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Voir, juger, agir.

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Covid-19

Voir, juger, agir. Aventures et mésaventures à travers le monde... 🌦
Tibovski - Dessin de la quinzaine

David Graeber : l’anthropologue punk

par Tibovski 7 octobre 2020
écrit par Tibovski
L'anthropologue-anarchiste David Graeber

Hello, Hello….

2020 ne sera décidément pas le meilleur millésime. Le 2 septembre dernier, David Graeber, anthropologue et grande figure de la gauche américaine, est décédé. Cet homme était un vrai punk. À titre d’hommage, je vais revenir sur certaines de ses contributions majeures et tenter d’en extraire des enseignements utiles. Bien entendu, vous devez voir ça comme un maladroit préambule aux remarquables travaux de Graeber surtout connu pour son livre Bullshits Job. Avec cet article de rentrée, ce sera l’occasion de dépoussiérer un petit peu l’anarchisme et l’anthropologie. 

 

Pourquoi devriez-vous connaître ce gars-là ? 

Je sais, je sais : vous pensez probablement que je vais vous embêter avec une obscure figure de la far-left américaine. C’est pourquoi je vais m’appliquer dans un premier temps à vous expliquer à quel point Graeber est plus connu que vous ne l’imaginez, et surtout à quel point il mériterait de l’être davantage. Commençons déjà par dire que cet anthropologue est l’une des grandes figures de l’anarchisme, de l’altermondialisme et du mouvement Occupy Wall Street. On lui doit ce slogan mondialement connu : “Nous sommes les 99%”. Il faisait alors référence à la répartition inégale des richesses du monde. Que penser de cet anthropologue et militant anarchiste ?  

Il sait créer des slogans : très bien. Mais sérieusement, l’anthropologie ? Un truc d’universitaire poussiéreux ne s’intéressant qu’aux rituels de chasse en Papouasie. Et bien non. Enfin si, quelque part ; ses premières études portent sur l’héritage du colonialisme chez les peuples de Madagascar. Toutefois, l’anthropologie est loin d’être poussiéreuse. L’anthropologie cherche à comprendre l’homme, en tant qu’être social et culturel, au travers de l’étude ethnographique des divers groupes et cultures humaines. Claude Lévi-Strauss, anthropologue français de renom, s’intéressait justement à extraire des différences culturelles une sorte de structure commune : des “invariants culturels”, disait-il. À ce titre, Lévi-Strauss nomma un de ses ouvrages Le regard éloigné, en référence directe à cette citation de Rousseau qu’il affectionnait :

Quand on veut étudier les hommes, il faut regarder près de soi ; mais pour étudier l’homme, il faut apprendre à porter sa vue au loin ; il faut d’abord observer les différences pour découvrir les propriétés. (Essai sur l’origine des langues, chap. VIII.)

Ainsi, même une lointaine ethnie éteinte du Pacifique peut nous en dire beaucoup sur la crise économique, sur la Covid-19 et même sur la startup nation. 

Ok. Ok. L’anthropo c’est cool ! Mais Graeber est aussi un militant anarchiste de longue date. Et l’anarchie, c’est quand même digne des “tags aux blancos sur les eastpacks du collège”. Ce n’est vraiment pas un modèle politique viable et mature. En réalité, l’anarchie n’est ni une crise d’ado, ni un régime politique spécifique. Graeber s’appliquera à montrer que l’anarchie, contrairement au communisme, est avant tout une pratique. Cette “pratique” se retrouve à de très nombreux niveaux, et dans de très nombreux groupes sociaux. On dit qu’un ensemble d’individus développe des tendances anarchistes si celui-ci décentralise équitablement le pouvoir et les responsabilités. On parle aussi “d’autogestion”. “Anarchie” vient du grec anarkhía qui signifie “absence de pouvoir”. Ainsi toute tentative, à n’importe quelle échelle, visant à limiter politiquement la concentration des pouvoirs, peut être considérée comme anarchiste. Ce qui est également intéressant, c’est que l’étude des sociétés humaines nous apprend que le pouvoir et l’Etat sont des constructions culturelles et qu’il existe une myriade d’autres formes de gouvernance. Plutôt que d’être destructeur et digne d’un “émo boutonneux”, l’anarchisme est un courant qui s’autorise à penser d’autres rapports sociaux. Des rapports sociaux qui nous sont souvent présentés comme impossibles. Et l’anthropologie enrichit notre imaginaire d’un éventail beaucoup plus vaste de structures humaines. 

Graeber, chercheur et militant, s’efforce d’offrir une synthèse riche de ces deux facettes. D’abord en montrant la force politique de l’anthropologie, puis en déshabillant notre monde de ses sombres facéties. 

 

Vers une anthropologie politique : 

Le premier livre que j’ai lu de Graeber est Vers une anthropologie anarchiste dans lequel il constate avec étonnement la faible représentation de l’anarchisme dans sa propre discipline. Il y développe un ensemble de considérations montrant que l’anthropologie a toutes les clefs pour produire un riche outillage intellectuel de l’anarchie. On conclurait volontiers que Graeber produit une recherche militante. Pourtant il affirmait – étrangement -ceci au journal Le Monde :

« Une anthropologie marxiste existe sans doute, elle s’attache à employer les concepts marxistes à ce domaine de connaissance. Je ne fais rien de ce genre. Je me contente de pratiquer l’anthropologie, entendue au sens classique du terme, comme le fait mon mentor Marshall Sahlins. J’ai débuté ma carrière de manière assez conventionnelle par un travail de terrain à Madagascar, où j’ai étudié l’héritage de l’esclavage sur une petite communauté rurale. D’une certaine manière, je mène deux carrières de front : auteur militant et anthropologue. Elles se chevauchent par moments, mais restent autonomes. »

Pour y voir plus clair, il faut préciser la façon dont ce chercheur concevait son travail. 

Keith Hart le considère, au même titre que Rousseau, comme “un anthropologue des sociétés inégales” (Hart 2006, 2013). Cela signifie que ses études cherchent à clarifier les mécanismes d’inégalité dans les sociétés humaines. Dans ses premiers travaux sur la population de Befato à Madagascar, Graeber constate que les rapports politiques et de pouvoir se trouvent partout dans cette culture post-coloniale. Les rapports de pouvoir apparaissent comme des “réfractions de l’esclavage” et se trouvent fortement ancrées dans les croyances magiques de ces habitants. Ainsi sans même une formation politique claire, les rapports politiques et de pouvoir constituent un cadre analytique sous-jacent pour comprendre les codes et normes d’un groupe social. Dans Dette : 5000 ans d’histoire, son étude sur les fondements des dettes, David Graeber nous donne un autre exemple en montrant que la dette est consubstantielle à la notion d’argent et qu’elle régit des rapports de pouvoir très anciens. Il explique que les sociétés du troc sont un mythe, et que dès leurs origines les échanges marchands ont permis d’asseoir l’autorité d’un créancier sur un emprunteur. La monnaie ne serait autre que la codification de cette domination économique.

En clair, pour Graeber, l’anthropologie s’efforce de comprendre l’Homme au travers de ses rapports politiques. Dans Toward an Anthropological Theory of Value (2001), il explique que l’anthropologie, au travers de la notion de “valeur”, ne pointe pas seulement des visions du monde différentes, mais également des éthiques différentes. Le travail de l’anthropologue ne se distingue, dès lors, plus tellement de la politique. Déjà, parce qu’il est, de fait, impossible d’avoir un regard neutre sur  l’objet de recherche. Le chercheur, d’autant plus en science sociale, a un regard situé. Mais surtout, en étudiant la diversité des formes politiques existantes, celui-ci peut révéler des mécanismes structurels qui sous-tendent nos sociétés. Dans Pour une anthropologie anarchiste, il voit dans l’anthropologie une discipline puissante capable d’enrichir les réflexions politiques de la connaissance de l’Homme et la société. Seulement, les anthropologues évitent souvent ce genre de discours de peur d’être taxés “d’utopistes”. Pour Graeber, au contraire, l’anthropologue n’est pas un utopiste puisqu’il peut montrer que certains idéaux politiques sont non seulement possibles, mais ont déjà existé sous quelques formes. En d’autres termes, l’anthropologie est politique parce que son seul travail brise la plupart des mythes fondateurs des sociétés étatistes (sur l’Etat, la monnaie, l’ordre, la violence…). 

 

Anarchie et Graeber : dessin sépia à l'encre

 

Capitalisme technocrate de l’absurde

Aujourd’hui, Graeber est beaucoup plus connu pour ses essais intellectuels et militants. Fort de ses connaissances ethnologiques, ce dernier s’est appliqué à détruire beaucoup d’idées reçues sur notre monde occidental contemporain et à souligner la violence du capitalisme néolibéral. 

Des professions saugrenues :

Son attaque la plus connue et captivante porte sur l’absurdité de beaucoup d’emplois tertiaires du monde post-industriel. Ce livre, c’est Bullshit Job. Je vous en avais parlé dans un précédent article sur la pénurie de masques. Le propos de Graeber est plutôt simple : alors que le libéralisme a promis que la croissance économique réduirait la charge de travail à des semaines de 15h, nous travaillons toujours autant. Car, comme nous l’enseigne Weber, le capitalisme trouve ses racines dans l’éthique du travail qui valorise l’effort et la souffrance comme hygiène spirituelle. Ainsi, plutôt qu’une réduction du temps de travail, de nombreux emplois sans intérêt ont vu le jour. Réceptionnistes, private equity, community manager… Je vous passe, avec regrets, les détails de ces jobs que Graeber énumère avec humour tout au long du livre. Ce qu’il faut retenir, c’est que les bullshits jobs participent à “la féodalité managériale” qui use d’emplois subalternes pour renforcer le prestige social de certains acteurs et organismes privés.

De la paperasse, toujours plus de paperasse :

Oui, notre homme s’est aussi attaqué à la bureaucratie. Si vous pensez à une diatribe convenue sur les ronds-de-cuir, vous vous méprenez quelque peu. Graeber casse d’emblée cette idée que la bureaucratie serait l’affaire des administrations publiques. Le premier point à retenir, c’est que la bureaucratie est globale. 

“Et si les rites de passage constituent les scènes emblématiques de l’observation anthropologique, et si c’est généralement au travers de festins, d’onctions, de chants, de danses et de formules magiques que s’organisent les naissances, les passages à la vie adulte, les mariages ou les décès, c’est désormais la paperasserie qui, plus que tout autre rituel, encadrerait ces changements dans nos sociétés. Car le constat est bien là : pour Graeber, la bureaucratie a tout envahi.” Weller, J. M. (2016). Bureaucratie. In Annales des Mines – Gerer et comprendre (No. 4, pp. 77-79). 

Tant est si bien que Graeber estime que rien ne permet aujourd’hui de distinguer les administrations publiques des administrations privées. Ces deux sphères se sont harmonisées administrativement. Cela a d’ailleurs considérablement facilité les passerelles entre celles-ci, ainsi que la progression de l’économie de marché. En France, par exemple, nous déplorons les situations de pantouflage des “hauts fonctionnaires”, du lobbying et des conflits d’intérêts. Ces passerelles profitent davantage aux élites économiques et sociales. Car pour Graeber, la bureaucratie n’est pas seulement globale, elle est invisible et violente. Ces deux caractéristiques sont la conséquence directe de la première. Parce qu’elle est globale, on ne perçoit pas la façon dont la bureaucratie nous inonde et influence notre existence. Elle est violente, pour Graeber, précisément comme tout pouvoir globalisant et centralisé. C’est un principe anarchiste : plus le pouvoir est concentré, plus il exprime une volonté unique qui nie et broie l’expression des autres volontés individuelles et collectives. La bureaucratie écrase par sa complexité, impose des contraintes absurdes, creuse les inégalités et donc renforce l’autorité des institutions et des plus riches. Le renforcement des postes administratifs, dans les secteurs de la santé, de la recherche et de l’éducation, se fait au détriment des emplois indispensables. Cela rejoint donc le conflit entre des emplois nécessaires mais précaires et les bullshit jobs pointé par Graeber. 

 

Conclusion

Le livre sur la bureaucratie est sous-titré “l’Utopie des règles”. Et c’est ce qu’il y a de fascinant chez Graeber : il inverse la tendance. Il reprochait aux anthropologues de restreindre leurs analyses politiques au risque de paraître utopiste. Mais l’utopie, ce monde inexistant, c’est bien le nôtre. Nous vivons dans un système mondial particulièrement complexe fait d’illusions et de contraintes procédurales qui nous paraissent normales et saines. Mais, ces métiers, cette paperasse, ces dettes, cachent une autre réalité : des rapports de domination. À la manière de Brazil de Terry Gilliam, nous évoluons dans un dédale technocratique qui nous cache un horizon plus lumineux. Avec la mort de Graeber, nous venons de perdre une des fenêtres sur ces mondes possibles. Et même si ses travaux sont parfois plus des bravades qu’autre chose, nous pouvons en retenir un enseignement plein de sens dans notre situation actuelle : un regard sur le lointain peut nous offrir un recul sur notre monde. Comme cette brève synthèse de l’œuvre de Graeber est insuffisante. Ne vous inquiétez pas. Il réapparaîtra très probablement dans cette chronique tant son génie créatif est éclairant.

Tibovski (Thibault Ponchon)

 

Affiche du film Brazil réalisé par Terry Gilliam

 

Références :

Graeber, D.(2001) Toward an anthropological theory of value: The false coin of our own dreams. Springer. 

Graeber, D. (2007). Lost people: Magic and the legacy of slavery in Madagascar. Indiana University Press. 

Graeber, D. (2013). Dette: 5000 ans d’histoire. Editions Les liens qui libèrent. 

Graeber, D. (2015). Bureaucratie: L’utopie des règles. Editions Les liens qui libèrent. 

Graeber, D. (2018). Bullshit Jobs. Editions Les liens qui libèrent. 

Graeber, D. (2018). Pour une anthropologie anarchiste. Lux éditeur. 

Hart, K (2006) Agrarian civilization and world society. In D. Olson and M. Cole (eds.), Technology, Literacy and the Evolution of Society : Implications of the work of Jack Goody. Lawrence Erlbaum : Mahwah, NJ, 29–48. 

Hart, K (2012). In Rousseau’s footsteps: David Graeber and the anthropology of unequal society. The Memory Bank July 4 th. 

Rousseau, J. J. (2013). Essai sur l’origine des langues. 

Weber, M. (1964). L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme, 

Weller, J. M. (2016). Bureaucratie. In Annales des Mines-Gerer et comprendre (No. 4, pp. 77-79). FFE.

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Baudouin Duchange - Chroniques

“Voyage, voyage” : Il est temps de (bien) partir

par Baudouin Duchange 1 juillet 2020
écrit par Baudouin Duchange

 

Paris – Juillet 2020. Il m’aura fallu une centaine d’écoutes de la musique « tié la famille ! » du camarade Bengous pour enfin intégrer la question qu’il soumet à ses auditeurs : Oueskon va et Keskon fait ? 

Les dialectiques épistémologiques à la Tibovski n’ayant encore jamais foulé le sol vierge de mon savoir, je conserve un avantage argumentaire grâce à une science invérifiable : la philosophie de comptoir. Et nous en aurons bien besoin pour déterminer le sens d’un voyage !

 

Description : 'Family Holiday', Black and white photograph mounted on card, by John Heywood, 1979.

Description : ‘Family Holiday’, Black and white photograph mounted on card, by John Heywood, 1979.

 

Keskon fait ?

Ce qui est certain, c’est qu’une aventure implique un départ. Je décapsule ma première canette et marche en direction de Saint-Michel. J’ai toujours été séduit par le fait que le kilomètre zéro, en France, était le parvis de Notre-Dame de Paris. Chaque pas avancé à partir de cette place devient une aventure, même si elle termine dans les bars du quartier latin ! Certains critiqueront une vision  administrative et parisienne auto-centrée sur elle-même et ils auront probablement raison. Mais quel beau symbole ! Une fois au point de départ, il faut pourtant bien partir.

Comment partir ? Aujourd’hui, nous pouvons aller de plus en plus loin grâce aux compagnies aériennes low-cost. De nombreux boycotts dans un but écologique se sont ainsi manifestés et ont trouvé une résonance avec la crise du covid-19. La plus grande critique formée à l’encontre du commerce aérien est celle de la pollution dégagée par ces incessants monstres volants. A l’inverse, ses défenseurs insistent sur le faible impact environnemental de l’avion en comparaison à d’autres secteurs économiques, ainsi qu’à l’effet contre-productif des boycotts sur l’industrie et les métiers. 

J’ouvre une deuxième canette. Je me souviens du dernier film animé de Miyazaki « Le vent se lève », des dessins magnifiques pour tenter de créer des avions toujours plus beaux et purs. Le personnage principal, un architecte, s’inspire du vol des oiseaux et de la courbe de leurs ailes. Et comme dans le film, j’ai envie de crier : « le vent se lève, il faut tenter de vivre » ! Et pour cela il faut changer notre manière de voir le voyage. Le problème n’est pas, de mon point de vue, l’avion, la pollution et tout le reste. C’est, comme d’habitude, ce que l’être humain fait des machines qu’il conçoit. Il va voyager à l’autre bout du monde pour aller dans des hôtels aseptisés au confort similaire à un EHPAD sans se rendre compte réellement de la distance parcouru. Et il aura suffisamment payé pour se dire qu’on est ici « comme à la maison » ! Prendre conscience progressivement des territoires que l’on traverse, des paysages qui changent et des cultures qui se transforment me semble tellement plus intéressant que se prendre une simple claque en descendant d’un avion face aux nouveautés dans le duty-free et le changement de température.

 

“le vent se lève” de Miyazaki

“le vent se lève” de Miyazaki

 

Oueskon va ? 

C’est LA question que pose Ron Weasley à son poto Harry dans Harry Potter et les Reliques de la Mort. Extrait : « Chaque fois que le manque de nourriture coïncidait avec le moment où son tour était venu de porter l’Horcrux, il se révélait franchement désagréable. “Où va-t-on, maintenant” était devenu son refrain habituel […] On croyait que tu savais ce que tu faisais ! s’exclama Ron en se levant. On croyait que Dumbledore t’avait expliqué comment t’y prendre, on croyait que tu avais un véritable plan ». Comme le rouquin le plus connu de la littérature, nous pouvons nous sentir parfois déboussolé face à l’absence de carte directionnelle dans ce monde obscure. Tout le monde n’a pas la chance, comme Booba, de connaître d’avance son destin et de pouvoir chanter : « J’ai jamais su c’qu’étais mon rôle dans la vie / A part être riche, avoir une piaule à Miami beach. ». Le sens de nos misérables existences n’étant pas abordé dans cet article, je re-centrerai ma réflexion sur l’intérêt d’une destination de voyage. C’est d’ailleurs un sujet de crampe nerveuse dans la partie de mon cerveau où se situe la haine social contre la stupidité ambiante. Je me sabre une kro à coup de briquet pour me calmer.  

En effet, la plupart de mes connaissances vont chercher des paysages toujours plus éloignés alors que la France offre une terre si contrastée et méconnue, des vallées si mystérieuses et des kilomètres de côtes accessibles en TER ou en vélo. En fait, pour résumer, inutile de faire 5000 kilomètres pour voir un canyon américain : le Sentier des Ocres en Provence en offre de superbes aussi. Oui, l’herbe est toujours plus verte ailleurs, mais il suffit de faire une heure de vélo dans le Vexin pour s’en rendre compte. Je pense donc que l’enjeu du boycott des avions ne doit pas être un refus systématique de cracher sur l’avancée de la technique humaine, mais une invitation à reconsidérer notre approche du temps et de la distance. 

 

 

Konklusion : 

« On se régale » chantait Bengous d’entrain avec Jul sur l’album gratuit vol. 5. J’espère que c’est l’impression que vous aurez en terminant cette chronique mensuelle. De mon côté, je vais pouvoir rejoindre ma soirée et m’atteler à ma prochaine question Bengousienne : « Où tié bébé ? ». 

(Tu as aimé cet article ? Un autre article sur les “vacances fatiguante” a été écrit par l’auteur : A fond la forme : les vacances Quechua. Plaisir de lecture garanti !)

 

Il bacio

Il bacio

 

1 juillet 2020 3 commentaires
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Tribune

Voyage en Questionnie

par un contributeur 28 juin 2020
écrit par un contributeur

 

A l’occasion du confinement lié au Covid 19, j’ai pu me rendre en Questionnie, le pays des Questions qui ne se posent pas.

Je n’avais jamais eu l’opportunité de visiter ce pays. Il est réservé aux esprits confinés qui veulent s’évader.

Je suis plutôt le genre de mec à poser les questions qu’on pose, par exemple « comment vas-tu ? » ou juste « ça va ? ». Tous les jours, je pose les mêmes questions : celles qu’on m’a apprises à l’école. J’ai bien appris et je les pose très bien. I can even ask them in english : « how are you ? ».

Un jour que je me baladais dans ma ville confinée, attestation remplie dans ma poche, je me suis arrêté devant la vitrine d’un voyagiste. Parmis les livres qu’il proposait, une destination nouvelle attira mon attention : « Vivre sans… » de Frédéric Lordon publié par La Fabrique. Le billet valait une blinde, mais le départ était immédiat.

Le billet acheté, une belle hôtesse brune masquée de papier, me précisa : « .ien..enue à .ord .e  .et. a.ion ». Voyant que je n’avais rien compris, elle me répéta son propos démasquée : « Bienvenue à bord de cet avion de la Lordon Airways. Veuillez-vous installer, nous allons décoller ». Elle me prévint que : « le premier tiers du voyage est turbulent, on y croise de grands mots savants, organisés d’une manière étrange. Ne vous inquiétez, ils sont là pour dissuader certains esprits, n’hésitez pas à utiliser l’avance rapide. Les mots que vous rencontrerez pendant le reste du voyage sont plus facile d’accès.»

 

30 Prairial an -1

La première question que je ne m’étais jamais posé m’est tombée dessus comme ça :

Va-t-il rester quelque chose de l’État français à la fin du repas financier ?

Je ne connais pas de financier. Mais si j’avais été éduqué en financier, dressé à dénicher le moindre profit, je n’aurais pas arrêté mon travail avant d’avoir retourné le dernier bout d’État pour me saisir de chaque miette de bénéfice. Si j’étais un financier, j’aurais mangé l’État en entier.

Heureusement, je ne suis qu’un fabricant de produits de papier et de mots.

L’État français dévoré par la Finance, que deviendrait la Nation française ? Serait-il possible de la considérer comme une Nation libérée de son État ? Une Nation Libre d’État?

Je me suis souvenu d’un voyage lexical que j’avais fait il y a quelques années. J’avais rencontré un petit bonhomme amérindien du nom de Ishi. Il était un membre de la tribu Yana, en Amérique du Nord. C’est dans ce livre que j’avais la première fois découvert l’idée de Nation libre. La perspective de voir la Nation française s’éteindre de la même manière que la Yana Nation n’était pas assez plaisante pour faire partie de mes possibles. Il devait forcément y avoir une réponse à la hauteur de la Nation française.

Dans son Dictionnaire Manuel de Diplomatie et de droit international Public et Privé, Carlos Calvo, parle d’une « association politique » comme élément essentiel de l’État. Je ne sais pas vous, mais je suis gavé de la cuisine politicienne.

Est-ce qu’une « association démocratique » pourrait se substituer à « l’association politique » de l’État ?

Quelle serait la différence entre l’une et l’autre ? Je n’ai pas trouvé de réponse sur Google, alors j’ai dû en imaginer une.

La différence entre la politique et la démocratie pourrait être le mode de désignation des représentants. Les politiciens sont élus (élection), tandis que les démocraticiens sont tirés au sort (sortition).

Aussi rassurante que cette réponse puisse être, je me suis retrouvé devant une autre question.

 

 

1er floréal an -1.

Pourquoi les mots démocraticiens et sortition n’existent pas ?

Le mot sortition existe en anglais depuis longtemps déjà, mais pas en français.

 

 

Quant au mot démocraticien, il n’existe ni en français, ni en Anglais (democratician).

« Pourquoi le mot démocraticien n’existe pas ? » me suis-je demandé. Et comme je n’avais pas de réponse, je me suis adressé à l’administration en charge des mots : l’Académie française.

L’Académie française est l’administration en charge de la naturalisation des mots « sans-papier ». Je me suis saisi du formulaire B45EF789, qui correspond à la demande d’asile réglementaire pour un mot réfugié.

La bureaucratie lexicale m’a répondu : « Comme vous l’indiquez, de ces locutions dérive naturellement la locution nominale pour désigner des personnes : “les tirés au sort” ou “les personnes tirées au sort”, “tiré au sort” comptant une syllabe de moins que votre proposition “démocraticien”. A-t-on besoin de nouveaux mots ? C’est la question que devra se poser le groupe d’experts avant de commencer tout travail terminologique. À bientôt sur FranceTerme. »

Je saurais la prochaine fois que c’est le nombre de syllabe qui détermine la capacité à obtenir un certificat de naturalisation lexical.

Cette aventure administrative m’a permis de prendre connaissance d’un métier que je ne connaissais pas : terminologue. Rien à voir avec Terminator. Un terminologue vient du passé et donne la capacité à des mots d’exister, ou pas.

Combien de mots attendent patiemment un permis de circuler dans les têtes françaises ? Qu’est-ce que deviendrait ces têtes si elles disposaient de ces mots ?

J’en suis là. Je n’ai pas encore de réponses à ces questions, le voyage en Questionnie continue.

 Julien Biri

 

Découvrez

  • le dernier livre de l’auteur  : https://www.amazon.fr/dp/1677989343
  • Son site internet : https://www.petite-fabrique.fr/

 

28 juin 2020 2 commentaires
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ActualitéTibovski - Dessin de la quinzaine

Syndrome Post-confinement

par Tibovski 20 juin 2020
écrit par Tibovski
Le déconfinement

 

On dit que l’effet de souffle survenant après une explosion peut être plus dangereux que la déflagration elle-même. Psychologiquement, c’est l’impression que j’ai eu avec l’après-confinement. Vous avez probablement, comme moi, craint que l’enfermement et la privation ne nous transforment ou, plutôt, qu’ils nous révèlent le pire en chacun de nous. Et ce fut le cas, dans une certaine mesure. Les violences conjugales et familiales ont explosé durant ces quelques mois. Le taux de divorce a également bondi en Chine dès la levée des mesures d’isolement. Pour ma part, le confinement s’est déroulé comme une routine morne mais supportable. Evidemment, nous n’avons pas été tous égaux face à cette épreuve. Mon expérience ne vaut pas grand chose sinon d’avoir attiré mon regard sur un phénomène bien curieux : le déconfinement. 

 

Allô docteur….

Bien que biaisé par mon propre vécu, j’ai tout de même pris le soin de recueillir les impressions de mon entourage et constaté chez ces sujets un trouble général. Je l’appellerai “le syndrome post-confinement”. En voici les symptômes : un sentiment de vacuité, une perte de repères, une diminution aiguë de la concentration et enfin une haine viscérale de ces petites habitudes qui ont rythmé ces deux longs mois de confinement. Durant cette période, j’étais dans des conditions que je savais provisoires, relatives à la survie et à l’amélioration globale de la situation. Dès lors que nous avons connu la date d’échéance, notre réclusion s’en est trouvée beaucoup mieux rythmée car en partie planifiée. Nous n’avions qu’à attendre et nous retrouverions notre liberté chérie. Sauf que non. Nous n’avons eu le droit qu’à une liberté conditionnelle. L’après-confinement n’a pas été semblable à l’avant confinement. Ce fût donc une déception, mêlée à de l’incertitude qui nous a fait ressentir le poids de nos renoncements. Nous ne savions ni quand ni comment nous pourrions retrouver notre vie d’autrefois. Tout en sachant que c’était officiellement terminé, je n’ai pas ressenti le soulagement que j’espérais. Et cela m’a fait perdre tout le tempo qui m’avait permis de tenir jusque – là sans trop de difficultés. La racine du mal, c’est que le déconfinement n’a pas été une vraie fin du confinement; il n’a été que le sas de décompression. 

 

Un mal dispensable

Si je vous dis cela, c’est parce que ce ressenti n’est pas indépendant de la gestion politique de la crise. On pourrait se dire qu’il y a là une sorte de syndrome post-traumatique inéluctable après un tel choc. Même si je suis persuadé que cela est en partie vrai, je ne pense pas que le problème est fatalement lié à l’épidémie. Trois choses sont responsables de ce sentiment : 1) Un confinement sévère 2) Un déconfinement lent 3) Peu d’informations de la part du Gouvernement. Ces trois éléments sont le fait des responsables politiques. Et si je me permets de le souligner, c’est parce qu’il aurait pu en être autrement. Le confinement sévère de la France se justifie surtout en raison des manques de prévisions prises par les autorités en charge (voir mon article sur la pénurie des masques). La rigueur de ces mesures a renforcé l’effet d’égarement causé par un déconfinement à tâtons et une communication au compte-goutte. 

 

Tous sur le divan

Un peu de nuances à tout cela ; Xavier Briffault, chercheur CNRS en épistémologie de la santé mentale s’est penché sur les effets des mesures sanitaires. Il constate, en effet, que le niveau d’anxiété de la population est resté à un niveau normal durant le confinement. Selon lui, ce n’est pas uniquement dû à des “mécanismes de résilience” mais aussi au fait que le confinement a réduit pour beaucoup l’exposition à des sources de stress. Les données montrent également que le déconfinement a eu un effet sur l’anxiété en amplifiant les troubles du sommeil. Toutefois, le choc post-confinement n’a pas été aussi radical qu’anticipé. Cette transition pourrait avoir un effet plus subtil mais non moins important sur la santé psychologique de la population. 

 

Mon hypothèse, c’est qu’on est toujours dans un état de sidération, voire de déni, face à ce qui s’est passé. C’est une crise inédite dans l’histoire de la France et de l’humanité. Les réponses sociales ont été aussi folles que les inflammations provoquées par le Covid-19, chez les malades les plus touchés. En majorité, les victimes ont été tuées par une sur-réaction de leur système immunitaire. On peut dire qu’il y a eu aussi une sur-réaction du corps social à ce phénomène sanitaire.

 

Par la suite, les effets de cette épidémie sur la santé mentale s’expliqueront aussi par les conséquences socio-économiques qu’elle engendrera. Comme le dit Xavier Biffrault : “L’inquiétude porte plutôt sur ceux qui vont pâtir, demain, des conséquences économiques de la crise”. Évidemment, les conséquences directes du confinement que nous avons évoquées valent surtout pour ceux qui ont pu rester confinés chez eux. Car, encore une fois, nous n’avons pas tous vécu la même crise. On peut, en ce sens, penser au personnel soignant.

 

Il faudra aussi surveiller les soignants, en première ligne contre le Covid-19. Le fait d’avoir été dans l’action les a d’abord protégés psychologiquement. Mais les lendemains peuvent se révéler difficiles. 

 

Société post-traumatique

Cette angoisse post-confinement est comparable à ce que notre société endure. Nous ne souffrons pas qu’individuellement de cette catastrophe car c’est tout le corps social qui a été frappé. Un “après” fragile se dessine et nous craignons le retour de bâton sans le vivre encore. Le sentiment que rien ne peut et ne doit demeurer comme avant grandit. Ici comme ailleurs, cette situation ne conduit qu’à des interrogations, car tout peut advenir à présent. C’est précisément cette imprévisibilité d’un retour obligé à une normalité impossible qui crée l’angoisse. 

 

Prenez soin de vous et de vos proches et à la prochaine quinzaine !

 

Le dessin est réalisé par l’auteur Tibovski. 

20 juin 2020 4 commentaires
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ActualitéTibovski - Dessin de la quinzaine

Bas les masques !

par Tibovski 20 mai 2020
écrit par Tibovski

 

La pandémie est une tragique infortune, à coup sûr. Mais la gestion de celle-ci par nos responsables politiques n’est pas moins tragique. Tout, absolument tout dans cette crise révèle les erreurs passées et les malices présentes de cette classe politique. Concentrons nous un instant sur les masques, car c’est bien cela qui cristallise l’animosité. Mediapart avait révélé dans un dossier le pot-aux-roses sur la gestion des masques. Nous voici à l’épisode 2, non moins riche en combines. Ce manège kafkaïen saurait nous inspirer de brillants jeux de mots. J’ai décidé pourtant de n’en conserver qu’un seul. C’est celui choisi comme nom par un collectif ayant récemment éclos durant cette période : “Bas les masques”.  

 

Une erreur du passé

Pour rappel, en janvier-février, L’Etat, alors alerté de la pénurie de masques, n’en a commandé qu’une très faible quantité. Une circulaire interministérielle de 2013 impose pourtant un stock d’un milliard de masques afin d’assurer une distribution à toute la population en cas d’épidémie. Cela signifie que l’Etat doit commander 100 millions de masques par an. Mais sous le mandat de François Hollande, 5 fois moins de masques qu’exigé sont achetés. Un rapport de 2018 stipulait que le stock de 100 millions de masques restant périmerait en 2019. Mais l’Etat, encore une fois, ne prend pas les mesures nécessaires. C’est pour cette raison que le stock était insuffisant au début de l’épidémie. Cette pénurie n’a été que faiblement compensée par la suite mais elle a surtout été dissimulée à la population. À la place, les autorités ont préféré adapter les mesures sanitaires au nombre de masques accessibles. Ce qui n’est pas idéal sur le plan de la santé publique, vous en conviendrez. Si vous vous demandiez pourquoi le mot d’ordre sur les masques était imprécis, en voici la raison. 

 

À vos aiguilles citoyens !

La conséquence directe de cela, c’est qu’il fallait combler le manque. Les commandes industrielles, trop lentes pour la situation d’urgence, ont motivé diverses initiatives. 

C’est le cas de couturières et couturiers professionnels qui ont engagé bénévolement leur temps à produire des masques afin d’approvisionner les services essentiels durant la crise. Ce système D a très bien fonctionné, si bien, même, que de nombreuses commandes publiques ont été faites par les municipalités, les hôpitaux, les commissariats. Malheureusement, ce qui ne devait être qu’une aide modeste a pris la place des usines et chaînes de production appropriés. Le problème c’est que ces professionnels n’ont pas les moyens de production de manufactures, et surtout travaillent à plein temps sans la moindre rémunération. Cela me chiffonne quelque peu, voyez-vous. On ne peut attendre du volontariat citoyen qu’il remplace l’industrie. Un collectif de couturier.e.s bénévoles s’est donc constitué autour de ce même constat. Ils ont choisi le nom de “Bas les masques” et réclament d’être rémunérés pour leur travail. Ne nous rabâche-t-on pas à tort et à travers que la période sera économiquement difficile pour tout le monde ? Ce sera également le cas pour ces professionnels de la couture, qui pourtant, offrent de leur temps et de leur savoir faire pour pallier les incompétences de nos gouvernants. Il est donc normal que ce travail soit rémunéré surtout s’il dépasse les conditions usuelles d’une activité bénévole.

 

Sales mioches

C’est un problème plus général. La façon dont cette crise est gérée est particulièrement révélatrice de l’absurdité de notre système. Les choix des dirigeants de couper dans des dépenses nécessaires (hôpitaux, masques, recherche…) s’expliquent à la fois par un court-termisme négligeant les menaces lointaines et par des priorités budgétaires plus lucratives. Il n’est pas nécessaire de s’étendre pour en démontrer l’absurdité, l’épidémie s’en occupe parfaitement bien. Loins d’assumer cette faute, les représentants préfèrent culpabiliser et infantiliser la population. Serge Halimi a publié, dans Le Monde diplomatique, un article fort intéressant à ce sujet. Oh et je ne m’en étonne pas. C’est bien la signature de ce gouvernement que d’user de “pédagogie” pour justifier l’injustifiable. Mais là, je dois avouer que l’exercice intellectuel s’avère plus qu’acrobatique. 

Les citoyens ont bien au contraire montré une ingéniosité et un sens du devoir remarquables, là où nos têtes dirigeantes pataugent encore dans leur impéritie. Le cas des couturier.e.s est loin d’être l’unique exemple. Monsieur Bidouille, un youtubeur spécialisé dans la culture des makers et fablabs, a consacré une vidéo entière à l’auto-organisation des citoyens pour répondre aux besoins sanitaires. 

 

 

Très vite des amateurs de partout se sont rassemblés pour concevoir, fabriquer, tester et distribuer localement des masques, des visières et même des respirateurs. Cette auto-organisation a non seulement été d’un grand renfort mais a été plus rapide et efficace que les industries. Ces dernières se sont mêmes appuyées sur le travail de ces citoyens pour concevoir certains de ces produits. Si ces initiatives ne permettent pas de remplacer la chaîne de production classique, elle prouve néanmoins que la population participe bel et bien à l’effort “de guerre” et que celle-ci le fait sans la coordination ni l’aide des pouvoirs publics.

Il y a de quoi se sentir chatouillé quand on apprend que les masques seront rendus payants dans les grandes surfaces. C’est une question de santé nationale, il me paraît être de la mission de l’Etat que de pourvoir à ces besoins. D’autant que l’Etat a passé des commandes de masques avec de l’argent public. C’est dangereux, c’est hallucinant. Surtout quand on sait que ceux qui ont produit les masques en attendant n’ont pas été rémunérés. Pensez-donc aux inégalités quand on vend presque 1 euro le masque. Le masque est pourtant obligatoire dans certaines circonstances. Une boutique de couture de la Goutte d’Or s’était justement engagée à distribuer gratuitement des masques aux ménages précaires. Elle avait même fourni la municipalité et la police. Mais suscitant trop d’affluence, la police a préféré fermer la boutique. La priorité semble donc de faire respecter la distanciation sociale alors que les masques ne sont toujours pas disponibles gratuitement à tous comme ils le devraient. Et puis, n’y avait-il pas autre chose à faire pour que la distribution continue dans de meilleures conditions sanitaires ? 

Comprenez-bien que la rhétorique de l’effort collectif a une bien faible consistance face à de telles contradictions. On se sert la ceinture, on travaille bénévolement, on doit accepter des perspectives professionnelles incertaines, mais les grandes surfaces ne peuvent pas faire une croix sur des bénéfices, et l’Etat ne peut financer des masques qu’elle avait pourtant le devoir d’acheter. On perd un petit peu la notion de collectif là dedans.

 

C’est qui le patron (de couture) ? 

 

Tentons de remettre un peu en perspective la situation. Dans cette histoire il y a un désaccord profond sur la notion de travail. Cela n’a rien de nouveau, le travail est un concept clef pour définir les rapports économiques. Et à entendre Muriel Pénicaud nous le matraquer sur les ondes et dans la presse, il m’est bien clair qu’on touche à un point central. Pour schématiser grossièrement, il y a deux façon de le concevoir. 

  • La première façon, de l’école libérale, considère le travail comme une marchandise. Celui-ci dépend donc d’un marché de capitaux. 
  • La seconde, plus marxiste, définit le travail comme la source de la valeur économique. C’est le travail qui produit la richesse, les capitaux ne représentent que des moyens de productions. Et ceux-ci (infrastructure, machines, outil…) sont eux-même développés par la force de travail. 

 

Évidemment que ces deux visions, plutôt opposées sur l’échiquier politique, ne s’entendent pas sur la façon dont on devrait organiser le travail. Mais nous sommes dans une situation qui a tendance à montrer les insuffisances de cette première définition. Cette crise révèle le caractère essentiel de certains métiers, et relativise l’utilité sociale d’autres. 

Cela n’est pas sans nous rappeler l’expérience de pensée de Saint-Simon qui imagine que si l’on perdait subitement un nombre important des membres de notre élite politique, la société n’en souffrirait pas tandis que si l’on perdait le même nombre de travailleurs et des membres les plus éminents de chaque fonction sociale “la nation deviendrait un corps sans âme”. Nous n’avons, certes, pas vécu de telles pertes, mais nous avons pu voir que certaines tâches étaient moins nécessaires que nous l’imaginions, et que nous ne pouvions nous passer des métiers de la santé, de l’alimentation, de l’électricité… La version moderne de cet argument apparaît dans Bullshit Job de David Graeber. Pour lui il existe beaucoup trop de métiers inutiles, qui n’existent et ne se justifient que dans les spécificités du système économique actuel. La moitié des métiers pourraient disparaître sans avoir de graves conséquences sur le monde. « On pourrait probablement ramener la semaine de travail réel à quinze heures, ou même à douze, et personne n’y verrait que du feu » (p.108). Autrement dit, il y a une inadéquation entre la valeur sociale du travail et sa valeur marchande. L’hôpital public est un bon exemple d’un domaine qui a une faible valeur marchande mais qui a une très grande valeur sociale. Dans des situations comme celle-ci, nous voyons bien que définir la valeur du travail de cette manière a bien peu de sens. En revanche on comprend bien que c’est fondamentalement le travailleur qui porte l’économie, contrairement à une “élite oisive”, comme le disait Saint-Simon, qui capte et parasite cette richesse. Au delà de ces considérations marxistes un peu expéditives, nous devrions, à l’aune de cette épidémie, repenser notre système.

Sur le plan du travail, la leçon que nous offre Covid-19 devrait probablement porter sur la valeur sociale du travail. Cela signifie donc se concentrer sur le travailleur, et sur les besoins sociaux. Un truc du style : “on arrête tout et on réfléchit”. On arrête deux minutes les conneries avec la restriction des dépenses de santé et la réforme des retraites et on se demande ce qu’il faut à notre société pour qu’elle et ses habitants survivent. Et surtout, on protège les travailleurs. 

Mais on voit déjà les mauvaises habitudes revenir au galop. Ce sont les capitaux qu’il va falloir nourrir. Bien évidemment, on parle d’une bête affamée par deux mois de confinement. Une bête insatiable que l’on doit nourrir sans cesse de peur qu’elle nous morde si l’on ne continuait pas. Ce tyran velu ne nous apporte pourtant aucune satisfaction, aucune sécurité. N’est-il pas temps d’arrêter ces insanités ? Parfois je me dis que nos espoirs devraient porter sur des petits exemples qui nous laissent entrevoir un monde différent. Car l’épidémie a su me convaincre que les citoyens savaient oeuvrer et s’organiser seuls afin que la société continue à tourner. 

Le salarié bénévole ou le volontariat capitaliste. Il faudrait demander à Romain ce qu’il pense de ce concept. En tout cas le capitalisme ne cesse de se réinventer. Pour ceux qui pensent que cette crise changera notre système, ne sous-estimez pas sa résilience. 

A la prochaine quinzaine !

 

Sources :

  • https://www-mediapart.fr/journal/france/020420/masques-les-preuves-d-un-mensonge-d-etat?onglet=full
  • https://www.liberation.fr/france/2020/04/27/masques-comment-le-gouvernement-a-menti-pour-dissimuler-le-fiasco_1786585 
  • https://www.liberation.fr/france/2020/05/01/bas-les-masques-des-couturieres-professionnelles-ne-veulent-plus-travailler-gratuitement_1787048
  • https://www.20minutes.fr/societe/2768847-20200428-coronavirus-pourquoi-exige-travaille-gratuitement-interrogent-couturieres-professionnelles-sollicitees-fabriquer-masques
  • https://www.monde-diplomatique.fr/2020/05/HALIMI/61785
  • http://www.leparisien.fr/video/video-trop-de-monde-pour-des-masques-gratuits-a-la-goutte-d-or-la-police-ferme-la-boutique-09-05-2020-8313873.php
  • http://www.leparisien.fr/video/video-trop-de-monde-pour-des-masques-gratuits-a-la-goutte-d-or-la-police-ferme-la-boutique-09-05-2020-8313873.php
  • https://www-mediapart.fr/journal/france/170520/comment-recompenser-l-utilite-sociale-des-metiers

Bibliographie :

  • Comte de Saint-Simon. (1841). Oeuvres de Saint-Simon, Capelle, Paris, Orthographe modernisée.
  • Graeber, D., & Cerutti, A. (2018). Bullshit jobs. New York: Simon & Schuster.

 

Dessins par  l’auteur Tibovski 

20 mai 2020 0 commentaire
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Tends l’autre joue…

par Tibovski 22 avril 2020
écrit par Tibovski
Tends l'autre joue...

Rien de bien précis aujourd’hui. Vous n’aurez pas le droit à mon indignation habituelle.Seulement une pensée, un brin poétique, je l’espère.

Pour ne pas vous décevoir, dès la publication de mon dernier dessin, je me suis mis en quête d’un nouveau sujet. Ma première frustration a été de constater que de trop nombreux candidats s’offraient à moi : Le tragicomique du procès de Trump contre l’OMS, le traitement des africains en Chine, l’incendie à Tchernobyl, les restrictions en Pologne sur les droits à l’avortement et l’éducation sexuelle, la recrudescence des violences policières dans les quartiers populaires. Tous des bons sujets auxquels, au demeurant, je n’aurais pu apporter la moindre touche personnelle. Ma seconde frustration n’a d’autre origine que le Covid-19. Toutes ces actualités  sont liées au coronavirus, alors que j’avais promis de ne pas en parler. L’échec de mes précédentes tentatives m’avait déjà fait déchanter. Comment se résigner à éviter un sujet omniprésent ? 

Ce long et pénible travail d’investigation m’a inspiré la réflexion suivante. La pandémie que nous vivons imprime de si profonds changements dans les affaires humaines que celle-ci se trouve mêlée à presque tous les évènements. Même ceux accidentels comme l’incendie de Tchernobyl. Prenons donc de la hauteur sur ces diverses thématiques, pour nous plonger dans le coeur de la question. Si je ne suis pas parvenu à éviter le sujet du coronavirus autant en parler franchement. 

La pandémie perturbe le fonctionnement usuel de nos sociétés. Ce qui profite à certains décideurs, et ce qui aggrave certaines situations. Souvenez-vous, par exemple, de l’invasion de criquets dont nous avions parlé dans un  précédent billet. Comment aurions-nous pu éviter le sujet de l’épidémie ? Une catastrophe comme celle-ci prend une tournure plus dramatique dans un contexte de crise sanitaire. Cette période marque une vulnérabilité profonde nous rendant à la merci de tous les vents. Tout événement se trouve inévitablement lié au coronavirus, puisque c’est celui-ci qui dictera son dénouement. Il n’y a rien à faire, c’est notre trame de fond d’aujourd’hui. Et demain, les historiens ne pourront échapper au contexte de pandémie pour lire ce qui a pu se dérouler pendant ces quelques mois. Reste que notre monde est fébrile et que le moindre malheur supplémentaire passerait pour un coup du sort, pour une seconde gifle… 

A la prochaine quinzaine !

Tends la joue

 

Dessins réalisés par l’auteur Tibovski. 

22 avril 2020 0 commentaire
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ActualitéTibovski - Dessin de la quinzaine

Viktor Orban : régner sur un champ de cadavres…

par Tibovski 8 avril 2020
écrit par Tibovski
Viktor Orban

Ce que je m’apprête à exposer ici pourrait alimenter une lecture mystique de l’Histoire. La montée du populisme xénophobe en Europe est une réminiscence d’un passé sombre mais pourtant pas si lointain. Comme si l’Histoire se répétait sans mémoire, ou qu’elle répondait à un ordre supérieur. Cela n’est évidemment pas ma vision. Je crois pourtant que l’Histoire est une mémoire à partir de laquelle l’humanité peut apprendre. Certes parfois imbécilement en dérapant sur les mêmes erreurs. Ainsi se pose une énigme trop vaste pour mon billet de la quinzaine : que peut nous enseigner le passé de notre espèce ?

Là où je veux en venir ;  le 31 mars, Viktor Orbán, premier ministre hongrois s’est arrogé les pleins pouvoirs. Le gouvernement, par cette loi censée répondre à la crise du coronavirus, suspend à la fois toute élection ainsi que l’activité du parlement. Comble de l’infamie, cette mesure ne prévoit aucune échéance précise. 

La question est donc : que nous enseigne notre passé pour interpréter cet événement ?  

 

De quoi Viktor Orban est-il le nom ? 

Anti-européen, protectionniste, xénophobe, son parti Fidesz constitue l’une des principales forces d’extrême droite en Europe. Cette vague récente, que l’on condamne souvent de “populiste”, est comparée à celle ayant frappé l’Europe dans les années 30. Mais est-ce vraiment comparable aux régimes du  l’entre-deux guerre  ? Oui et non. 

Oui parce qu’il y a dans le discours et les positions de l’extrême droite actuelle des thématiques et des cibles qui restent inchangées. Les régimes autoritaires européens ont profité d’une crise économique pour pointer la défaite des démocraties libérales. Le populisme se caractérise, en ce sens, par le rejet d’une élite distante des réalités, tout en puisant dans des symboliques fortes de nation et de moralité.

Le nationalisme d’hier et d’aujourd’hui s’attaquent identiquement à l’élite cosmopolite. Elite aujourd’hui caractérisée par les technocrates de l’UE. La nation constitue un principe unifiant mais aussi uniformisant qui ne peut supporter les minorités. La nuance toutefois, c’est que le contexte a changé. Le protectionnisme économique est une option beaucoup plus difficile à mettre en place avec les accords européens, les marchés communs et l’euro. Aussi déterminés soient-ils de claquer la porte à l’UE, cela n’est pas si simple. L’exemple britannique le rappelle-bien. L’Europe n’est plus la poudrière qu’elle était ; où le moindre prétexte était motif de guerre. Les Etats sont bien plus dépendants les uns des autres. C’est d’ailleurs cette dépendance parfois confondue avec de l’aliénation qui fait grimper les opinions anti-européennes. 

La seconde différence, c’est le contexte d’immigration. Certes, ces régimes  d’avant-guerre étaient profondément xénophobes. Toutefois, les flux migratoires n’étaient pas les mêmes et la xénophobie se manifestait majoritairement à l’encontre de populations européennes. Dans les années 30, les populismes ciblaient principalement les nations ennemies ou encore certaines minorités ethniques comme les juifs et les tziganes. Aujourd’hui le danger viendrait de l’extérieur de l’Europe, donnant aux migrations une connotation civilisationnelle.

Les migrants contres lesquels se dressent les partis d’extrême-droite contemporains constituent l’un des thèmes majeurs de leur politique. Il est possible que là où l’autre, l’étranger, était alors représenté par le voisin – encourageant d’ailleurs des ambitions hégémoniques – c’est aujourd’hui le lointain étranger qui incarne cet ennemi fictif qu’on agite devant les foules. La rhétorique n’a pas fondamentalement changé, en somme. Elle ne fait que s’adapter. 

 

Le spectre de la dictature nous est-il si éloigné ? 

Rappelons que l’article 16 de la Constitution française prévoit également des “pouvoirs étendus” au chef de l’Etat en temps de crise. Bien que se refusant à en faire usage, le gouvernement français a prévu une loi d’urgence pour réagir au Covid-19. Ces mesures, que certains pourront juger “nécessaires”, reviennent cependant sur des acquis sociaux. Une ordonnance permet par exemple des semaines de 60h de travail. Je ne juge pas ici de l’intérêt ou non de telles mesures mais rappelle que les crises donnent la possibilité, même en France, d’affermir le pouvoir exécutif.

Le choix du contrôle policier soutenu sur les déplacements de la population ainsi que ses dérives illustrent parfaitement les stratégies autoritaires souvent adoptées pour répondre à des situations d’urgence. Là où aujourd’hui nous voyons le moyen d’endiguer l’épidémie, rien ne nous assure que ce type de lois d’urgence soit en principe toujours bénéfique pour la population. Premièrement, cela dépend des détenteurs du pouvoir politique. Et le défaut principal des systèmes représentatifs, c’est la possibilité pour un groupe politique potentiellement néfaste d’accéder démocratiquement au pouvoir. Rien ne garantit que le peuple choisisse des représentants qui leur soient favorables. La définition d’une “crise” et des moyens de sa résolution dépend uniquement du pouvoir politique en place. Cet argument pose une interrogation encore plus fondamentale. 

 

Pourquoi l’autoritarisme comme réponse à une crise ?

Je ne formule pas ici une opposition franche, je me permets juste de questionner ce qui semble être du domaine de l’évidence. Pourquoi conçoit-on qu’un moment d’urgence nécessite de centraliser les forces ? La réponse la plus évidente serait de dire que l’urgence appelle à une réponse rapide et efficace. Simplifier le processus décisionnel permet à la fois d’épargner la gestion de débats inféconds mais aussi d’avoir plus de leviers et de flexibilité sur l’ensemble de la situation. Unifier la gestion de la situation consiste en ce sens à permettre la planification et le développement d’une stratégie cohérente. 

Plus rapide ? Oui.  Plus efficace ? Peut-être. Adéquat ? Tout dépend de ceux en charge de la gestion de crise. L’urgence n’exige pas de faire n’importe quoi pourvu que ce soit fait vite. Si je souffre d’affreuses crampes d’estomac, je ne me rendrai pas chez le premier marabout ou chaman du coin sous prétexte qu’il est disponible plus tôt que mon médecin traitant. Je rajouterai également que le jeu politique ne s’arrête pas en pleine crise. Le management de crise chez les professionnels de la politique, c’est aussi la capacité à l’exploiter à son avantage. C’est précisément le moment où il faut redoubler d’attention et d’esprit critique.

Que Macron et Philippe s’indignent des procès qui sont en train d’être menés contre l’exécutif en pleine crise me paraît plus que dérangeant, voire douteux. C’est précisément parce que la moindre décision peut avoir de graves conséquences qu’il est essentiel de juger en temps réel les réactions des décideurs. Ce doute s’impose d’autant plus quand on sait que certaines des personnalités aujourd’hui en action sont en partie responsables de l’exsanguination du système de santé français. 

L’accident industriel de Lubrizol avait également permis de mettre en lumière le problème profond de gestion de crise sanitaire en France. Les autorités publiques ont sciemment menti à la population et à certains responsables locaux afin d’éviter toute panique. Le présupposé ici est que l’information dans ces situations peut être dangereuse pour la population. Seulement on sait aujourd’hui que le risque de la panique est une fausse idée reçue (Une excellente vidéo explique cela en détails). Malheureusement la rétention d’information risque de compromettre les opérations de gestion de crise. Et nous pouvons également nous demander si l’autorité représente  la meilleure stratégie pour répondre à cette crise.  En effet, il y a peut-être là aussi un présupposé erroné ou fallacieux. Car c’est bien en urgence que l’on fait davantage de concessions. Des concessions qui peuvent parfois être dangereuses. 

A la prochaine quinzaine !

 

Dessin de couverture : Victor Orban par © Tibovski 

8 avril 2020 0 commentaire
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Cependant, la modernité — ou selon les mots de l'auteur, le Nouveau Monde — ne laissera pas Diam Welly indemne puisqu'elle le fera résolument s'engager dans une nouvelle ère de mutations affectant les moeurs, la moralité, les codes et conduites favorisant, ipso facto, l'émergence d'individus — comme Sellou, faisant la cour à l'épouse de Karamokho alors absent — gouvernés par la satisfaction de leur plaisir et de leurs intérêts personnels.
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La Carte Blanche de la photographe @gwenvael_engel 📸
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Persepolis • Iran • 2016
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Persepolis • Iran • 2016
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Persepolis • Iran • 2016
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Kol Ukok, Kirghizistan, 2015.
Traditionnellement, la yourte est ouverte vers le sud par une entrée unique. A l'intérieure, l’espace est quadrillé selon un usage précis. Le sud et l’est de la yourte sont l’espace de la femme où se trouvent le foyer et la place de travail. L’espace de l’ouest est réservé à l’homme et aux invités. Cette photo est révélatrice : dirigée vers le sud, c’est la femme qui se dévoile, à sa place comme l’admet la tradition
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Le comédien ET metteur en scène Michaël Benoit Delfini
 t’aide à te lancer avec ce texte burlesque digne d'un @borisvian_officiel !
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[CULTURE] - Déjà entendu parler des Bullshit j [CULTURE] - Déjà entendu parler des Bullshit jobs ? On doit l’expression à feu David Graeber 🔥
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Anthropologue ayant réhabilité l’anarchie ♾ Figure du mouvement Occupy Wall Street ♾ Ecrivain multi-récidiviste ♾ Les Sex Pistols n’ont qu’à bien se tenir ! 
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Dessin + article par l’audacieux @tibovski ✏️
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