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Voir, juger, agir.

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Bidonville

Voir, juger, agir. Aventures et mésaventures à travers le monde... 🌦
Romain Mailliu - 13 mois de volontariat en Indonésie

[Rencontre] – La communauté du bidonville de Kampung Sawah

par Romain Mailliu 6 novembre 2020
écrit par Romain Mailliu

Ces derniers mois, j’ai été un peu laxiste dans l’écriture de mon carnet de bord. Je reviens aujourd’hui avec des textes revisités qui étaient, à l’origine, destinés à mon travail et  à moi-même. Documenter la vie dans les bidonvilles d’Indonésie, voici quel était l’objectif de mon carnet de bord. Rentré depuis peu en France, mes réflexions ont été nourries par une prise de recule (et d’un début de confinement). Je vais tenter de vous en partager quelques unes à travers mes prochains articles.   


A travers cet article, je vous invite à vous plonger dans la communauté de Kampung Sawah, quartier pauvre dans le nord de Jakarta. Je réponds à la question suivante : Comment la communauté éclaire-t-elle nos journées ? 

Pour une mise en contexte, direction mon article Bienvenue à Cilincing !

La communauté, je l’observe depuis ma fenêtre. Deux enfants assis sur un sofa en bois sont captivés par l’écran d’un smartphone qui brille dans leurs yeux. Il est 18h, l’appel à la prière résonne et les rues sont vides. En pleine période de ramadan, il me semble que c’est l’heure de la rupture du jeûne. Le soleil ne brille plus dans le ciel et les quelques éléments décousus de ma pseudo-culture générale m’indiquent qu’il est temps pour mes compères musulmans de se remplir l’estomac.

Personne déjeunant convivialement dans la rue

Restaurant ambulant © Romain Mailliu

 

Le jazz et la java 

Mon ONG LP4Y m’a demandé d’écrire sur la communauté avec laquelle nous vivons à Kampung Sawah. Comment éclaire-t-elle ma journée ? Si l’on part du principe que le muezzin en fait partie, il aurait plutôt tendance à faire tomber la pluie qu’à briller comme le soleil un matin d’hiver. Jour et nuit, les prières se succèdent et le potentiomètre du volume de son dictaphone s’apparente à un interrupteur. On : c’est tellement fort qu’à tout moment je l’imagine me taper sur l’épaule pour que je lise une sourate. Off : on souffle un peu avant la prochaine performance.

La République d’Indonésie, quatrième pays le plus peuplé du monde avec 264 millions d’habitants répartis sur environ 13 000 îles, est, devant l’Inde et le Pakistan, le premier pays à majorité musulmane pour le nombre de croyants. Alors les mosquées parsèment les rues comme les églises à Rome. Et comme la ville s’étend, encore et toujours, les mosquées aussi. Il est d’ailleurs fréquent de croiser dans les ruelles des collectes pour la construction d’une nouvelle mosquée.

En Europe, nous avons les cloches ; en Indonésie, c’est l’appel à la prière, l’adhan, qui rythme les journées. Le muezzin lance l’adoration depuis la mosquée pour annoncer les célébrations. Selon la tradition musulmane, l’adhan a lieu 5 fois par jour : à l’aube (Fajr), au milieu de la journée, lorsque le soleil est à son zénith (Dhohr), au milieu de l’après-midi (Asr), au crépuscule (Maghreb) et au soir (Ichâ).

Égoïste, je m’isole des louanges qui réunissent les foules, branche mon casque insonorisant sur mes oreilles et lance un concert du guitariste de jazz Joe Pass. Certains prétendent que le jazz est de la musique d’ascenseur. Il faut croire que Elisha Graves Otis, fondateur de la marque qui porte son nom, avait meilleur goût qu’une ribambelle de radios décrépites. Otis Elevator a fait de cette musique une référence pour rendre l’atmosphère supportable dans une cage en acier suspendu où des inconnus n’ont d’autre choix que de s’éviter du regard. Jazz, musique magique : laissez-moi vivre dans un ascenseur.

Enfant marchant dans la rue du bidonville

La sortie de la mosquée – © Romain Mailliu

 

Le Jockey-club 

La communauté est pour moi un étalon. Alors non, n’imaginez pas un pur-sang mongolien qui galope à toutes pattes autour de l’hippodrome Longchamp. Je vous parle ici d’un référentiel (un étalon est une grandeur donnée, avec une valeur déterminée et une incertitude de mesure associée, utilisée comme référence – Le petit Robert). La communauté à ce pouvoir de nous donner les « clés » pour comprendre les jeunes que nous accompagnons (par ici pour en savoir plus sur mon travail) tout en nous rappelant avec simplicité que nous ne sommes pas du même monde. Alors bien sûr, il n’y a qu’un monde : celui des gens qui s’aiment. N’allez pas me faire dire le contraire. Mais croire qu’en vivant quelque temps dans les bidonvilles, en apprenant les mots de nos pays d’accueil, nous finissons par nous intégrer et disparaître dans la masse, c’est faux. Et cette impossibilité de jouer les hommes invisibles nous donne une force insoupçonnée : nous sommes pour la communauté une fenêtre vers une autre réalité et toutes les opportunités qu’elle représente.  Il y a en a des plus ou moins intéressantes, bonnes ou moins bonnes, mais le bien et le mal c’est assez subjectif, ne rentrons pas dans ces considérations. Je dirais que nous avons comme mission d’opter pour les convenances que nous jugeons les plus bénéfiques.

Pour ajouter un peu de concret à ce texte, nous organisons par exemple à Kampung Sawah, en plus de notre travail avec les jeunes, des futsals ou encore des soirées cinémas ouverts à tous. Nous sommes invités aux mariages. Comme on dit dans le monde des affaires – mais combien y a-t-il de monde ?!- c’est WIN WIN.

Mariés pendant la célébration

Mariage de Engkus et Fikri © Romain Mailliu

 

Together we Marvel

Comment la communauté éclaire-t-elle nos journées ? J’ai l’impression que je suis en train de prendre la question à contresens. On rembobine. Les lumières, ses lumières, elles sont visibles, presque évidentes, et c’est bien leurs caractéristiques principales : elles nous éclairent et on les repère de loin. Ce sont les sourires, la joie de vivre permanente, la résilience et la générosité. Alors qu’en Europe – ou plutôt en France, ou plutôt à Paris, ou plutôt dans la ligne 13 le lundi matin – nous avons tendance à râler pour un rien et à transformer nos mésaventures en cataclysme, des femmes et des hommes qui ne possèdent rien nous lancent des sourires aussi grands que l’Asie et l’Europe réunies.  

Tous les voyageurs qui ont connu l’Asie de l’Est sont unanimes : la gentillesse et les sourires sont partout. Il y a parfois de la générosité à des fins commerciales. Je ne vous fais pas de dessin, vous êtes certainement meilleurs vendeurs que moi. Mais c’est nettement moins le cas que dans beaucoup de pays en développement dans lesquels le tourisme est une source économique qui nourrit des milliers de familles. Ce qui est d’autant plus étrange, c’est que la générosité s’accentue dans les quartiers pauvres. 

Pourquoi ? Car les étrangers – touristes ou expatriés – y vont très peu ? Car il n’y a pas cette conception du touriste “portefeuille” ? Car la joie est une vertu qu’on apprend à cultiver dans un environnement difficile, prédestiné dans l’imaginaire collectif, à la tristesse. Comment expliquer que dans les bidonvilles, des enfants, qui vous détectent à 200 mètres, se mettent à courir vers vous, sourire dévorant, pour le simple plaisir de rencontrer et de jouer ? Que des familles que vous n’avez jamais vu vous invitent à manger et vous préparent un festin ? Je ne sais pas. 

Je dois même vous avouer que, quand je laisse l’émotion voiler la réflexion,  ces sourires, j’aimerai parfois les voir remplacer par des grimaces de colère, de tristesse, comme l’expression d’une volonté de vouloir changer les choses, crier STOP ! C’est pour moi le sourire d’un peuple qui accepte son destin.

Joueurs d'échec sur fond bleu

Le mat du berger – © Romain Mailliu

Utopiste que je suis, imbécile, aveugle, sourd, ce sourire est pourtant la preuve que la joie est plus forte que tout. C’est le sourire de la compassion et du pardon, la sagesse qu’il faut pour accepter le fait que nous ne maîtrisons pas tous les éléments, que nous ne sommes pas les acteurs tout puissants de notre propre film. Et ça, du haut de mes 24 ans, j’ai du mal à le concevoir et encore plus à l’accepter. Je pense encore qu’à force de persévérance, de rêves, et de volonté, on peut garder la main sur son destin.

“La joie est bien plus grande que le bonheur. Alors que le bonheur est souvent dépendant de facteurs extérieurs, la joie ne l’est pas.” Le Dalaï-Lama et l’Archevêque Tutu – Les piliers de la joie

Pour conclure, la communauté du bidonville est donc un collectif de Super-héros qui nous aide à affronter les coups de mou et nous ouvre les yeux sur notre ignorance des choses essentielles à la vie. Et cela en toute simplicité : loin d’être moralisatrice, elle continue de vivre la vie qu’elle a toujours connu.

Romain Mailliu

Trois femmes discutant et riant sur un banc

Héroines en tenue – © Romain Mailliu

6 novembre 2020 7 commentaires
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Romain Mailliu - 13 mois de volontariat en Indonésie

4 solutions miracles pour motiver votre équipe

par Romain Mailliu 29 mai 2020
écrit par Romain Mailliu
LP4Y

 

Comment motiver votre équipe sur le terrain après le confinement ? A l’aide de ce cas d’étude tiré de mon expérience sur le terrain en Indonésie avec l’ONG LP4Y, je vais vous partager 4 solutions aussi miraculeuses qu’efficaces. 

Cet article est une fin alternative à mon précédent papier Another Sunny Day in Jakarta (le 29 avril 2020). 

 

4 solutions miracles pour motiver votre équipe en temps de crise. 27 mai  2020 

“Coach, can I have money to buy Gasoliiiiiiine ?”

 Les jeunes ont cette faculté – sagesse ? – de nous ramener à des problématiques pragmatiques. Ce matin, ils sont cinq à assurer la livraison d’eau potable. Cinq, car c’est le nombre maximum autorisé par le gouvernement. David Allen aurait certainement complété en expliquant qu’un homme efficace en vaut cinq.

 Je rajouterais que cinq hommes non efficaces n’en valent pas beaucoup plus. Si ce matin la motivation des jeunes était un rayon de soleil, le risque d’attraper une insolation serait dérisoire.

Il faut dire qu’à leur âge, dix-huit ans en moyenne, je n’avais pas besoin d’obtenir un travail décent pour nourrir ma famille. Si on ajoute à cela les écoles fermées et la dysphorie générale autour du coronavirus, je comprends pourquoi le lundi matin les chaussures des jeunes poncent le carrelage de la salle de production. Pourtant il n’est pas question de ralentir l’activité.

 Dans le monde professionnel qui les attend, ils ne feront pas office de cas à part :  les attentes seront les mêmes pour tous. Les diplômés de l’université issue des classes sociales aisées comme nos entrepreneurs des quartiers plus modestes. Ils ne seront pas pris en pitié car ils doivent faire deux heures de route dans les transports en commun pour venir travailler. Ni parce qu’ils n’ont qu’une paire de chaussures « professionnelles ». Seules la qualité du travail, la posture et la motivation feront la différence. La route du succès est semée d’embûches. Depuis toujours, nos jeunes entrepreneurs affrontent les difficultés avec un courage, un positivisme et une détermination qui à mes yeux est inexplicable. C’est leur plus grande force et c’est pour cela qu’ils y arriveront. Encore. Toujours. 

 

LP4Y

Setia et Wahab en livraison d’eau potable (28/11/19) – © Romain Mailliu

 

Bref, comment vais-je bien pouvoir motiver mon équipe ? A l’aide de mon expérience internationale en gestion d’équipes distributives agiles pluridisciplinaires en temps de crise, je vais vous partager 4 best practices qui ont fait le succès de ma méthode à travers le monde. 

 

1. Etre à l’écoute 

 

 “Celui qui sait écouter deviendra celui qu’on écoute.”

 Vizir Ptahhotep

 

 L’histoire d’un pays permet de comprendre sa culture. L’histoire d’un jeune nous aide à comprendre son attitude. Comment pouvons-nous résoudre les problématiques de nos équipes si nous n’échangeons pas avec elles ? Nos jeunes, il s’avère que très peu de monde s’intéresse à eux. C’est d’ailleurs ce qu’on appelle l’exclusion : ne pas exister aux yeux des autres. Ecouter nos jeunes c’est primordial. Il faut que l’écoute soit active. Pour cela, la volonté d’apprendre est indispensable. Les bonnes paroles sont celles qui se transforment en enseignement et les jeunes ont beaucoup à nous apprendre. 

 Lorsque nous devons faire face à une problématique, les informations sont rarement structurées. Un sujet est mis sur la table, quelqu’un n’est pas d’accord, il s’exprime sur un nouveau sujet, ce qui entraîne de nouvelles réactions, et quand on revient finalement au sujet d’origine, beaucoup de choses ont été dites. Quand on a récolté les informations qui sont les fruits de l’écoute, il faut ensuite les analyser. Analyser, c’est décomposer un tout en ses éléments constituants et en établir les relations. 

 Dans un défi complexe – comme motiver une équipe –  il y a rarement des évidences, il a quelquefois des incertitudes, il y a toujours des compromis. C’est en analysant et en écoutant qu’on se donne les chances de réaliser les bons compromis. Ecouter, c’est prendre le temps de préparer un cadre pour recentrer le débat.  On peut ensuite prendre la parole et être écouté.

Mais parfois, l’analyse logique, mathématique et scientifique ne suffisent pas. Bien que l’on dispose d’une multitude de données, aucune solution ou tendance ne semble vouloir se profiler. Il semble manquer en élément dans cette équation complexe qui nous permet de résoudre des problèmes, d’autant plus que ceux-ci concernent le management. Cet élément, c’est l’empathie.

 

2. faire preuve d’empathie et de bon sens

 

«Toute prédiction est un ressenti du futur, par empathie du présent de son passé.»

Serge Zeller

 

L’empathie est une simulation mentale de la subjectivité d’autrui. C’est la capacité de s’identifier à l’autre dans ce qu’il ressent. Celle-ci permet d’anticiper – plus ou moins –  les réactions humaines, et s’avère donc un outil utile quand il s’agit de motiver une équipe. 

 L’empathie permet aussi de faciliter les échanges. En management, les présentations sont omniprésentes. Training, ateliers, briefing : la façon d’annoncer les choses à une importance capitale. Faire preuve d’empathie permet d’adapter son discours à la situation et d’avoir « le mot juste ».

 Il m’est arrivé pendant ma mission de coach – qui n’est d’ailleurs pas terminée – de faire face à des retournements de situations inattendues. L’empathie a permis d’accompagner les jeunes, et de contrôler leurs réactions, qui aurait pu être négative si nous avions exposé les faits sans écoute et sans empathie.

 L’empathie permet l’offensive à travers un bon sens critique. En temps que coach – et également dans la vie – il faut toujours garder un bon sens critique. Il ne faut pas faire l’erreur d’accepter les évidences de premier abord. Le bon sens c’est prendre du recul et examiner un sujet dans sa globalité. L’empathie associée à l’analyse et à l’écoute permet en quelque sorte une EXTREME lucidité. 

 

3. Intégrer et responsabiliser chaque membre de l’équipe au projet

 

“Parce que c’est notre projet !”  

Emmanuel Macron

 

Catalyseurs, et tout particulièrement coaches, nous ne sommes pas des petits chefs d’entreprises tyranniques amoureux des résultats net exponentiels et du pouvoir jouissif d’une équipe qui nous obéit, des étoiles dans les yeux. Si vous voulez mon sentiment, un bon coach doit pouvoir disparaître sans que son équipe et l’activité qu’elle dirige ne subissent une quelconque perturbation. Nous sommes des oiseaux de passage. La motivation des jeunes ne doit surtout pas dépendre exclusivement de nous. Pour cela, il est de notre devoir de leur faire comprendre l’importance d’être l’acteur principal dans le film de leur propre vie. 

Pour prendre part à un projet et s’identifier à son objectif, il faut y être intégré dans l’idéal de sa conception à sa réalisation. Il faut pouvoir s’assimiler à lui. Alors sur le court terme cela prend plus de temps. Pour vous donner un exemple pragmatique – ce qui n’est pas ma spécialité vous l’aurez remarqué – nous devons acheter avec mon équipe en Indonésie une nouvelle moto avec un chariot à l’arrière pour effectuer nos livraisons. Je pourrai faire un rapide benchmark sur internet, présenter mes résultats au département finance de LP4Y et acheter cette moto avant la fin de la semaine. Les jeunes la verront un matin dans l’entrée, comme un cadeau de LP4Y. “Thank You Coach !” Cela serait rapide mais n’aurait aucune valeur ajoutée dans la formation de nos jeunes.  

Pour chaque projet, j’essaie de partir de la racine du problème afin de challenger les jeunes pour qu’ils trouvent ensemble des solutions. Dans mon histoire de moto, la partie financière fut particulièrement intéressante car notre atelier a permis de dégager des solutions que je n’avais pas imaginé. “Comment allons-nous faire pour acheter une nouvelle moto ? Nous allons vendre plus de gallons ! Comment ? En trouvant plus de clients ! Comment ? En travaillant avec des entreprises ! Comment ? En leurs vendant des grandes quantités de  gallons ! Comment ? Avec la nouvelle moto qui permet de livrer une dizaine de  gallons en même temps !” VICTOIRE ! La moto est devenue un vrai besoin qui s’intègre dans un projet défi par les jeunes. 

 

4. La rigueur

 

«La rigueur vient toujours à bout de l’obstacle.»

Léonard de Vinci

 

On peut vous reprocher de ne pas savoir quelque chose, on ne peut pas vous reprocher de manquer de rigueur. La rigueur est primordiale quand prend en main n’importe quel défi. Lorsque l’on doit motiver une équipe, et que l’on ne connaît pas encore tous les pourquoi-du-comment, la seule carte en main pour montrer sa crédibilité est la rigueur. Etre rigoureux, c’est être exact, logique et inflexible. C’est cette rigueur qui permettra ensuite de comprendre les problématiques des jeunes, leurs contraintes et pourquoi la motivation n’est pas au rendez-vous ce matin. 

La rigueur impacte la forme, le fond, s’applique à toutes choses . c’est la clé pour concilier efficacité, efficience et fiabilité !  

 

La journée se termine et 43 gallons d’eau potable ont été livré dans le bidonville. Les jeunes sont fiers : ils partagent le sentiment du devoir accompli. Ils me demandent de prendre une photo, petit rituel que nous avons établi pour élire la meilleure équipe du jour qui est toujours la même : Celle que forment tous les jeunes réunis ! 

 

LP4Y

La meilleure équipe du jour (Depol, Taufan, Bila, Jeremia) – © Romain Mailliu

 

Photo de couverture : Dani et Angel  on delivery (28/11/19)  – © Romain Mailliu

29 mai 2020 1 commentaire
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ActualitéCarnet de voyageRomain Mailliu - 13 mois de volontariat en Indonésie

Le jeûne éternel

par Romain Mailliu 13 mai 2020
écrit par Romain Mailliu
Enfant dans les rues de Kampung Sawah (mars 2020) - © Romain Mailliu

 

À Kampung Sawah, le danger numéro un n’a pas changé et il est partagé par bonne partie de l’humanité. Le coronavirus ? Non. La baisse de l’immobilier ? Non. Un tweet borderline d’Elon Musk qui ferait chuter l’indice Tesla ? Non plus. C’est de ne rien avoir pour remplir son assiette.

La crise sanitaire mondiale menace Kampung Sawah, le bidonville indonésien de Romain. Suivez avec son carnet de bord l’impact du Coronavirus dans les quartiers les plus pauvres. [Chapitre 4]

 

Le jeûne éternel. Le 4 mai 2020

 Des enfants rient dans les rues. Le soleil se couche sur Kampung Sawah, bidonville du nord de Jakarta, situé entre une zone de dépôt de conteneurs et une pseudo-autoroute. Un bidonville est un quartier qui n’existe pas. Aucun des vingt mille habitants n’y a un quelconque droit de propriété. Ils se sont attribués cette espace, car il faut bien habiter quelque part. C’est une zone inondable, alors il arrive parfois que les nuits soient tristes et courtes. Mais le soleil finit toujours par sécher les larmes. Avec le temps, maintenant quarante ans, Kampung Sawah s’est fait un nom, et on a tracé ses frontières sur les cartes.

 Le pak RW, une bâtisse en béton situé dans l’angle du carrefour principal, fait office de mairie. C’est l’œil du gouvernement qui observe et documente les évolutions de cette ville qu’il faudra déconstruire un jour. Il y a déjà trois ans, quelques habitants, prophètes de l’apocalypse, criaient à qui voulait l’entendre qu’une avenue viendrait remplacer ce quartier marginal. Aujourd’hui, les fondations d’un pont se dessinent à l’horizon. Il doit relier le dépôt à l’autoroute. Le temps donne toujours raison aux prophètes. 

 

Kampung Sawah

Les conteneurs qui bordent Kampung Sawah (Avril 2020)  – © Romain Mailliu

 

Dans ce lieu coupé du monde, le coronavirus n’existe pas. C’est une légende qu’on voit passer sur les réseaux sociaux, comme les footballeurs qui collectionnent les voitures de sport ou les actrices qui défilent avec de luxueuses robes sur des tapis rouges. Pourtant, l’Indonésie est touchée – moins que nos pays occidentaux ce que je n’explique pas – et au 4 mai 2020, 12 071 cas ont été confirmés pour 872 décès. La population indonésienne réunit 267,7 millions d’habitants. Alors dans une économie au ralentie qui licencie à tour de bras sans compensation, le risque de mourir de faim est supérieur à celui d’attraper un Covid-19 virulent. 

À Kampung Sawah, le danger numéro un n’a pas changé et il est partagé par bonne partie de l’humanité. Le coronavirus ? Non. La baisse de l’immobilier ? Non. Un tweet borderline d’Elon Musk qui ferait chuter l’indice Tesla ? Non plus. C’est de ne rien avoir pour remplir son assiette. La famine. Catastrophe fatidique quand on ne gagne ou qu’on ne produit pas assez pour se nourrir. La bonne fortune n’est pas contagieuse.

L’Indonésie a fait le choix de ne pas mettre en place de quarantaine et cela a sans aucun doute limité la famine dans les quartiers les plus pauvres. Il n’y a pas de bonne pensée manichéenne.

 Alors je constate que porter un masque, rester chez soi, respecter les distances barrières, sont des comportements dérisoires pour les habitants de notre village clandestin. Pourtant, les campagnes de sensibilisation font rage et sur tous les supports. A-t-on trouvé une fin utile à l’utilisation des réseaux sociaux ? Peut-être, si nous mettons de côté les fakes news, toujours plus nombreuses, qui viennent noircir un tableau déjà ténébreux. 

Dans les ruelles, des « Corona » raisonnent, prononcées rapidement, dans un souffle, comme on dirait une vulgarité. Puis ce mot international, synonyme de danger, qui a le pouvoir d’unir les nations comme de les cloisonner, est toujours suivi d’un éclat de rire.  

 

Petite fille résidante à Kampung Sawah (Avril 2020)  - © Romain Mailliu

Petite fille résidante à Kampung Sawah (Avril 2020)  – © Romain Mailliu

 

Et le pouvoir législatif dans tout cela ? Respecter les règles sanitaires, c’est se donner les chances de maîtriser le virus rapidement, pour relancer l’économie, pour relancer la politique, pour la SURVIE de la nation ! Il me semble qu’un amendement a été mis en place obligeant le port du masque dans les rues mais, à Kampung Sawah, il y a plus de fantômes que d’agents en képi pour faire respecter les lois. Peut-être que la police souhaite éviter la situation embarrassante de verbaliser une mère qui n’a déjà pas assez d’argent pour nourrir ses enfants…

À quoi bon parler de SURVIE à des familles qui, depuis toujours, n’ont d’autre combat que de trouver de la nourriture et un toit pour vivre un jour de plus.

 Des enfants rient dans les rues. Le soleil se couche sur Kampung Sawah, bidonville du nord de Jakarta, situé entre une zone de dépôt de conteneurs et une pseudo-autoroute. Le ramadan y a débuté depuis plus d’une semaine et les inondations ont laissé place à une chaleur ardente et sèche. L’appel à la prière se prolonge nuit et jour, solennellement, comme les loups hurlent à la lune, comme les baleines chantent aux abîmes. Depuis mon arrivée il y a huit mois dans cette communauté exclue du monde – ou plutôt exclue d’un monde – je n’ai jamais vu autant d’enfants jouer ensembles. Les mosquées sont pleines et les sourires, qu’aucun masque ne vient effacer, se dessinent sur tous les visages. Les festins nocturnes perdurent et bien que le riz prenne de plus en plus de place dans l’assiette, les familles se réunissent pour célébrer ensemble la fin du jeûne.

 

L’amour d’une famille, le centre autour duquel tout gravite et tout brille.

Victor Hugo  ; Les chants du crépuscule, A mademoiselle Louise B. (1834).

 

Enfants dans les rues de Kampung Sawah (mars 2020)  - © Romain Mailliu

Enfants dans les rues de Kampung Sawah (mars 2020) – © Romain Mailliu

 

Découvrir le chapitre précédent : Another Sunny Day in Jakarta →

Photo de couverture : Enfant dans les rues de Kampung Sawah (mars 2020)  – © Romain Mailliu

13 mai 2020 1 commentaire
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ActualitéCarnet de voyageRomain Mailliu - 13 mois de volontariat en Indonésie

Another Sunny Day in Jakarta

par Romain Mailliu 29 avril 2020
écrit par Romain Mailliu
Jeune LP4Y

Les jeunes ont cette faculté – sagesse ? – de nous ramener à des problématiques plus pragmatiques.

La crise sanitaire mondiale menace Kampung Sawah, le bidonville indonésien de Romain. Suivez avec son carnet de bord l’impact du Coronavirus dans les quartiers les plus pauvres. [Chapitre 3]

 

Another Sunny Day. Le 12 avril 2020

 Pas de réveil programmé ce dimanche matin. C’est peu habituel car les premières heures du jour sont pour moi les plus belles. Pas question de les manquer. Quand la ville se met en route, pas à pas. Que les visages endormis s’offrent aux premiers rayons de soleil. Seuls les oiseaux chantent, et c’est assez. La température est agréable : 22 C° et un courant d’air marin vient caresser ma peau qui frissonne de plaisir.  

Mes yeux s’ouvrent naturellement à 8h30. C’est suffisamment tôt pour décréter que la journée reste exploitable. Je casse deux œufs dans une poêle. Jean-Marc, ou plutôt John – les Asiatiques n’arrivent pas à articuler et retenir son prénom administratif – frictionne nerveusement la pâte à pain faite aux premières lueurs du jour. 

« Ce matin, j’ai reçu une photo d’une jeune des Philippines. Une cuillère remplie d’une eau blanchâtre. C’est l’eau salée dans laquelle elle fait cuire le riz. Il ne lui reste plus que ça pour nourrir son bébé. Elle a vingt-deux ans et trois enfants. Son aîné a sept ans… Avec le confinement, elle n’arrive pas à quitter son bidonville pour rejoindre notre centre. L’équipe de Manille est sur le coup, nous allons trouver une solution. »

La misère ne prend pas de week-ends. Des réveils comme celui-ci, John doit en connaître plusieurs fois par an. Depuis 10 ans, son ONG LP4Y a accompagné 2 662 jeunes vers le monde professionnel décent. Pourtant, aujourd’hui la situation est exceptionnelle. Les Jeunes et leur famille sont les plus affectés par les conséquences de cette crise sanitaire et économique mondiale. Et derrière ces chiffres il y a des visages, des noms, et des messages qui exhument le poids de nos responsabilités.

 

LP4Y

L’équipe de Source Of Life, notre programme de vente d’eau potable (Janvier 2020) –
© Romain Mailliu

 

« Être adulte, c’est être seul », disait Jean Rostand. Au contraire, je pense qu’être adulte c’est prendre conscience de l’importance des autres. L’idée n’est pas toujours séduisante. Elle a même terrifié Jean-Paul Sartre avec sa célèbre phrase : « L’enfer, c’est les autres ». Il ajoute dans son essai l’Être et le Néant : « S’il y a un Autre, quel qu’il soit, où qu’il soit, quels que soient ses rapports avec moi… J’ai un dehors, j’ai une nature ; ma chute originelle c’est l’existence de l’autre ». Conclusion : Nous prenons conscience de la triste existence qui sera la nôtre quand nous découvrons que nous ne sommes pas seuls sur terre. C’est ça, l’âge adulte. Il va falloir apprendre à vivre ensemble : quel enfer ! Quand on observe les inégalités qui sont les mêmes partout dans le monde, on devine que nous n’avons pas tous adopté les mêmes règles de jeu. 

L’étudiant assidu que vous étiez en terminale – second rang : place idéale pour suivre la prestation de votre professeur de philosophie dépressif tout en évitant les postillons propulsés par l’effluve de son haleine caféine Marlboro – ajouterait que la liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres #Rousseau.  Décidément, pas facile de vivre ensemble.

 Pourtant, soyons honnêtes, les meilleurs moments que nous vivons sont ceux que nous partageons avec les autres. N’allez pas me dire que vous avez vécu l’extase un mercredi soir devant une série B avec votre Heineken dans la main droite et votre ordinateur portable Lenovo – PowerPoint ouvert sur la dernière slide de votre Comex du lendemain – dans la main gauche.

On peut connaître certains moments d’émerveillement seul : lors d’une balade matinale un dimanche matin à travers le marché Boulevard Vincent Auriol, en découvrant un nouveau clip de PLN le vendredi soir… Mais la joie ?  

je fixe mon ordinateur, le regard vide, mon reflet apparaît à l’écran. La matinée est déjà bien avancée. Excepté l’écriture de mes états d’âme et l’écoute léonine du nouvel album des Strokes, je n’ai pas fait grand-chose. À ma gauche Fanette somnole sur la terrasse, à ma droite la panthère des neiges de Tesson bronze au soleil. La brise gonfle notre hamac qui prend l’allure d’un spi et je me surprends à rêver de croisières en voilier dans le Golfe du Morbihan. Fin de l’album des Strokes, Spotify déclenche la lecture aléatoire : Belle & Sebastien – Another Sunny Day. 

 

LP4Y

Vue de notre terrasse au lever du soleil – © Romain Mailliu

 

La route du succès est semée d’embûches. 15 avril 2020 

« Je vais rentrer en France. C’est terminé : j’arrête ma mission »

 Mardi, 10h23. J’ai l’impression que mon cerveau me rejoue une mauvaise scène. Pourtant, la semaine commençait bien. Un nouveau planning pour les jeunes, des mesures sanitaires plus crédibles du gouverneur de Jakarta, deux nouveaux commentaires sur mon précédent article et un demi-fruit de la passion dans le réfrigérateur. Seulement, le frisson dans mon dos déclenché par cette réplique sortie de nulle part me rappelle une baignade sous la pluie grasse d’Écosse – le long du West Highland Way après 35 kilomètres dilués aux singles malt – il y a de cela trois ans déjà.

Je n’ai jamais réussi à retenir plus de trente mots d’indonésien (bahasa) et pourtant ma cervelle me rappelle, avec une précision mesquine, mes barbotages dans les rivières caillouteuses quand Inès nous remet sa démission.

 

West Highland Way (Août 2016) - © Romain Mailliu

West Highland Way (Août 2016) – © Romain Mailliu

 

Grand silence. Inès. La plus solide des guerrières. Depuis qu’elle nous a rejoints avec John, elle n’a jamais décroché de son ordinateur. Vidéo Call avec les USA, tableau Excel pour évaluer les besoins des jeunes pendant la crise, WhatsApp pour répondre aux équipes d’Asie : une productivité à faire pâlir David Allen. Et pourtant, la voilà qui quitte le navire. Bordel. Depuis deux ans chez LP4Y, elle venait de commencer sa nouvelle mission. Coup dur pour LP4Y, coup dur pour notre nouvelle colocation, coup dur pour John. La vie n’est-elle donc qu’une mauvaise blague ? Je vais acheter des bières. Tous les discours du monde ne valent pas une pinte de houblon fraîche vers 19h, quand les obligations professionnelles laissent place au chant du muezzin. Inès. Je n’en reviens pas. Certes, elle avait montré quelques signes de fatigue mais j’étais loin de m’imaginer le dilemme qui devait se jouer dans sa tête. Entre deux lignes, il faut se rendre à l’évidence : ne perdons pas notre temps à imaginer ce qui se passe dans la tête des autres. C’est peine perdue. Concentrons-nous sur les méandres de nos âmes respectives, cela devrait suffire pour une vie ou deux.

Pourtant, après le départ de Sarah et l’arrivée de Inès et John, notre collocation avait pris un sens esthétique et culinaire plaisant. Avec l’aide d’un bocal de champignons caché dans le double fond de sa valise, John nous a cuisiné pour Pâques un poulet aux morilles. Bricoleur appliqué, il a construit avec quatres planches de bois et tout autant de clous deux étagères Philippe Starck. Il a également installé des guirlandes lumineuses sur la terrasse et bien qu’étant végétarien à mi-temps, m’a chargé d’acheter trois kilogrammes de rumsteck. Certains personnages dégagent une énergie similaire à deux noyaux atomiques qui s’assemblent. John en fait partie. Inès. Merde. Nous avions même commencé à discuter de rap français.

 

Photo de campagne pour notre levée de fond pour les jeunes  que nous accompagnons via un challenge de 24H de méditation (Avril 2020) - © Romain Mailliu

Photo de campagne pour notre levée de fond pour les jeunes  que nous accompagnons via un challenge de 24H de méditation (Avril 2020) – © Romain Mailliu

 

“Coach, can I have money to buy Gasoliiiiiiine ?”

Les jeunes ont cette faculté – sagesse ? – de nous ramener à des problématiques plus pragmatiques. Ce matin, ils sont cinq à assurer la livraison d’eau potable. Cinq, car c’est le nombre maximum autorisé par le gouvernement. David Allen aurait certainement complété en expliquant qu’un homme efficace en vaut cinq. Je rajouterais que cinq hommes non efficaces n’en valent pas beaucoup plus. Si ce matin la motivation des jeunes était un rayon de soleil, le risque d’attraper une insolation serait dérisoire.

Il faut dire qu’à leur âge, dix-huit ans en moyenne, j’étais plus appliqué dans l’étude subtile du mécanisme diablement ingénieux des épingles de soutien-gorges plutôt que par l’idée d’obtenir un travail décent pour nourrir ma famille. Si on ajoute à cela les écoles fermées et la dysphorie générale autour du coronavirus, je comprends pourquoi le lundi matin les chaussures des jeunes poncent le carrelage de la salle de production. Pourtant – et Inès aurait été d’accord – il n’est pas question de ralentir l’activité.

Dans le monde professionnel qui les attend, ils ne feront pas office de cas à part :  les attentes seront les mêmes pour tous. Les diplômés de l’université issue des classes sociales aisées comme nos entrepreneurs des quartiers plus modestes. Ils ne seront pas pris en pitié car ils doivent faire deux heures de route dans les transports en commun pour venir travailler. Ni parce qu’ils n’ont qu’une paire de chaussures « professionnelles ». Seules la qualité du travail, la posture et la motivation feront la différence. La route du succès est semée d’embûches. Depuis toujours, nos jeunes entrepreneurs affrontent les difficultés avec un courage, un positivisme et une détermination qui à mes yeux est inexplicable. C’est leur plus grande force et c’est pour cela qu’ils y arriveront. Encore. Toujours. 

 

Dani et Angel en livraison (28/11/19)  - © Romain Mailliu

Dani et Angel en livraison (28/11/19)  – © Romain Mailliu

 

Découvrir le chapitre précédent : Une mer calme n’a jamais fait un bon marin →

 

Photo de couverture : Kusniawaty, jeune femme du programme en management step (Avril  2020) – © Romain Mailliu

29 avril 2020 8 commentaires
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ActualitéCarnet de voyageRomain Mailliu - 13 mois de volontariat en Indonésie

# 14 Une mer calme n’a jamais fait un bon marin

par Romain Mailliu 15 avril 2020
écrit par Romain Mailliu
LP4Y Indonésie

 L’exclusion, ce n’est pas la solitude qu’on ressent après neuf jours de quarantaine. Etre exclu, c’est ne pas exister aux yeux des autres. 

La crise sanitaire mondiale menace Kampung Sawah, le bidonville indonésien de Romain. Suivez avec son carnet de bord l’impact du Coronavirus dans les quartiers les plus pauvres.  [Chapitre 2]

 

La travail c’est la santé. Le 24 mars 2020

“Coach, can you open the door please ?”

J’ouvre les yeux en sursautant : le réveil n’a pas sonné. Il est 7h30 et les jeunes sont déjà devant la porte de notre centre. Le weekend est terminé. La journée commence à 8 heures mais nous ouvrons le centre une trentaine de minutes avant. Cela permet aux entrepreneurs de se retrouver et de débriefer sur leurs aventures de la nuit dernière. Un vendredi matin comme un autre. 

Les jeunes ? le travail ? l’activité ? le centre ? Tout cela est bien vague. Depuis plusieurs pages, je m’adresse à vous comme à un vieil ami, alors qu’on ne se connaît ni d’Eve ni d’Adam. Des présentations s’imposent, et le plus vite sera le mieux. 

Cher lecteur, presqu’un an a passé déjà depuis qu’une idée s’est installée durablement dans ma tête : partir découvrir, dès la fin de mes études d’ingénieur, une autre réalité. Je sortais d’un stage dans le monde de la finance et d’un mémoire de fin d’études sur l’industrie 4.0 : le champ des possibles restait large. Après réflexion, je dégageais 3 piliers que je jugeais essentiels dans mon aventure à venir : m’engager au service des plus pauvres, à l’étranger, en immersion totale.

Il y a aujourd’hui sur notre planète 1,2 milliard de jeunes entre 15 et 24 ans, dont 600 millions vivent en dessous du seuil de pauvreté (1,5€ par jour), mal nourris, victimes d’abus et de violences… Cela représente 1 jeune sur 2. J’ai donc décidé que c’était à ces jeunes que je consacrerais ma première année de vie professionnelle.

Après 10 jours de formation au volontariat de solidarité internationale avec la DCC en juillet 2019, j’ai décollé pour Manille, capitale des Philippines.  C’est là qu’a commencé il y a 10 ans l’aventure Life Projet For Youth (LP4Y). LP4Y est une ONG qui a pour objectif l’insertion professionnelle et sociale de jeunes en situation de grande précarité et frappés d’exclusion. J’ai rejoint l’équipe composée exclusivement de volontaires (plus de 120) et débuté 3 semaines immersives dans un centre de formation : le Green Village.

La pédagogie de mon ONG s’articule autour de la gestion d’une activité micro-économique par les jeunes des bidonvilles. En d’autres termes, ils expérimentent – en équipe de 17 – la création, le développement et la gestion d’entreprise. À Kampung Sawah, quartier pauvre au nord de Jakarta, notre entreprise produit et vend de l’eau potable. Finance, marketing, vente, gestion des stocks, livraisons, ressources humaines, les jeunes sont divisés en départements et ont des responsabilités qui évoluent en fonction de leur ancienneté dans le programme. Une véritable petite entreprise. Ces jeunes entrepreneurs travaillent et nous leur versons donc une rémunération. Elle leur permet d’apprendre à gérer de l’argent, et surtout à acheter à manger. 

La gestion d’entreprise représente 50 % de la formation. À celle-ci s’ajoute 30% de « learn » : rattrapage scolaire et acquisition de compétences nécessaires dans le monde du travail (anglais, informatique, communication etc.) et 20% de « guide » : développement personnel, management des émotions, accompagnement budgétaire, identification des compétences, projection dans l’avenir et construction de leur Projet de Vie… Vaste programme. Et mon travail dans tout ça ? Je suis « catalyseur », j’orchestre cette formation et m’assure que tout se passe pour le mieux !

Cela fait maintenant plus de 7 mois que je vis à Kampung Sawah et mes parents ont décidé il y a 24 ans de m’appeler Romain. 

 

les jeunes de LP4Y Jakarta

Notre équipe (16/11/2019) – © Romain Mailliu

 

C’est l’heure de la revue des troupes. Nous commençons la journée par un briefing, afin de fixer les objectifs de la journée. L’équipe est debout et m’écoute plus ou moins  lui délivrer des informations qui seront les mêmes les jours à venir. “Attention, lavez-vous les mains deux fois par heure, n’oubliez pas de porter votre masque et si vous avez de la fièvre, rentrez-vite chez vous. Questions ? Let’s go !”.  

Mais pourquoi garder le centre ouvert ? Nous savons que le confinement est la meilleure stratégie à adopter pour lutter contre la propagation du Coronavirus. 

Les écoles sont déjà fermées depuis deux semaines en Indonésie et le gouvernement va tôt ou tard – certainement trop tard – adopter des mesures plus strictes. N’est-ce pas  dangereux de continuer à travailler alors que dehors le virus prend comme le feu sur la poudre ? 

La question est légitime. D’ailleurs, notre centre s’est adapté à la situation et les jeunes n’assurent plus que la production et la vente d’eau potable. Nous avons stoppé les trainings et nous ne sommes ouverts que deux matinées par semaine. Les mesures d’hygiène ont été renforcées dans le centre. Le port du masque est exigé. Le lavage des mains au gel hydroalcoolique est effectué jusqu’à ce que celles-ci soient fripées comme le désert de Maranjab. Pour autant le risque zéro n’existe pas. Alors pourquoi continuer coûte que coûte à travailler ? 

 

Jeunes LP4Y Indonésie

Aknel Prianto et Wahab Abdul Ledang qui livrent de l’eau à un client (28/11/19) – © Romain Mailliu

 

Les raisons sont multiples. Premièrement, la distribution d’eau a été évaluée par LP4Y comme un besoin vital pour la communauté. En effet, il n’y a pas d’eau courante potable en Indonésie et les habitants, riches comme pauvres, doivent acheter des gallons ou de l’eau en bouteille pour s’hydrater. Cet argument se confronte à quelques objections. L’eau potable n’a pas disparu du jour au lendemain en Indonésie car à vrai dire il n’y en a jamais eu. Nous ne sommes donc pas les seuls producteurs de gallons dans le bidonville. Les concurrents sont nombreux et parfois moins chers. De plus, il existe un système d’eau courante auquel Kampung Sawah est raccordé. Quand les habitants n’ont pas assez d’argent pour acheter un gallon – ce qui arrive fréquemment – ils ne se laissent pas mourir de soif. Ils font bouillir de l’eau. 

 

LP4Y Indonésie

Ramdani Akbar et Angel Augustin en livraison (28/11/19) – © Romain Mailliu

 

Un autre argument me semble plus adéquat. Chez LP4Y, notre mission principale est de lutter contre l’exclusion des jeunes adultes. L’exclusion, ce n’est pas la solitude qu’on ressent après neuf jours de quarantaine. Etre exclu, c’est ne pas exister aux yeux des autres. A Kampung Sawah, beaucoup des jeunes qui ne vont plus à l’école, n’ont pas de travail et qui s’efforcent de survivre dans un monde qui ne les intègrent pas en sont les victimes. Fermer le centre, c’est bâtir un mur au lieu de construire un pont, c’est fermer la porte à l’espoir, c’est renforcer l’exclusion dont ils sont victimes. Nous devons donc coûte que coûte garder le contact avec les jeunes. 

 

LP4Y Indonésie

Angel Augustin et Diah Ningsih qui remplissent des gallons d’eau potable (29/11/19) – © Romain Mailliu

 

J’évoquerai également une dernière raison qui est peut-être la plus évidente : la rémunération des jeunes. Nos entrepreneurs gèrent une entreprise qui produit et vend des gallons d’eau. En contrepartie, nous leur versons une rémunération. Or, en cette période de crise, ce sont les seuls à ramener un peu d’argent de façon hebdomadaire à leurs familles. 

Je m’explique. Pour lutter contre le virus – ou plutôt pour s’en protéger – les entreprises ferment leurs portes et se mettent en quarantaine. Les premiers emplois supprimés sont les emplois indécents. Ce sont les métiers invisibles, sans contrat, sans assurance, dont on ne veut pas entendre parler. Il font pourtant vivre des millions de familles dans le monde. Or, en Indonésie quand une entreprise ferme, vous n’entendrez pas parler de chômage partiel, de prime ou de dédommagement. Les employés se retrouvent en congés sans solde, c’est à dire à la porte. 

Si nous fermons le centre, nous stoppons la rémunération des jeunes et avec elle, nous coupons les vivres à leurs familles. C’est aussi simple que cela. 

 

LP4Y Indonésie

Aknel, Angel, Wahab et les clients du bidonville de Kampung Sawah (28/11/19) – © Romain Mailliu

 

Une mer calme n’a jamais fait un bon marin. Le 27 mars 2020

Notre centre : un voilier dans la tempête. Les évènements se succèdent comme des vagues que nous prenons de plein fouet sans pouvoir reprendre notre souffle. Sarah est partie mais Fanette est de retour après dix jours confinée dans un hôtel. Fièvre, vertiges, maux de tête : elle pensait que c’était le coronavirus, je pensais que c’était le coronavirus, vous pensez que c’est le coronavirus, ce n’était pas le coronavirus. Enfin, d’après le test fait dans un hôpital public indonésien. Le personnel médical vient prélever à l’aide d’un coton-tige un peu de salive. cinq heures d’attente, deux minutes de consultation. Trois jours plus tard, les résultats sont formels : pas de coronavirus.

 Alors qu’était-ce ? La dengue ? La grippe espagnole ? Elle ne saura jamais. Quand on est volontaire, les « coups de fatigue » dans notre jargon, nous tombent dessus comme la neige en hiver. On ne dramatise pas, on lâche prise et on patiente. Parfois, quand la fièvre devient vraiment insupportable, on passe faire un check-in à l’hôpital. On arrive parfois à comprendre le diagnostic du médecin. On finit toujours par repartir avec un paquet de pilules – qui pourraient très bien être des dragibus – et on retourne se coucher. Après tout, c’est toujours une bonne occasion de prendre des vacances.

 Notre bateau est donc pris d’assaut par la houle. Chaque vague est une préoccupation, une secousse à envisager. Elles ne sont pas toutes aussi menaçantes mais elles arrivent de tous les côtés. Bateau ? Tempête ? Vent et marée ? Romain, as-tu perdu la tête ? Décortiquons un peu cette métaphore douteuse. 

 

Océan Pacifique

Océan Pacifique (Août 2017) – © Romain Mailliu

 

Ces vagues, ce sont les problèmes – disons challenges – des jeunes qui évoluent avec le coronavirus. A ce stade, ce sont généralement des challenges économiques : Le père de Taufiq a perdu son travail, il est le seul à pouvoir ramener de l’argent pour nourrir sa famille ; Les parents de Fikri sont rentrés “au village” pour fuir le virus, il est maintenant à la rue. Ces défis s’ajoutent à notre travail quotidien : Toy ne peut plus venir au centre car il doit aider sa grand mère à ramasser des bouteilles en plastiques pour les revendre ; Fami va donner naissance dans 4 jours et n’a pas assez d’argent pour accoucher à l’hôpital. Vous l’avez compris, ça fait beaucoup de “Challenges”. 

Ces secousses, ce sont aussi les workshops que LP4Y a mis en place pour s’adapter face à la crise planétaire. En Indonésie, nous sommes l’un des derniers centres qui n’est pas encore en confinement total. En Inde, au Vietnam, aux Philippines ou encore au Bangladesh, les centres assurent un suivi des jeunes plus ou moins à distance. Cela dépend de l’agressivité des policiers qui font respecter l’interdiction de sortie. 

Ces ateliers portent sur des initiatives variées pour améliorer nos processus. J’ai d’ailleurs une conf-call dans dix minutes pour parler du suivi des anciens jeunes du programme – faites-m’y penser. 

Dans cet ouragan, l’adversaire le plus dangereux se trouve parfois sous la mer. En effet, un courant puissant nous fait dériver et rend le cap difficile à garder. Il se réveille particulièrement le soir, quand la nuit tombe, et rien ne semble pouvoir l’arrêter. Ce courant, c’est l’information continue sur le coronavirus qui nous agresse jour et nuit. Réseaux sociaux, journaux, télévisions, mails, flyers, visiteurs : impossible de se déconnecter ou de chercher le vrai du faux. J’ai l’impression d’être spammé, assommé par des données qui me tombent dessus sans fin. Alors je garde quelques bribes d’informations, saisies ici ou là, et il m’arrive de les partager à qui veut bien les entendre. Sans le vouloir, j’imagine que je rajoute une couche à l’incompréhension générale.

 

Océan Pacifique

Océan Pacifique (Août 2017) – © Romain Mailliu

 

Moussaillons, il n’y a pas de voilier sans vent, ni de tempête. Ami d’un jour, ennemi du lendemain, le vent est un personnage bipolaire. Son rôle est déterminant quand on entreprend des aventures en mer. Son souffle peut porter notre bateau vers des horizons plus prospères ou le briser puis l’envoyer nourrir les poissons. Blizzard, parfois caresse matinale, il est déroutant. Quand le mistral se lève, les voiles se gonflent et les marins chantent. Ce vent, c’est nos familles en France. Elles jouent une place décisive alors que le virus fait de plus en plus de victimes. C’est la raison qui décide un volontaire à quitter le navire pour rentrer chez lui. La famille comme l’alizé est une source d’énergie inépuisable. Il suffit parfois d’un coup de téléphone de sa part pour dompter les flots ou pour déchirer les voiles… “Vas-tu rentrer en France ? ; félicitations pour ton engagement ! ; es-tu en sécurité ? ; nous sommes fiers de toi ; tu nous manques…” Les mots de nos familles alimentent nos peurs et nos joies. Il faut savoir s’en détacher sans prendre de distance.

Le vent est l’ombre de la tempête : quand il se dresse face au soleil, il perd son hostilité.

Sur le pont du voilier, je ne suis pas seul. Nous avons perdu un matelot c’est vrai, mais le hasard fait bien les choses : un amiral et un capitaine de vaisseau nous ont rejoint. Le cofondateur de LP4Y, Jean-Marc, et une haute fonctionnaire de l’organisation, Inès, se sont retrouvés bloqués en Indonésie. Ils étaient venus visiter un centre à Surabaya quand l’Inde, leur pays de résidence, a décidé de fermer ses frontières. Ils s’installent donc avec nous à Jakarta en attendant que la situation évolue.

Depuis huit mois, notre bateau, nous savions le garder à la surface. Lui donner un cap. Entre marins, nous avions eu le temps de découvrir nos qualités respectives et un bon équilibre s’était naturellement mis en place. 

Tout n’était pas blanc ou noir mais, comme les vagues qui déroulent tour à tour leur ardeur sur la plage, nous avions trouvé l’harmonie. Maintenant que l’équipage n’est plus le même, nous devons en reconstruire une. Et vivre avec son patron est un facteur qui peut faire gronder les éléments. 

 

Océan Pacifique

Océan Pacifique (Août 2017) – © Romain Mailliu

 

Découvrir le chapitre 1 : Les départs devraient être soudains →

15 avril 2020 15 commentaires
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#13 Les départs devraient être soudains

par Romain Mailliu 10 avril 2020
écrit par Romain Mailliu
Bidonville en bord de mer - Cilincing - © Romain Mailliu

 

La crise sanitaire mondiale menace Kampung Sawah, le bidonville indonésien de Romain. Suivez avec son carnet de bord l’impact du Coronavirus dans les quartiers les plus pauvres. 

 

Les départs devraient être soudains. Le 21 mars 2020

Sarah fait ses affaires. Elle s’en va. La décision a été prise aujourd’hui. Elle n’emporte avec elle qu’un petit sac qu’elle prendra en cabine. Elle ne souhaite pas perdre de temps, chaque seconde compte. 

Sous assistance respiratoire de 4 mois à 6 ans, la petite enfance de Sarah fut marquée par le bruit d’aspirateur de la ventilation mécanique, son éternelle compagne. Bien qu’à 18 ans, l’âge de tous les possibles, son asthme se soit stabilisé, elle prend aujourd’hui encore 6 médicaments par jour pour éviter des complications. Seulement voilà : le Coronavirus est une grippe qui peut retourner sa veste. Dans cet ouragan d’informations sans fin, les quelques faits que j’arrive à saisir – comme le pêcheur attrape une sardine dans un banc de maquereau – laissent présager qu’avec des problèmes pulmonaires le Covid-19 peut vous conduire en réanimation. Or, la réanimation en Indonésie, c’est un peu comme les amis en politique :  ça existe mais il ne faut pas trop s’y fier.

Elle a pris le premier vol qu’elle a trouvé. 2 escales : Hong-Kong et Les Emirats arabes unis, avant d’arriver à Lyon. Sarah ne savait pas que Hong-Kong était la région la plus grande et la plus peuplée de la république populaire de Chine, ou peut-être qu’au fond elle s’en doutait, mais qu’elle avait décidé de chasser cette idée de sa tête. Le plus gros risque, c’était de rester en Indonésie. 

L’ambassade nous a contacté : les vols pour la France seront bientôt limités aux longs courriers commerciaux pour une durée indéterminée. Vacanciers, rentrez vite : il est venu le temps de la raison. Adieu Bali ; bonjour Bercy. Expatriés, vous avez choisi une vie de princes, loin de la monotonie parisienne – Métro, boulot, dodo – restez. Vous allez la vivre, l’aventure, chez vous, en quarantaine, au bord de la piscine. Si vous fermez bien vos portails – barrières infranchissables de vos prisons dorés – et que vous renvoyez les domestiques, les risques d’attraper le virus sont approximativement les mêmes qu’en France. 

Et les volontaires dans tout cela ? Nous sommes partis avec l’idée de sauver la veuve et l’orphelin… Le fantasme prend une tournure inattendue et déroutante. Nous ne vivons pas dans de belles maisons, dans les quartiers riches de la ville, proches des hôpitaux privés et d’une population connectée au monde qui prend conscience de l’urgence et réagit à coup de gestes barrières et de quarantaines. Nous sommes dans les quartiers pauvres où il est inconcevable de s’enfermer seul chez soi car ici l’union fait la force. 

Que va-t-il nous arriver ? Je pourrais tirer des plans sur la comète, et je le ferais très certainement par la suite – il faut bien s’occuper – mais pour l’instant, je regarde par ma fenêtre le soleil se coucher sur Kampung Sawah, le bidonville dans lequel je vis. Les enfants jouent dans la rue et font brûler, dans un petit brasier, les morceaux de plastique qui jonchent le sol. Leur mère les regarde d’un oeil occupée. Une éponge à la main, elle frotte le scooter familial. Il y a 50 ans, elle lui aurait donné du foin tout en lui caressant la croupe. Le scooter est une bête increvable. Sur son dos, il porte des familles entières, sans jamais gémir, et quand bien même cela arrive, vous lui donnez un gorgée de gasoline et il repart au galop. 

 

Alors qu’elle nous annonçait sa décision, le sel a coulé sur les joues de Sarah. Je n’ai pas su réagir. Généralement, quand les émotions jaillissent chez mon interlocuteur, je cherche méthodiquement à adopter la “bonne” attitude. J’essaie de me téléporter dans la personne concernée. De me mettre à sa place, en quelque sorte. Faire preuve d’empathie. L’équation me semble assez simple : nous sommes tous des êtres humains et, malgré nos différences, nous avons une ligne de conduite commune. Romain, comment aimerais-tu que les autres réagissent face à toi ? Et là, mon théorème s’écroule. A la place de Sarah, je prendrais la fuite pour exprimer ma peine en silence. Intérieurement, en quelque sorte. Ce qui, en vue de principes physiques et psychiques assez évidents, n’est pas une bonne idée. C’est un coup à se remplir et à la moindre différence de pression : exploser. J’en conviens. Toujours est-il que Sarah est triste et moi tout autant désemparé. 

Elle est partie dire au revoir aux jeunes des bidonvilles que nous accompagnons dans le cadre de notre mission de volontariat. Elle a découpé des photos – instants volés au temps qui passe – qu’elle leur donne. 

Ces jeunes, nous partageons leur quotidien depuis maintenant 8 mois. Quand ils apprennent la nouvelle, une vague froide leur mord le visage. Des départs, ils en ont connu : une petite soeur qui ne soufflera jamais sa première bougie, un frère qui travaille loin pour nourrir sa famille, des parents partis en les laissant un matin sur le perron d’une voisine… 

Dans cette situation, ce sont eux qui prennent soin de nous. Avec un anglais hésitant dont ils connaissaient à peine quelques mots il y a encore 2 mois, ils essaient de nous réconforter. Et c’est diablement efficace. Je m’assieds et les regarde faire, admiratif. Nous essayons de leur apprendre les compétences recherchées par les entreprises pour qu’ils trouvent un emploi stable et décent. Nos enseignements me semblent biens futiles à présent. Aujourd’hui, c’est moi qui prend la leçon. 

 

Sarah accompagnée de Ramdani Akbar et Taufan Alamsyah, des jeunes du programme LP4Y - © Romain Mailliu

Sarah accompagnée de Ramdani Akbar et Taufan Alamsyah, des jeunes du programme LP4Y –
© Romain Mailliu

La Cigale et la Fourmi. Le 22 mars 2020

 Sarah est partie. Le centre semble vide, et les pas dans le couloir qui mène à nos chambres sonnent creux. Le silence court le long des murs, s’adosse aux fenêtres. Il emplit l’espace et nous étouffe petit à petit. Entre volontaires, nous vivions en communauté. Nous sommes habituellement 4 : Sarah, Fanette, Lia et moi. Fanette est en déplacement. Je me retrouve donc seul avec Lia. Elle est Indonésienne et s’occupe dans notre ONG de faire le lien entre nous, volontaires français, et l’Indonésie. Son poste ? Community mobilizer. N’allez pas croire que nous ne sommes pas Corporate. LP4Y est une ONG avec une structuration digne des multinationales du CAC 40. Je pourrais vous développer le modèle, l’organisation des différents pôles, l’organigramme, la road map à 5 ans et les résultats du premier semestre. Mais nous ne sommes pas ici pour parler business. Rassurez-vous : LP4Y n’a pas encore prévu une IPO au Nasdaq avant la fin de l’année. 

 Je retrouve Lia dans la cuisine, les yeux perdus dans son bol de lait à la fraise. Nous sommes dimanche ; il est 9h. Le soleil est déjà haut dans un ciel bleu qui appelle à l’aventure. Romain, il est temps de te ressaisir ! Il est vrai, un chapitre se termine dans notre colocation mais l’on n’écrit pas de bons romans sans tourner des pages. N’oublions pas que pendant la campagne de Russie, Napoléon a perdu 200 000 hommes pour finir exilé sur l’île d’Elbe. Nous ne sommes pas à plaindre. L’Histoire est un ami toujours fidèle qui nous aide à relativiser. Debout soldat ! il est temps de se préparer à faire face à cet adversaire sans étendard qui répand sa fièvre partout dans le monde.

 Il n’y a pas de bon soldat sans bon matériel. Et ça, la France, 3ème plus gros exportateur mondial de matériel militaire, l’a bien compris. Avec un chiffre d’affaires de 9,1 milliards d’euros en 2018 et un marché en hausse de 5%, il y a de quoi alimenter les théories les plus lugubres de nos amis complotistes. Bien qu’il soit certainement possible d’acheter des armes à Kampung Sawah, elles nous seront peu utiles pour lutter contre le COVID-19. J’ai toujours été très mauvais au tir à la carabine et ma seule expérience de ball-trap s’est soldée par une bière et une épaule d’agneau au club-house. Bref, nous partons donc acheter des masques, des gants et du paracétamol. Mais où donc trouver ces ressources tant convoitées ? Cela fait déjà plusieurs jours que nous investiguons autour de notre bidonville et il faut se rendre à l’évidence : on peut y trouver la joie, la compassion, la sagesse et un Magnum 357 mais pas de matériel médical. Seuls les malls, véritables palais du royaume de la consommation, semblent encore disposer d’un pareil trésor.

 

Les malls sont à l’Indonésie ce que sont les térasses et les jardins à la France : des lieux de rendez-vous incontournables pour les familles, les amis, les futurs couples, les anciens amants… L’endroit hype pour passer un weekend branché. Jakarta, on n’en compte pas moins de 144. Il y en a pour tous les goût. Ou plutôt pour tous les portefeuilles. Je les ai classés en 3 catégories : 

  1. Le mall “fourmilière”. Il est composée d’un agglomérat de petites galeries qui partent dans tous les sens. On y trouve de tout et on ne repart jamais avec ce que l’on était venu chercher. La circulation y est difficile et il faut savoir jouer des coudes pour rester à la surface. Les prix sont bas pour qui sait négocier : vous y rencontrerez des commerçants tenaces. 
  2. Le mall “Les 4 temps”. Je vous épargne les détails : c’est celui qui ressemble le plus à nos centres commerciaux. Vous y trouverez des chaînes de prêt à porter, de restauration ainsi qu’un espace détente avec son bassin artificiel. Pendant la période de Noël, un sapin est dressé en son centre et un stand de photo vous propose pour 10 euros un souvenir avec le vrai Père Noël. 
  3. Le mall “Hilton”. Le sol en marbre encore trop peu foulé est une véritable patinoire. Les couloirs sont immenses. Des voitures de sport vous regardent avec de grands yeux depuis leurs stands éphémères. Les chaînes qui ont fait leurs preuves se cachent à l’ombre des vitrines des boutiques de luxe. Yves Saint Laurent, Dior, Chanel, Givenchy, Gucci… Quelques discrets visiteurs admirent les vitrines avant de prendre la fuite quand le vendeur en costume trois pièces les approche. 

 

Nous en choisissons un à proximité de notre quartier, qui porte le délicat nom  de Aeon. C’est un mall que je place dans la catégorie numéro deux. Comme tout stratège formé sur le tas à la gestion de crise, nous avons décidé de faire des stocks : ni trop peux, ni pas assez. Autour de nous, la concurrence s’active en poussant des cadis remplis de sacs de riz et de nouilles chinoises. Le rayon de papier toilette n’a pas encore été dévalisé pour des raisons culturelles que je vous laisserai deviner. Le bilan n’est pas glorieux. Plus de masques, plus de gants. J’arrive à me procurer quelques sachets de paracétamol et un thermomètre. Impossible de respecter les gestes barrières et seul le personnel du supermarché porte des masques. Nous repartons avec un désagréable goût d’échec à la bouche.

 

A suivre…

Des appartements situés au dessus d’un mall dans le nord de Jakarta

Des appartements situés au dessus d’un mall dans le nord de Jakarta

 

Photo de couverture : Bidonville en bord de mer – Cilincing – © Romain Mailliu

10 avril 2020 6 commentaires
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#12 Inondations de Jakarta : La misère est si belle

par Romain Mailliu 18 mars 2020
écrit par Romain Mailliu

 

Cela fait maintenant 1 mois que je n’ai rien couché sur le papier. Pourtant, il arrive que les mots courent dans ma tête et le soir, le visage dans mon oreiller, j’essaie de les saisir pour en faire des phrases. Parfois, quand celles-ci me plaisent, je les écris sur mon portable. Puis les effaces le matin, pour les laisser à la nuit.

 

Mon bidonville : Kampung Sawah

Notre centre, un bateau au milieu des épaves. Les inondations ont frappé fort à Jakarta, et seules les maisons avec un étage, comme la nôtre, peuvent encore abriter un semblant de vie. Depuis 2 jours, l’eau et l’électricité ont été coupées dans Kampung Sawah : notre quartier, notre bidonville, notre communauté, appelez ça comme vous voulez. Vous n’aimez pas les compromis ? Pas d’inquiétude, le gouvernement indonésien a déjà choisi pour vous : Kampung Sawah n’existe pas. Il n’y a aucun droit de propriété sur ce terrain inondable qui s’étend entre une forteresse de containers et une autoroute à 6 voies. Pourtant, plus de 10 000 habitants y ont construit leur « maison ».

Le niveau de vie y est pauvre, très pauvre. Le chômage fait rage si bien que pour gagner leur pain, les habitants acceptent n’importe quelle besogne. La plupart travaillent au port, et guident les camions, les grues, les bateaux et les containers. Ils sont comme des fourmis au milieu d’un défilé militaire.

 

 

Les misérables

Avec le temps, Kampung Sawah a pourtant su créer de la richesse, s’organiser et s’agrandir. Certains disent même que le quartier s’embourgeoise. Les murs de béton remplacent le carton, les balcons fleurissent aux étages des maisons… N’allez pas vous imaginez une banlieue à la Beverly Hill, avec les gazons entretenus au peigne fin et les barbecues webers devant les vérandas. Mais Kampung Sawah est mon quartier et même de l’eau jusqu’au nombril, je remuerai ciel et terre pour vous convaincre de venir y passer quelque temps.

Vivre dans un bidonville, c’est faire l’expérience de la simplicité. La misère n’a rien d’artificielle. Elle ne se déguise et ne se maquille pas, ou alors pas longtemps. Quand je marche dans les rues de mon quartier, le mascara ne cache pas les nuits blanches, allongées à même le sol. Les faux maillots de foot ne cachent pas les corps de petite taille, maigrichons, victimes de malnutrition. Les grands sourires ne cachent pas les dents abîmées par l’insuffisance sanitaire.

Vivre dans un bidonville, c’est découvrir une réalité vécue par des millions de personnes dans le monde. Nous pensons parfois que nous avons une vie ordinaire, banale, classique, détrompons-nous. Si normaliser c’est généraliser, la réalité des bidonvilles est certainement plus normale que la nôtre. En effet, près de la moitié des habitants de la planète – soit 3,4 milliards d’individus – sont confrontés à de grandes difficultés pour satisfaire leurs besoins élémentaires.

La Banque mondiale a proposé, en 2018, deux seuils de pauvreté : le premier, à 3,2 dollars par jour, qui conduit à compter 25 % de pauvres sur la planète, et le second à 5,5 dollars, qui implique près de 50 % de pauvres. Difficile de se plaindre devant cette réalité, nous qui avons parfois l’habitude, d’exprimer notre mécontentement pour un rien. En 2020, toujours pas de réseau dans le tunnel de la Défense : c’est un cauchemar. Il faut travailler plus pour payer la retraite de nos anciens plus nombreux que par le passé : c’est malheureux.

Vous allez me dire « Romain, attention, méprise, tu sais que l’argent ne fait pas le bonheur ». Peut-être, mais comme le dit Booba, le bonheur ne remplit pas l’assiette.

Vivre dans un bidonville, c’est faire l’expérience de la joie, dans ce qu’elle a de plus authentique et véritable. Pour survivre, l’entraide est de mise, et nous découvrons que la joie est plus intense quand elle est le fruit de la générosité. Quand on est démuni, on apprend à se satisfaire d’un rien. Chaque moment de vie est propice à l’émerveillement. Une inondation devient une piscine géante et gratuite. La misère est si belle.

 

 

La vie aquatique

Nous sommes le 25 janvier et depuis le 31 décembre, les inondations nous frappent au moins une fois par semaine à Jakarta. Ce n’était pas arrivé depuis plus de 10 ans, de mémoire des anciens. Ce n’est peut-être tout simplement jamais arrivé. L’eau, qui grimpe comme une marée, n’y est pas toujours aussi haute. La lune est parfois clémente, me direz- vous. Mais à peine avons-nous le temps de la chasser des matelas, des armoires, des vêtements, elle revient au galop. Pas de répits pour les braves, les visages se creusent, mais les sourires restent sous les yeux pochés.

Dans la communauté, chacun affronte le destin avec un positivisme exemplaire. Les enfants construisent des bouées avec des chambres à air, plongent, s’amusent dans l’eau sombre, où se mélangent plastiques, restes de nourritures et de déchets en tout genre, couleuvres et cloportes. Les rires résonnent dans les allées. Pas besoin de babyphone pour s’assurer que les enfants vont bien.

 

 

Les sourires immortels

Je ne me lasse pas des sourires des habitants. Ils sont toujours les mêmes, immortels, fidèles, indéchiffrables. Qu’il pleuve, vente, sous la chaleur ardente du soleil, éclairé par les reflets de lune, des sourires encore et toujours. Au début de mon volontariat, je les trouvais merveilleux. C’était pour moi un signe d’amour universel, de succès devant la misère, de richesse devant la pauvreté. Je me nourrissais de ces sourires, le matin après une courte nuit, ils étaient pour moi comme une piqûre d’adrénaline.

Maintenant ces sourires me font peur. Je les vois comme le reflet d’une éternelle indifférence. Le sourire qu’on donne aujourd’hui car on ne sait pas de quoi sera fait le lendemain. À quoi bon être triste, tirer une sale tronche, quand on n’attend rien de l’avenir ?

N’y a-t-il donc jamais de limite ?

Aujourd’hui, ce sourire, je le vois comme l’acceptation d’un prochain malheur. J’aimerai parfois le voir remplacer par une grimace de colère, de tristesse, comme l’expression d’une volonté de vouloir changer les choses, crier STOP ! C’est pour moi le sourire d’un peuple qui accepte son destin.

 

 

Espoir et désillusion

Utopiste que je suis, imbécile, aveugle, sourd, ce sourire est pourtant la preuve que la joie est plus forte que tout. C’est le sourire de la compassion et du pardon, la sagesse qu’il faut pour accepter le fait que nous ne maîtrisons pas tous les éléments, que nous ne sommes pas les acteurs tout puissants de notre propre film. Et ça, du haut de mes 24 ans, j’ai du mal à l’accepter. Je pense encore qu’à force de persévérance, de rêves, et de volonté, on peut garder la main sur son destin.

 

“La joie est bien plus grande que le bonheur. Alors que le bonheur est souvent dépendant de facteurs extérieurs, la joie ne l’ait pas.”

Le Dalaï-Lama et l’Archevêque Tutu – Le livre de la joie

 

Et bercé par l’espoir, je suis persuadé qu’il est possible de changer de vie. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai décidé de partir en volontariat de solidarité internationale, envoyé par la DCC dans l’ONG LP4Y, afin d’accompagner les jeunes des bidonvilles à trouver un travail décent.

Je peux vous assurer que quand un jeune quitte Kampung Sawah pour devenir réceptionniste dans un hôtel 4 étoiles, c’est sa vie entière, et celle de sa famille, qui passent de l’ombre à la lumière. Un salaire fixe, une assurance, des vacances et le droit de rompre un contrat : c’est ce que la loi appelle un travail décent, c’est ce qu’un jeune des bidonvilles appelle une nouvelle vie.

Sauf que ce changement de vie est infiniment compliqué à réaliser et à poursuivre seul.

 

 

Together we can

Être seul, c’est sourire à son miroir. Essayez, vous n’en sortirez pas plus motivé. A la limite vous vous direz : il faut que j’aille chez le coiffeur, ou encore : pourvu que je devienne riche… Alors que quand quelqu’un vous sourit, tout semble devenir possible. Nous avons besoin des autres pour réussir, et ça, nous en faisons l’expérience tous les jours : nos familles, nos amis, nos collègues, notre équipe de sport… L’homme ne se suffit pas à lui-même, avait tenté de m’expliquer Aristote, pendant un DS de 4h en terminale scientifique. Avec le recul, il s’avère que nous sommes tombés d’accord. Ensemble, tout est possible.

S’il fallait conclure, car chers lecteurs, si vous êtes encore là, après 1542 mots, je vous en remercie et je vais de suite abréger vos souffrances. Je sais que l’époque n’est plus à l’écriture, aux doutes, à la description et l’analyse, mais aux vidéos de 3 minutes qui vous expliquent comment Aymeric a quitté la Banque d’Affaires pour vivre dans la creuse en autonomie dans une cabane.

Cher lecteur, bien que nous ne maîtrisions pas tous les éléments de cette équation à 3 temps – passé ; présent ; futur – qu’est la vie, nous pouvons, en unissant nos forces, la faire tendre vers le résultat qui nous semble être le bon…

Il ne suffit parfois que d’un sourire.

 

 

18 mars 2020 24 commentaires
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Diam Welly est un village où régnaient la paix et l'harmonie. La communauté des Peulhs vivait avec celle des Mandingues sans distinction. La joie de vivre y avait élu domicile ; les hommes et femmes étant en communion. Karamokho, un homme de valeur et bien respecté au village, y vivait avec son épouse Coumba, une femme vertueuse que tous les hommes auraient aimé avoir dans leur concession. La tradition avait réussi à construire une société juste, faite de solidarité, d'amour et d'entraide.
Cependant, la modernité — ou selon les mots de l'auteur, le Nouveau Monde — ne laissera pas Diam Welly indemne puisqu'elle le fera résolument s'engager dans une nouvelle ère de mutations affectant les moeurs, la moralité, les codes et conduites favorisant, ipso facto, l'émergence d'individus — comme Sellou, faisant la cour à l'épouse de Karamokho alors absent — gouvernés par la satisfaction de leur plaisir et de leurs intérêts personnels.
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