’est justement parce qu’on parle d’écosystème avec des équilibres et des phénomènes de régulation, qu’on ne peut introduire de nouvelles espèces sans considérer les effets que cela peut avoir sur l’ensemble de l’écosystème, les effets sur la prédation et les configurations des réseaux trophiques. C’est le sens même de l’écologie et des recherche en éco-ingénierie qui visent à réellement comprendre le rôle et les fonctions des espèces et des relations sur l’ensemble de l’écosystème. Le principe même d’écosystème, rend difficile d’isoler un groupe spécifique de l’ensemble du système. 

 

Médias et animaux porte-drapeaux

Les évènements en Australie, donnent lieu à une grande attention à la situation animale. En supplément du chiffre écrasant du nombre de vies animales (University of Sydney) on a le droit à des dossiers entiers sur le péril des koalas et kangourous. La pétition, à mes yeux, n’est d’ailleurs rien d’autre qu’une réponse bien intentionnée à cette exclusivité médiatique autour de ces deux mammifères. Rien d’étonnant qu’on se préoccupe surtout du sort de ces deux bêtes puisque ce sont les deux emblèmes nationaux, me direz-vous. Et c’est exactement ce sur quoi je souhaite insister. Il est question de symboles. Le combat contre les extinctions de masse connaît bien l’usage de symbole ; on parle alors d’espèce porte-drapeau. Comme pour porter la flamme olympique, certaines espèces sont choisies pour leur charisme afin de représenter un combat. A l’exception qu’il n’est pas question de 100m haie, mais de l’annihilation de la nature. Qu’en est-il des autres ? 

On se heurte donc ici à ce qui me dérange profondément. L’usage d’espèce porte-drapeau est débattu depuis longtemps. Cette pratique exploite justement la sensibilité du public et les mécanismes des médias. Je remarque qu’avec la recrudescence du green washing et des sensibilités écologiques, ces pratiques ont bon trains. Mais à qui profite le crime, maintenant que le vert is the new black ? Certainement pas aux luttes écologiques. Premièrement parce-que des marchés économiquement juteux font rarement la paire avec les idéaux environnementalistes. Mais surtout parce que cette machinerie, aux airs hollywoodiens, occulte souvent le fond du message.

Si l’idée de choisir des “stars” pour faire la publicité sur la préservation de l’environnement n’est pas idiote, le problème c’est qu’il n’est plus l’heure de la pub. Je pense que suffisamment de personnes sont touchées par ces sujets pour qu’il soit temps de saisir les raisons des crises écologiques. Cessons de pleurer, tentons de comprendre. Et la surreprésentation de certaines espèces ne va pas dans cette direction. Voici, à mon sens les principaux effets pervers que cela a : 

 

1- L’effet projecteur

Mettre trop de lumière sur une espèce c’est automatiquement placer la majorité dans l’ombre. Pourquoi ne parle-t-on pas de ce qui constitue l’ensemble de la richesse des écosystèmes australiens ? Cet effet est d’autant plus fort lorsque l’espèce est peu visible ou charismatiques, comme la végétation ou les insectes. N’oublions pas que la végétation est la principale victime de ces incendies, n’a-t- elle pourtant pas un rôle essentiel dans un écosystème ? 

 

2 – L’effet adoption

On cherche souvent à agir directement sur les symptômes visibles d’un problème. Cela est directement lié à l’effet précédent, on agit sur ce qui est visible. De la même façon qu’il y a une inclinaison de l’homme à prendre soin des (et adopter idéalement) animaux qui souffrent sous nos yeux. Toutefois c’est voir le problème dans sa particularité et non dans sa globalité. C’est ici se préoccuper isolément des espèces alors que c’est le système dans son entièreté qui est touché. Sont alors ignorées des caractéristiques importantes des écosystèmes comme les fonctions écologiques ou encore les chaînes de régulation du système. Des éléments, où je le répète des composants insignifiants peuvent tenir une place essentielle, comme les insectes, les plantes, les champignons et les bactéries. Comme pour une maladie, traiter le symptôme c’est se garder de prévenir des maux futurs. Les bouleversements en cascade qu’entraineraient l’effondrement d’un écosystème sont nettement supérieures à ceux que l’on pouvait chercher à  éluder en premier.

 

3 – L’effet Disney

Les recherches de Franck Courchamp (CNRS) ont montré que les espèces charismatiques n’étaient pas pour autant les espèces les mieux portantes. En effet, Courchamp a répertorié les espèces les plus appréciées auprès de la population. Il a posé la question sur des sites internet, dans des écoles primaires, épluché les affiches de films d’animation, les pages principales des websites de zoo, etc.. Sa conclusion ? La majorité de ces espèces étaient en voie d’extinction malgré la publicité dont elles bénéficient. Selon lui, l’omniprésence de ces animaux-totems donneraient une mauvaise appréciation du danger de leur disparition. Plus on voit un animal, moins on le pense rare :

 

“En utilisant librement l’image d’espèces rares et menacées dans la commercialisation de leurs produits, de nombreuses entreprises peuvent participer à la création de cette perception biaisée, avec des effets néfastes involontaires sur les efforts de conservation, qui devraient être compensés en canalisant une partie des bénéfices associés vers la conservation. Selon notre hypothèse, cette perception biaisée serait susceptible de durer aussi longtemps que la présence culturelle et commerciale massive d’espèces charismatiques ne s’accompagne pas de campagnes d’information adéquates sur les menaces imminentes auxquelles elles sont confrontées” – (Courchamp et al. 2018)

 

Comme Courchamp le pointe, c’est un problème d’information. Dans le cas de notre koala la situation est légèrement différente puisqu’au contraire on s’indigne de sa disparition. Mais je préciserais que la transformation d’espèce en icône a l’effet pervers de la rendre intéressante, pour l’image, le tourisme, voire le braconnage (cf. image ci dessous), mettant encore plus en péril sa survie.

 

 

La progéniture de Trump dans toute sa splendeur !

La progéniture de Trump dans toute sa splendeur !

 

J’accuse donc cette pétition de représenter ce que je considère être de la “mauvaise écologie”. Pourquoi ? Parce que c’est une forme de sensiblerie qui ignore tout des principes scientifiques de l’écologie. Or un des problèmes majeurs pointé par l’écologisme c‘est l’ignorance du fonctionnement de la nature et l’inconséquence qui s’ensuit. Faire de l’écologie sans écologie est une bêtise coûteuse. L’empathie ne peut suffire si l’environnement reste compromis. Pas si différent que d’être climatosceptique en somme, les pleurs en plus. J’exagère évidemment. C’est néanmoins une mise en garde contre la mise en image de causes importantes. 

La biodiversité ne brûle-t-elle pas en dehors de l’Australie sous l’effet d’une humanité toujours plus vorace ? Faut-il attendre de réels flamboiement pour s’en soucier ? Ou bien faut-il attendre des victimes aussi charmantes que le koalas pour s’en émouvoir? 

Moi qui avais promis de faire bref, c’est raté. La prochaine fois ce le sera, je vous l’assure.

24 janvier 2020 3 commentaires
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ActualitéTibovski - Dessin de la quinzaine

Les fêtes de l’insignifiance : vers un monde en crise

par Tibovski 8 janvier 2020
écrit par Tibovski
Les fêtes de l’insignifiance

Si les fêtes de fins d’années peuvent évoquer joie et liesse dans nos foyers français, celles-ci marquent également les plus tenaces contradictions de notre civilisation.

Dans le cadre de mon intervention bi-mensuelle, je trouvais intéressant de me pencher sur le profond écart entre les valeurs et les pratiques qui caractérisent cette période. Rien de bien original ? J’en conviens. Plus précisément, je pensais traiter ce thème sous le prisme de sujets actuels. Par exemple en montrant comment la grève générale, plutôt que de gâcher l’esprit convivial des fêtes, comme le gouvernement et ses acolytes s’escriment à nous le faire croire, peut incarner la beauté du sacrifice joyeux, festif et collectif. En bref, je pensais finir l’année avec une touche de légèreté en célébrant des formes alternatives de festivité. 

Mais comme exprimé dans mon dernier billet, ces sentiments sont toujours de courtes durées chez moi… et le tableau s’assombrit…

Outre le constat amer que les “consciences écologiques et politiques éveillées” n’ébranlent pas un instant le système de surconsommation, l’actualité n’est guère plus réjouissante. En ce début de décennie, les événements récents semblent davantage annoncer la fin de quelque chose qu’un début. 

Les mouvements de contestations ne faiblissent pas dans le monde, ni pour autant la résilience des systèmes contestés. Ce qui traduit, à mon sens, une cécité grandissante des oligarques quant aux réclamations des peuples. Seule la répression est envoyée en réponse. On peut craindre pour l’état, déjà inquiétant, des libertés individuels dans ce monde. 

 

Une nature qui gronde

L’Indonésie connaît des inondations meurtrières probablement causées ou renforcées par la forte urbanisation de certaines régions. L’Australie est aux prises avec une catastrophe écologique terrifiante ; cette formidable réserve de biodiversité est actuellement ravagée par les flammes. Non seulement l’accélération des incendies est en partie causée par le réchauffement climatique, mais cette catastrophe aura un coût dévastateur pour l’écologie avec déjà 480 millions d’animaux morts et 250 millions de tonnes de CO2 dégagées. Ce genre de cercle vicieux est caractéristique de la dégénérescence des systèmes complexes. 

 

Donald got his gun !

Et enfin, le président américain, officiellement mis en accusation (“impeached”) – il est bon de le rappeler – a commandité l’assassinat du numéro deux de la république islamique d’Iran sans l’accord du congrès. Ce choix politique est particulièrement dangereux en raison d’une guerre froide qui se joue actuellement au Moyen-Orient et dans le monde entre l’Iran et l’Arabie Saoudite. Le déclenchement d’un conflit ouvert pousse le réseau d’alliance à se positionner et pourrait donc être à l’origine d’une guerre mondiale. Et cela est d’autant plus inconséquent que les raisons qui sont à l’origine de cette attaque sont relativement maigres.. Suite à l’attaque de l’ambassade américaine à Bagdad, Trump a accusé l’Iran d’être l’initiatrice de cette émeute. 

 

Ça sent le sapin…

En résumé en cette première semaine de l’année, le monde se meurtrit de multiples crises ; politiques, écologiques, diplomatiques. Seule une crise économique mondiale manque à l’appelle, quoi que. Pour autant, ces multiples crises sont l’effet d’un système économique particulièrement délétère qui broie hommes et nature dans la plus stricte indifférence. Et si l’économie partage avec écologie le terme oikos- celui qui désigne le foyer en grec, alors une économie qui accélère la désertification des écosystèmes, les inondations, l’instabilité politique et diplomatique mondiale est une économie en crise. Nous ne pouvons ignorer que les rapports internationaux sont presque exclusivement dictés et rythmés par des paramètres économiques. Le poids des Etats, les alliances et sanctions sont déterminés par ces mêmes règles. Et ce sont ces règles qui poussent certains pays à une industrialisation et à l’exploitation abusive des matières premières qui aggravent les conditions écologiques et climatiques mondiales. Bien évidemment les conséquences n’ont pas le même impact sur l’ensemble des territoires. Cette disparité repose sur des inégalités économiques qui elles-mêmes fondent et accroissent d’autres formes d’inégalités. Ainsi, je ne me contenterai pas de pointer l’incohérence de la surconsommation en temps de fête, mais plutôt l’ensemble de la machinerie qui construit culturellement ces comportements et ravage d’un même mouvement les conditions d’existences d’êtres vivants. C’est bien l’ensemble qui dérange. Ainsi en ces fêtes, “l’insignifiance” dans le titre dénonce bien le futile et la légèreté de ces célébrations, mais aussi la perte de la signification (au sens littéral d’insignifiant = qui ne signifie rien) des valeurs prônées par ces mêmes célébrations. 

 

Cela ne nous interdit pas de célébrer l’union, la charité dans le rapport à autrui. Bien au contraire c’est au nom même de ces principes que nous ne devrions pas ignorer la violence de l’organisation économique actuelle. Et c’est au nom même de ces principes que la situation actuelle me rend d’humeur si sombre ici. 

 

Bonne année tout de même ! Et à la prochaine quinzaine.  

 

Les fêtes de l’insignifiance

8 janvier 2020 1 commentaire
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ActualitéTibovski - Dessin de la quinzaine

Guerre et Paix : La “Lady” au double visage

par Tibovski 20 décembre 2019
écrit par Tibovski
Aung San Suu Kyi

“Les hommes ne sont point ainsi bâtis qu’on puisse en faire deux groupes, dont les uns ne mériteraient aucune confiance, tandis que les autres la mériteraient toute. De même on ne peut distinguer parmi les hommes les guerriers et les pacifiques; c’est le même homme qui fait la guerre et qui la maudit; et souvent il la loue et il la maudit dans la même phrase, et en quelque sorte du même geste.” 

Alain (1985)

Je dois vous confesser que je suis de nature colérique. Il y a même de grandes chances que ce soient colères et indignations qui motiveront beaucoup de mes contributions ici. Le visage du monde ne m’apparaît pas sous ses plus beaux traits. Toutefois c’est au travers de cette montagne de fange que brillent plus sublimement les rares exceptions. Et ces exceptions valent mon admiration. Mais ce dont je vais vous parler ici tient une place singulière dans ce schéma simpliste. Je parle bien sûr de l’indignation profonde que peut me causer la déception ; ce revers douloureux de l’admiration.

Oui ! J’ai pu admirer Aung San Suu Kyi pour son engagement pacifiste. Et oui son rôle, aujourd’hui manifeste, dans le génocide des Rohingya m’indigne férocement.  

Aung San Suu Kyi représente depuis quelques jours la Birmanie devant la Cours de Justice Internationale (CJI) à La Haye. La Gambie a saisi la CJI le 11 novembre en portant plainte contre le Myanmar (Birmanie) au sujet du génocide de la minorité musulmane des Rohingya. L’audition a commencé le 10 décembre. 

 

Une lutte pour la démocratie

Aung San Suu Kyi est une militante politique birmane. En 1988 après ses études et un poste aux Nations Unies, Suu Kyi retourne vivre en Birmanie au moment où le pouvoir du général Ne Win est mis en péril par des mouvements pro-démocratiques. Le conseil d’Etat pour la paix et le développement, une dictature militaire, s’impose en réponse le 18 septembre 1988 suite à un coup d’Etat. Suu Kyi s’engage alors pour lutter contre le régime en créant la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND) et incite la population à se mettre en grève. Elle est arrêtée un an après avec d’autres représentants du mouvement, et sera assignée à résidence pendant 6 ans. Son parti remporte très largement la majorité au scrutin de 1990 mais les élus ne sont pas autorisés à siéger au parlement. Par la suite le régime continuera à limiter ses droits et déplacement ainsi qu’à l’intimider en s’attaquant à ses proches et finira par l’arrêter de nouveau en 2003.  Elle est enfin libérée en 2010 après les premières élections depuis 1990 et rencontre en 2011 Thein Sein le premier président élu depuis le putsch de 88.

Le nouveau gouvernement démocratique, que les observateurs désignent comme une “mascarade” du régime, semble tout de même enclin a opérer une transition démocratique, notamment suite à sa victoire et celle de son parti aux élections législatives de 2012. Son parti la LND en gagnant les élections de 2015 remplace le gouvernement précédent. Et bien que ne pouvant être présidente, Aung San Suu Kyi dirige de facto le pays par les multiples postes ministériels et législatifs qu’elle occupe depuis 2015 et par l’allégeance profonde que lui prête le nouveau président Htin Kyaw. 

Aung San Suu Kyi s’est battue et a été privée de liberté pendant plus de 20 ans ; années durant lesquelles elle n’a pas pu revoir ses enfants, ni son mari avant sa mort en 1999. Elle dirige aujourd’hui ce pays avec le même parti qui lui a valu les répressions du régimes précédent et reçoit enfin en 2012 le Prix Nobel de la Paix qu’on lui avait attribué en 1991. Un belle histoire qui se finit bien ? Comme Gandhi ? Comme Mandela ? Pas vraiment…

Aung San Suu Kyi

La destruction progressive d’un peuple

A l’ouest du pays, sur le plateau d’Arankas vit depuis plusieurs siècles une ethnie musulmane : les Rohingya. Actuellement cette population est considérée par l’ONU comme la plus persécutée dans le monde. 

Déjà au 18ème les portugais et birmans exploitent les Rohingya, dont les territoires sont annexés en 1784 par la Birmanie, et en font des esclaves. La colonisation anglaise libère provisoirement ces populations de ce joug. Ce qui fait que cette ethnie est favorable et fidèle aux troupes anglaises jusqu’à l’indépendance de la Birmanie en 1948. Pour cette raisons les Rohingya apparaissent pour des traîtres aux yeux des birmans qui recommencent à les persécuter entraînant alors d’importants mouvements d’émigration. Le régime autoritaire de 1988 endurcit la répression en retirant la citoyenneté à l’ensemble de la communauté ou en leur imposant des travaux forcés. Ce qui a pour effet d’accélérer les migrations. 

La situation s’est envenimée en 2012 avec des persécutions généralisées dans la région suite au viol et meurtre d’une bouddhiste. Soupçonnant un musulman d’être à l’origine du crime, des attaques monstrueusement violentes ont été menées contre des villages Rohingya. Lors de ces attaques, parfois même dirigées par des moines bouddhistes, les maisons sont incendiées, les habitants battus à mort, les femmes et jeunes filles violées et tuées. Rien qu’en 2012 plus de deux cent morts et une centaine de milliers de Rohingya parqués dans des camps de réfugiés sont décomptés. 

En 2016 la situation devient intenable et des groupes de résistance Rohingya se forment pour se défendre et exiger un changement. La migration devient plus intense, augmentant la tension à la frontière avec le Bangladesh. L’Etat birman commence donc à réprimer les révoltes, et le Bangladesh filtre de plus en plus la migration et imagine même fermer complètement la frontière. La situation prend une tournure géopolitique et diplomatique, le haut commissariat aux réfugiés des Nations Unies s’en inquiète et alarme la communauté internationale sur le sérieux du problème. 

Ce sont ces récemment évènements auxquels le gouvernement du Myanmar prend part que l’ONU qualifie de génocide. Les chiffres sont effrayants, plus de 740 000 Rohingya réfugiés au Bangladesh et 600 000 encore sur place sont sérieusement menacés. Depuis 2016, plus de 34 000 musulmans qui seraient morts dans ce génocide. Le traitement des réfugiés par les autorités bangladaises et birmanes est accusé de violer les droits de l’homme. 

 

Une responsabilité de facto

Aung San Suu Kyi dirigeante de facto du pays est donc directement incriminée dans le traitement de la crise par les Nations Unies et de nombreuses ONG. La situation est extrêmement grave et la ministre des affaires étrangères refuse d’y voir une quelconque responsabilité de l’Etat et encore moins un génocide. Son déni et révisionnisme s’appuie sur le fait que la situation est “complexe” ou encore que la situation est le résultat des “terroristes” (L’Armée du salut des Rohingya de l’Arakan). Comme elle avait pu affirmer à Erdogan en 2017 qu’elle se heurtait à “un iceberg de désinformation” orchestré par les terroristes.

Cet argument est intéressant quand l’on sait que la Birmanie a un accès particulièrement faible à Internet, notamment dans les populations Rohingya pour qui cet accès est restreint et bloqué en Myanmar ou dans les camp du Bangladesh, et enfin quand les musulmans sont ostracisés de tous lieux d’influence et ce en particulier depuis que le parti de Suu Kyi occupe le parlement. Suu Kyi a refusé de réagir en 2012 de peur “d’attiser le feu”.  Non seulement elle a refusé ne serait-ce que de reconnaître qu’un massacre avait lieu, mais cette dernière a également évincé les musulmans du pouvoir.

Et maintenant que les autorités sont pleinement impliquées dans la gestion de la crise et participent aux massacres, la ministre birmane fait preuve de la même légèreté. La froideur criminelle d’Aung San Suu Kyi lui a valu de perdre certains titres honorifiques comme celui  d’ambassadrice de conscience d’Amnesty ou celui de citoyenne d’honneur de la ville de Paris. Comment peut-elle être encore Prix Nobel de la Paix ? 

 

Qu’en penser ? 

Réalisez-vous l’horreur de la situation ? Cette femme applique les mêmes stratégies autoritaires et fait usage de la même rhétorique que le régime qu’elle a combattu pendant plusieurs décennies. 

Quelle démocratie est-ce ici ? En finir avec les musulmans parce qu’ils dérangent la majorité. Il est fort probable que la démocratie qui aura été au coeur de son combat montre aujourd’hui son pire visage. Celui qu’avait prophétisé Tocqueville : la dictature de la majorité. Laisser le peuple massacrer si tel est son désir majoritaire. Cela est d’autant plus facile quand la cible est une minorité à laquelle on a retiré la citoyenneté. Ah si l’on avait su que le Prix Nobel de la Paix récompenserait le combat pour une démocratie clientélisme. Quoique… avec certains autres lauréats on aurait pu s’en méfier. 

La question est donc de savoir comment une icône de la liberté, finalement au pouvoir est à l’initiative d’un des génocides les plus alarmants de cette décennie. S’il est difficile de savoir la finalité profonde d’Aung San Suu Kyi, il est une certitude qui mérite d’être rappelée : le pouvoir corrompt. Alain déjà rappelait qu’il n’existe pas d’anatomie du tyran :

 

“Combien d’hommes m’ont déçu! Combien d’amis, même ! On pourrait dire que tous les amis de la paix ont trahi. Mais c’est mal parler. Regardez bien; ils se sont orientés selon le pouvoir qu’ils avaient; tout commandement est guerre, par l’attitude, par l’entraînement, par le son de la voix. Mais revenons aux individus. Si je déshabille un général, je trouve un homme; et quand je le disséquerais, et quand nous serions mille fois plus savants que nous ne sommes, je suis sûr que nous ne trouverons en sa structure aucune fibre, ni aucune bosse, ni aucun composé chimique, qui soient spécialement militaires. En cet animal étalé ici et ouvert comme un livre sur la planche à disséquer, j’aperçois le mécanisme de la peur, qui consiste en ceci que tous les muscles, à la première alerte, se tendent, se contrarient, renvoient le sang au ventre, étranglent la vie” –  Alain, Propos sur les pouvoirs, Éléments d’éthique politique, Paris, Gallimard,1985. p 36-37

 

Cela n’arrange pas, du reste, mon problème de colère. Mais bon, du moment que celle-ci ne s’exprime qu’à l’occasion du dessin de la quinzaine, ça devrait aller. 

A dans deux semaines pour un nouveau coup de gueule !

 

PS, Allez-voir :

  • les publications des Nations Unis sur le sujet : https://news.un.org/fr/tags/rohingyas. 
  • Le compte-rendu du 5 décembre d’une séance du Conseil pour les Droits de l’Homme de l’ONU : https://www.ohchr.org/EN/NewsEvents/Pages/DisplayNews.aspx?NewsID=22491&LangID=E
  • Le son incroyable de Médine sur les Rohingya : https://www.youtube.com/watch?v=GH1cOFInMuw
20 décembre 2019 0 commentaire
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Haïti : l’île des oubliés

par Tibovski 6 décembre 2019
écrit par Tibovski
HAÏTI : L’ÎLE DES OUBLIÉS

Haïti : l’île des oubliés

Haïti : l’île des oubliés

Voici le premier dessin de la quinzaine qui vous est proposé. Ce dessin illustre parfaitement, à mon sens, la façon dont je conçois BSF et ma contribution bi-mensuelle. Car il est ici question d’alerter aux sujet des oubliés de ce monde. D’importants mouvements sociaux fleurissent aujourd’hui aux quatre coins de la planète. Et si vous n’avez pu passer à côté des étudiants de Hong-Kong, des révoltes tranquilles au Liban et en Algérie, des contestations urbaines atrocement réprimées au Chili, en Iran et en Irak…

Le cas d’Haïti est lui pourtant passé inaperçu. Haïti connaît actuellement la crise politique la plus grave de cette décennie. Pourtant presque aucun média occidental ne relaye précisément la situation alors que l’AFP fait son travail en en informant les journalistes français. 

Qu’est-ce qui peut justifier une telle différence de traitement ? La temporalité ? Les haïtiens sont dans la rue depuis plus d’un an, soit comme les gilets jaunes en France. La gravité ? Ce pays est sans gouvernement légitime depuis sept mois, tous les services publics sont fermés (dont les hôpitaux devant lesquels agonisent les victimes de cette instabilité), l’armée ainsi qu’un député tirent sur la foule (et cela bien plus librement qu’à Hong-Kong), la mafia est utilisée comme arme de répression contre les rébellions.

Il est donc plus que difficile de comprendre et d’expliquer un tel silence, d’où la surprise et l’indignation de l’écrivain Lyonel Trouillot. Mais des questions se posent. Haïti, trop souvent dépeint pour son extrême misère et les ouragans qui le frappent, ne mérite donc pas qu’on s’en intéresse autrement que pour vendre des singles, faire de la promotion chez Franprix ou pour revenir l’image des stars du showbusiness ? Quand ils n’ont rien à perdre, leur situation indiffère. Il y a donc des luttes qui valent plus que d’autres, comme il y a certainement des existences qui valent plus que d’autres. 

Bonne quinzaine à vous !

P.S. Je vous conseille tout de même d’aller vous informer auprès des rares articles traitant de la question, comme sur Mediapart. Ou encore d’aller lire la tribune de Lyonel Trouillot pour l’Humanité. 

6 décembre 2019 2 commentaires
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Cependant, la modernité — ou selon les mots de l'auteur, le Nouveau Monde — ne laissera pas Diam Welly indemne puisqu'elle le fera résolument s'engager dans une nouvelle ère de mutations affectant les moeurs, la moralité, les codes et conduites favorisant, ipso facto, l'émergence d'individus — comme Sellou, faisant la cour à l'épouse de Karamokho alors absent — gouvernés par la satisfaction de leur plaisir et de leurs intérêts personnels.
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Persepolis • Iran • 2016
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- Visage d'une jeunesse iranienne - . La Carte Bla - Visage d'une jeunesse iranienne -
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Persepolis • Iran • 2016
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Kol Ukok, Kirghizistan, 2015.
Traditionnellement, la yourte est ouverte vers le sud par une entrée unique. A l'intérieure, l’espace est quadrillé selon un usage précis. Le sud et l’est de la yourte sont l’espace de la femme où se trouvent le foyer et la place de travail. L’espace de l’ouest est réservé à l’homme et aux invités. Cette photo est révélatrice : dirigée vers le sud, c’est la femme qui se dévoile, à sa place comme l’admet la tradition
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Le comédien ET metteur en scène Michaël Benoit Delfini
 t’aide à te lancer avec ce texte burlesque digne d'un @borisvian_officiel !
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[CULTURE] - Déjà entendu parler des Bullshit j [CULTURE] - Déjà entendu parler des Bullshit jobs ? On doit l’expression à feu David Graeber 🔥
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Anthropologue ayant réhabilité l’anarchie ♾ Figure du mouvement Occupy Wall Street ♾ Ecrivain multi-récidiviste ♾ Les Sex Pistols n’ont qu’à bien se tenir ! 
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Dessin + article par l’audacieux @tibovski ✏️
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ARTICLE A RETROUVER (GRATUITEMENT) SUR NOTRE SITE (lien en bio)
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